La crise actuelle en Israël
oblige chacun de nous à développer un plus grand bita'hone,
une plus grande confiance en D.ieu.
Pour comprendre ce qu'est
le bita'hone, commençons par définir ce qu'il n'est pas.
Le bita'hone ne signifie
pas qu'il faille croire naïvement que tout ira bien. Cela ne signifie pas
que je doive croire que je peux me promener pendant la nuit dans un quartier
à risques sans être agressé. Cela ne signifie pas que je
puisse croire que je n'aurai pas d'accident, quelle que soit la vitesse à
laquelle je conduis pour me rendre à un rendez-vous. Ce n'est pas là
une croyance, c'est un espoir insensé. Cela a beaucoup à voir
avec notre envie d'aisance et de confort, mais rien avec la confiance en D.ieu.
Le bita'hone veut
dire que l'on croit que :
D.ieu crée la réalité
instant après instant d'une manière qui reflète l'intérêt
qu'Il nous porte, Son engagement et Sa compassion.
Nous désirons que la réalité soit exactement ce qu'elle
serait si nous pouvions pressentir où nous mènent les événements
actuels.
L'engagement de D.ieu
D.ieu sait tout ce qui se
passe, y compris chaque pensée qui traverse l'ensemble des êtres
humains. Rien ne peut exister sans que D.ieu le fasse continuellement exister.
Le fait qu'une créature existe, que soit une pierre sur une route ou
la fourmi N° 8162 dans une fourmilière, est une révélation
de la constante volonté de D.ieu et de Son engagement. Rien n'arrive sans
qu'Il l'ait voulu.
Rien n'arrive sans que D.ieu l'ait voulu.
Mais il existe une différence
considérable entre la volonté et l'engagement.
Si D.ieu veut que la fourmi N° 8162 existe, Il n'est pas intimement impliqué
dans la vie de cette fourmi. Une fourmi est créée pour faire partie
de quelque chose de plus grand qu'elle - l'écosystème de l'univers.
Sa vie est appelée à être vécue selon les lois de
ce que nous appelons par commodité la " nature ".
D.ieu a créé
les lois de la nature, et c'est selon ces lois qu'Il dirige continuellement
le prétendu " ordre naturel ". Généralement parlant,
D.ieu ne modifiera pas ces principes, et Il ne bouleversera pas, par exemple,
les lois de la gravité ni ne modifiera la force d'attraction électromagnétique,
encore qu'Il l'ait fait à l'époque des Dix Plaies. Cependant,
même si elle fonctionne à l'intérieur des lois de la nature,
l'entremise opportune de D.ieu ne peut être définie que comme miraculeuse.
Et les miracles sont quelque chose que D.ieu fait seulement au profit de nous
autres, les êtres humains, qui avons été créés
à Son image.
Prenons un exemple tiré
de la crise actuelle : Si un franc-tireur tire un coup de feu en direction d'une
cible qui se meut lentement, comme dans le cas d'une Israélienne en route
vers son travail, les lois de la balistique peuvent vouloir que la balle atteigne
sa cible. Mais D.ieu, pour des raisons qui n'appartiennent qu'à Lui, peut
décider qu'il y aura une fondrière sur la route qui modifiera
juste assez la marche de la voiture pour que la balle manque son objectif et
que soit épargnée la vie de celle qui devait en être la
victime.
D.ieu peut aussi décider
qu'il n'y aura aucune fondrière et que la balle atteindra sa cible.
Afin de comprendre que la
manière dont D.ieu crée la réalité est toujours compatissante,
soit que le projectile frappe sa cible ou qu'il la manque, revenons sur un épisode
de la vie de Moïse.
D.ieu avait ordonné
à Moïse d'aller chez Pharaon et de lui demander de permettre aux
esclaves hébreux de partir. La réponse de Pharaon a consisté
à punir ces esclaves. Il a décrété qu'ils devraient
non seulement fabriquer des briques mais aussi se procurer les matières
premières à cette fin. Moïse, indigné de voir, parce
qu'il avait obéi à Ses directives, une telle aggravation dans
la vie de ses frères, demanda à D.ieu : " Pourquoi fais-Tu
du mal à ce peuple ? "
Moïse a demandé à D.ieu : " Pourquoi fais-Tu du mal à ce peuple ? "
Par sa question, Moïse
admettait que la volonté de D.ieu lui était incompréhensible.
Néanmoins, la fois suivante où D.ieu lui a ordonné de remplir
une mission, Moïse s'est exécuté sans rechigner.
