La fin du livre de l’Exode expose chacune des facettes du Michkane, « le
sanctuaure mobile » des enfants d'Israël dans le désert.
L’insistance de la Torah sur les détails
de la construction de ce sanctuaire peut surprendre.
Elle peut être comprise lorsque l’on se réfère aux
textes des sages qui voient en cet espace un microcosme dans lequel tout était
régie selon les valeurs de la vérité révélée.
Les maîtres du Midrash nous enseignent que cet endroit est le lieu de
la « réalisation » du projet divin sur terre.
Ils s’appuient sur le verset : « le lieu de ta résidence
tu as réalisé D.ieu » (Exode 15 , 17), pour dire que, dans
le Michkane, la création n’est plus un substrat permettant la
mise en œuvre du projet divin , mais elle est un monde en action, une
réalité palpable.
Dans ces conditions chacun
des versets en rapport avec ce lieu doit être étudié et être
source d’inspiration et d’enseignement.
C’est dans cet esprit qu’il
faut aborder les Midrashim qui suivent.
Au début du chapitre 25 de l’Exode, la Torah énumère
les différentes sortes de matières premières collectées
auprès des enfants d’Israël pour la construction du Michkane.
Des métaux comme l’or, l’argent, le cuivre sont mentionnés
ainsi que des peaux de bélier teintes en rouge.
Un Midrash remarque que
le fer ne fait pas partie des métaux recueillis
et explique cette absence par le fait qu’Edom (Rome) est symbolisée
par le fer et qu’il est inconcevable de trouver dans le Michkane un élément
rappelant une civilisation qui fut à l’origine de la destruction
du Temple.
Le Midrash enseigne :
« Il n’est pas fait état d’un don de fer ; ni dans
le Michkane, ni dans le Temple. Pourquoi ? Parce que Edom l’impie est
symbolisée par le fer et elle a détruit le Beit haMikdach (le
Temple) ».
Par ailleurs un autre Midrash
voit dans l'utilisation « des peaux de
bélier teintes en rouge » (Ex. 25 - 5) pour la confection du Michkane,
une allusion au royaume d’Edom; jouant d’un jeu de mot assez facile
reliant le terme rouge ici « méodamim » au terme Edom.
La lecture de ces deux midrashim laisse perplexe. Ceux-ci semblent en être
en parfaite contradiction. Le premier refuse de voir dans le Michkane, le sanctuaire
du désert, la moindre allusion au royaume d’Edom. Le second Midrash
accepte l’idée d’une représentation d’Edom
dans le Michkane au niveau de ses tentures.
Ces deux textes sont ils conciliables ?
La controverse autour de
la présence ou non d’une allusion à Esaü,
et à sa desendance Edom, dans le Michkane peut être expliquée
par la nature spécifique des valeurs prônées et développés
par cette nation.
Pour les appréhender correctement, il convient de se pencher sur les
enseignements de la Torah concernant Essav en qui s’origine Esaü.
Nous avons expliqué dans notre étude précédente
qu'Esaü est celui qui maîtrise parfaitement le monde de l'IMAGE.
Qu'Esaü est à même de véhiculer un message par son
apparence, même lorsque celui-ci ne correspond en rien à ses croyances
profondes.
Les tentures étaient étaient l’IMAGE que donnait de lui même ce lieu aux yeux de ceux qui n’y entraient pas.
Des lors les Midrashim
cités plus haut trouvent leur sens. Le premier
texte traite des matériaux nécessaires à la construction
de l’intérieur du Michkane, donc aux valeurs intérieures
de l'homme. Ce faisant, il ne peut y trouver la moindre allusion aux valeurs
développées par Esaü.
En revanche, le second
midrash s’exprime à propos des tentures
qui constituent le lien entre le sanctuaire et le monde extérieur. Elles étaient
l’IMAGE que donnait de lui même ce lieu aux yeux de ceux qui n’y
entraient pas.
Elles devaient donc être soigneusement étudiées pour être à même
de transmettre un message par leur simple aspect à ceux qui les contemplaient.
Elles devaient fonctionner sur un mode de communication basé sur l’IMAGE.
Ici, il faut faire allusion à Esaü, à Edom. Il faut être
capable de s'inspirer des techniques de communication développées
par cette civilisation afin de pouvoir les utiliser à bon escient.
Ainsi, le Midrash a pu
dire que les tentures rouges (méodamim) font
référence à Essav, dans la mesure où elles mettent
en valeur une notion qu’il porta à son apogée.