Le véritable bita'hone
ne signifie pas que l'on ne se pose pas de questions. Le véritable bita'hone
signifie que l'on a pris en soi-même la résolution qu'il existe
des réponses aux questions que l'on se pose et que ces réponses
sont les bonnes, mais qu'elles peuvent ne pas nous être connues pour le
moment.
Quand quelqu'un doit affronter
une tragédie et se demande : " Pourquoi D.ieu a-t-Il laissé
se commettre une telle horreur ? ", la question n'est souvent pas une question
du tout, mais une affirmation implicite : " D.ieu ne devrait pas avoir fait
une telle chose. " Les vraies questions sont un aveu de notre propre petitesse,
de nos limitations dans la compréhension. Les questions n'expriment pas
un manque de foi. Ce qui constitue un manque de foi, c'est de penser que la
question constitue la réponse.
La différence est
de savoir si nous doutons de nous-mêmes - c'est-à-dire de notre
aptitude à tout comprendre - ou si nous doutons de D.ieu.
La conclusion de l'histoire
Personne n'est capable,
au milieu d'une histoire, de deviner quelle en sera la conclusion. Le bita'hone
signifie que l'on croit qu'il y a une conclusion à l'histoire, et que
si nous pouvions connaître cette conclusion nous n'aurions pas de doutes
maintenant.
C'est ici que ce concept
devient délicat : Il existe deux mondes, celui de la matière dont
nous faisons l'expérience, et celui de la spiritualité qui se
situe au-delà de notre perception. Il arrive souvent qu'une personne
semble échouer dans le monde matériel, mais être victorieuse
dans le monde spirituel. La " conclusion de l'histoire " n'a réellement
lieu que dans le monde spirituel.
Représentons-nous
une scène datant de l'Inquisition espagnole : Juan Mendoza était
un converso de la deuxième génération qui travaillait comme
négociant en tissus. Il savait qu'il était juif, mais il n'avait
aucune idée de ce que cela signifiait, sauf qu'il ne devait pas manger
de pain pendant une semaine au printemps et qu'il devait jeûner un jour
en automne. L'Inquisition finit par le découvrir. On lui laissa le choix
: jurer une allégeance éternelle à la croix ou mourir sur
le bûcher.
Juan, comme beaucoup de
conversos, décida de choisir la mort d'un martyr. Si nous considérons
cette histoire avec le recul de 450 ans, alors que nous en sommes suffisamment
éloignés pour pouvoir l'idéaliser, nous sommes tentés
d'en applaudir la conclusion. Un homme apparemment ordinaire a fait le choix
héroïque de mourir pour son idéal et il est ainsi parvenu
à la grandeur. L'âme de Juan jouit d'un état d'illumination
et de proximité à D.ieu dans un monde spirituel auquel il n'aurait
jamais eu accès s'il était mort de la goutte à l'âge
de 47 ans, comme beaucoup de ses contemporains.
Cependant, si vous aviez
été alors à Madrid, et si vous aviez assisté à
la mort horrible de Juan, aux pleurs versés par sa veuve et ses enfants,
il est probable que vous auriez protesté contre la fin affreuse de l'histoire.
Et cela est vrai de presque chaque chapitre de l'histoire juive.
Le Maharal de Prague, le
grand mystique du XVIème siècle, explique que la difficulté
provient de ce que, dans ce monde physique, nous ne pouvons prendre aucune distance
par rapport aux événements qui nous environnent ; nous en sommes
si proches qu'il nous est presque impossible de les considérer au travers
d'une perspective. La fin de toute histoire qui a lieu dans notre propre vie
nous est nécessairement dissimulée. Voilà la principale
épreuve que nous impose le bita'hone.
La fin de toute histoire qui a lieu dans notre propre vie nous est nécessairement dissimulée.
Le Sefath émeth,
le Rebbe 'hassidique de Gour au XIXème siècle, développe
l'idée selon laquelle nous sommes comme des sourds venus assister à
un concert. Nous pouvons voir les contorsions désordonnées du
chef d'orchestre, mais nous n'avons aucun indice de ce qu'expriment ses mouvements.
De même qu'il manque aux sourds la faculté d'entendre la musique,
laquelle leur ferait comprendre le sens de toutes ces gesticulations, de même
nous manque-t-il la faculté de percevoir, derrière les événements
en cours, la dimension spirituelle, l'infinie interaction des âmes et
le fonctionnement du plan divin.
La joie au sein de la
crise
Quand j'étais une
enfant, je fréquentais un groupe 'hassidique. Il est d'usage, dans l'après-midi
de Roch hachana, de se rendre au bord d'un cours d'eau et de s'y débarrasser
symboliquement de nos péchés. Ce groupe 'hassidique allait toujours
devant un étang poissonneux situé dans les Jardins botaniques
de Brooklyn. Il était convenu à l'avance avec les autorités
que la grille serait ce jour-là tenue ouverte à leur intention
pour les besoins de cette cérémonie.
Un Roch hachana, quelqu'un
a commis une erreur. Bien qu'une autorisation lui ait été accordée
au préalable, le groupe, avec leur distingué Rebbe à sa
tête, est arrivé aux Jardins Botaniques et a trouvé porte
close, sans personne nulle part pour l'ouvrir. Les 'hassidim allaient çà
et là, ne sachant que faire. Soudain le Rebbe escalada la clôture.
Au début, les 'hassidim ont été surpris, puis ils l'ont
suivi l'un après l'autre. Quand ils ont rejoint leur Rebbe, celui-ci
leur a dit : " Vous devez savoir que les obstacles sont là pour
être franchis ! "
Voilà comment le
bita'hone nous confère une joie profonde et durable. Le bita'hone
ne dit pas : " Je ne veux pas avoir à affronter d'obstacles ! "
Il dit : " Les obstacles, les difficultés, les épreuves sont
là pour que je puisse les surmonter, et afin que je devienne meilleur
que je l'aurais été sans eux. " La joie est le résultat
de cette prise de conscience.
Le bita'hone n'est
pas mesuré par votre réussite lorsque vous escaladez la clôture.
Mais il l'est par votre réaction à la vue de cette clôture
- selon que vous faites une grimace et renoncez à l'escalader, ou selon
que vous appréciez que D.ieu ait installé là une barrière
pour votre ultime bénéfice.
Le bita'hone est mesuré par votre réaction à la vue d'un obstacle - Le franchirez-vous ou abandonnerez-vous ?
Une véritable joie
n'a rien à voir avec une existence dégagée de tous soucis,
ni avec des choses qui vont bien. Bien au contraire, notre joie doit venir de
la manière dont nous pouvons réagir lorsque nous avons à
affronter des circonstances défavorables. La vraie joie vient de la résolution
que l'on a prise en soi-même. Le Talmud dit : " Il n'est pas de joie
comme la décision prise en présence d'un doute ". La joie,
c'est quand on embrasse la vie dans ses propres termes, parce que l'on croit
profondément que la vie est belle et comme elle devrait être, et
que les épreuves sont une partie intégrante de la vie.
Efforçons-nous d'appliquer
le concept du bita'hone à la crise actuelle dans le Moyen-Orient.
On a beaucoup discuté
de la question de savoir si Yasser Arafat détient ou non la maîtrise
de la violence. Sans vouloir d'aucune manière disculper Arafat - car
tout être humain porte la responsabilité du mal qu'il fait - nous
devons être profondément convaincus que c'est D.ieu seul qui dirige
en dernier ressort le cours des événements. D.ieu est non seulement
au courant de tous les événements qui ont lieu chaque jour en
Israël et S'y implique, mais Il orchestre les événements
avec autant de compassion que nous pouvons recevoir.
Bien qu'il nous soit extrêmement
difficile de discerner cette compassion dans les circonstances actuelles, avoir
du bita'hone signifie que l'on sait qu'elle est néanmoins présente.
Chacun de nous doit s'efforcer à chaque instant d'entretenir la conscience
que D.ieu dirige le cours des événements.
Une chose est certaine :
La Terre d'Israël est le lieu où, même malgré soi,
on a conscience de la participation de D.ieu dans les affaires humaines. Quand
on vit en Israël, il est très difficile d'ignorer la main de D.ieu
dans notre destin.
La lutte pour la Terre
d'Israël
La crise que nous traversons
actuellement est une lutte pour la Terre d'Israël. Contrairement à
d'autres persécuteurs qui voulaient nous voir abandonner notre religion,
ou aux Nazis qui haïssaient notre existence même, les Arabes veulent
simplement la terre. Si nous leur donnions la terre et partions tous vivre en
Amérique, ils nous laisseraient tranquilles et cesseraient de crier :
" Mort aux Juifs ! ".
Le Talmud enseigne que trois
choses ne peuvent être acquises que dans la souffrance : la Tora, la Terre
d'Israël, et le monde à venir. La souffrance nous réveille
et nous force à nous confronter à la réalité. Elle
débranche le " pilote automatique " par lequel nous traversons
la plus grande partie de nos vies et elle nous oblige à un réexamen
de nos valeurs et à un réajustement de nos actions.
Selon la manière
dont nous réagissons, la souffrance peut être le catalyseur le
plus puissant pour une croissance spirituelle, apte à nous pousser à
évoluer plus vite et plus loin que selon la cadence confortable que nous
nous serions choisie. Puisque nous devons tous nous situer à un niveau
spirituel élevé afin d'être dignes d'hériter de la
Terre d'Israël, nous pouvons comprendre pourquoi cette terre ne peut être
acquise que par la souffrance et le perfectionnement qu'engendre cette souffrance.
Les prophéties
Les prophètes nous
prédisent que la lutte pour la Terre d'Israël annoncera la venue
du Machia'h (Messie) et sera très difficile. Cette période
est appelée par le Talmud " les douleurs de l'enfantement du Machia'h
".
Les femmes enceintes suivent
des cours d'accouchement sans douleur, non pas parce qu'elles y apprendront
à calmer leurs souffrances pendant leur travail, mais parce que savoir
ce qui les attend les aide à assumer ces douleurs. De même, savoir
à quoi l'on devra s'attendre pendant la période des " douleurs
de l'enfantement du Machia'h " ne change rien à l'épreuve,
mais la rend moins effrayante. Le fait que certains événements
aient été annoncés par les prophètes devrait nous
permettre d'y voir plus facilement la main de D.ieu.
Nous savons par les prophètes
que l'ère messianique se présentera en deux étapes : la
première sera guidée par le Machia'h, fils de Joseph, et
la seconde par le Machia'h, fils de David.
Le Gaon de Vilna, le grand
Sage du XVIIIème siècle, écrit dans son livre Evène
chelèma que l'ère du Machia'h, fils de Joseph, marquera
l'époque du retour physique sur la Terre d'Israël. Cette ère
précèdera le repentir spirituel de la véritable ère
messianique, celle du Machia'h, fils de David.
Il existe une discontinuité
entre l'ère du Machia'h, fils de Joseph, et la révélation
du Machia'h, fils de David. C'est la période que nous traversons
actuellement, celle qui est la plus douloureuse de toutes.
Les prophètes décrivent
une époque effroyable, où toutes les nations se dresseront contre
Jérusalem.
Les textes contenus dans
les derniers livres des prophètes bibliques décrivent une époque
effroyable, où toutes les nations se dresseront contre Jérusalem.
Cela peut être interprété de diverses manières. Par
exemple, les nations qui s'élèveront contre Jérusalem pourraient
agir pour faire suite à des condamnations des Nations Unies, sans qu'il
s'agisse d'une guerre véritable. La seule chose qui soit claire dans
ces prophéties est que cette période sera très dure, et
que son dénouement dépendra de nous et de notre repentir.
Que devrons-nous faire pendant
cette période ? Le Talmud (Sanhédrin 98b) nous enseigne que pendant
les " douleurs de l'enfantement du Machia'h " deux choses nous sauveront
: les actes de bonté et l'étude de la Tora.
Un antidote à
la cruauté
Quand on lit les journaux,
ce que nous faisons tous fiévreusement, on y apprend deux sortes de nouvelles
:
Les actes de violence
quotidiens, qui sont souvent caractérisés par une très
grande cruauté.
Les empoignades politiques
et les luttes pour le pouvoir (" Y aura-t-il ou non un gouvernement d'union
nationale, le processus de paix va-t-il se poursuivre, etc. ").
Aux actes de cruauté
répondent, comme antidote, les actes de bonté, et aux enchevêtrements
de la vie politique qui nous laissent dans la désillusion et le désespoir
rétorque l'étude de la Tora. Celle-ci en effet, dans son essence,
nous incite à assujettir nos esprits à celui de D.ieu, sans que
n'apparaisse aucun égoïsme ni aucune ambition.
Le Talmud nous enseigne
que nous reconnaîtrons que nous n'avons personne sur qui compter sauf
sur D.ieu. C'est ainsi que celui qui pense que notre salut viendra du gouvernement
israélien, ou des autorités américaines, ou de l'armée
israélienne, aura à être convaincu du contraire par de
tragiques dénouements. Notre salut viendra quand nous regarderons seulement
D.ieu.
Nous ne pouvons pas dire
que nous aimons que les choses soient ainsi : le faubourg de Guilo à
Jérusalem sous le feu de l'ennemi et des Juifs assassinés et mutilés.
Mais le bita'hone
exige que nous répondions : " Je n'aime certes pas ce qui arrive
actuellement, mais je ne vais pas me laisser décourager par un sentiment
d'inexorabilité devant de telles calamités. Je vais au contraire
me laisser pousser en avant par la crise. Je vais être celui qui accomplit
le plus d'actes de bonté, je vais étudier davantage la Tora. Je
vais voir la main de D.ieu dans les événements quotidiens. La clôture
verrouillée est là pour que je la franchisse ! "