Pourquoi lisons-nous le Livre de
Ruth - l'histoire d'une femme moabite qui s'est convertie au judaïsme et
a fini par épouser Boaz, juge d'Israël - à Chavouoth, fête
où nous célébrons le Don de la Torah au Mont Sinaï
?
Les commentateurs suggèrent
deux approches pour expliquer cette coutume :
Ruth représente un modèle
d'acceptation de la Torah.
Sans elle l'histoire juive n'aurait
pas de continuité.
Toutes deux sont surprenantes, comme
nous allons le voir en les étudiant une par une.
A première vue, la première
approche semble très directe: Chavouoth commémore l'acceptation
de la Torah par le peuple juif, et le Livre de Ruth décrit l'acceptation
de la Torah par un individu isolé au moyen de la conversion.
Dans la mesure où nous étions
tous des convertis au Mont Sinaï, l'expérience de Ruth vient nous
rappeler que nous sommes juifs uniquement grâce à notre acceptation
de la Torah. Le judaïsme n'est pas une caractéristique raciale et
n'est automatique pour personne ; il se fonde à la base sur la conversion
et l'acceptation de la Torah, même pour les enfants d'Abraham.
Ruth n'était pas une convertie
ordinaire. Son nom nous apporte une indication sur sa véritable essence.
En hébreu, le nom " Ruth " est composé des lettres resh,
vav, tav, qui s'additionnent et donnent en valeur numérique le nombre
606.
Tous les êtres humains ont
l'obligation de respecter les 7 lois noachides - ainsi nommées parce
qu'elles furent données après le déluge - de même
que Ruth l'avait dès sa naissance, en tant que moabite. Si vous ajoutez
ces 7 commandements à la valeur de son nom, vous obtiendrez 613, le nombre
de commandements de la Torah.
L'essence de Ruth, son énergie
vitale, fut cette découverte et cette acceptation des 606 commandements
qui lui manquaient.
Ce qui fait de Ruth, la personne
en quête de Torah par excellence, que l'on dresse devant nous comme le
modèle éclatant de la bonne façon d'accepter la Torah.
Si nous pouvions apprendre à lui ressembler dans notre acceptation personnelle
de la Torah (l'acte du Service divin qui est l'essence même de Chavouoth),
nous réussirions à absorber l'intégralité de l'élévation
spirituelle que D.ieu nous offre à Chavouoth (Voir le commentaire du
Gaon de Vilna sur le Livre de Ruth).
Alors que cette approche semble très
évidente de prime abord, après un examen plus approfondi, nous
découvrons qu'elle présente en fait une difficulté majeure.
Chaque personne qui lit l'histoire de Ruth est immédiatement frappée
par la force de son dévouement pour sa belle-mère, Naomi. Ce célèbre
passage duquel le Talmud déduit de nombreuses lois de conversion (Yevamot
47b), exprime le refus obstiné de Ruth de se séparer de Naomi,
dans les termes les plus forts.
Mais Ruth dit : 'N'insiste
pas auprès de moi pour que je te quitte et que je m'en retourne sans
te suivre, car là où tu iras, j'irai ; là où
tu demeureras, je demeurerai ; ton peuple sera mon peuple et ton D.ieu sera
mon D.ieu. Là où tu mourras, je veux mourir aussi et y être
enterrée, que l'Eternel m'en fasse autant et plus, si toute autre
chose que la mort me séparait de toi.'
Un tel amour et un tel souci pour
le devenir d'une autre personne sont des qualités absolument admirables,
mais qui ne sont aucunement liées à la foi en D.ieu et en Sa Torah.
Celle qui est considérée comme le modèle parfait sur lequel
nous devons calquer notre propre acceptation de la Torah, ne devrait-elle pas
être essentiellement motivée par sa foi et son idéalisme,
plutôt que par son attachement à une personne particulière,
ou même d'ailleurs à un peuple tout entier ?
ATTACHEMENT A D.IEU
Analysons ce point au moyen de l'examen
d'un passage difficile du Talmud :
Rabbi Eléazar dit : "
Les gens qui n'ont pas de connaissances en Torah, ne pourront prendre part
à la résurrection des morts, comme il est écrit (dans
Isaïe 26) : Le mort ne vivra pas. On pourrait penser que ceci
se réfère à tous les morts, c'est pourquoi le texte
poursuit : Ceux nécessitant une guérison, ne se lèveront
pas. Seuls, ceux qui soutiennent que les paroles de la Torah sont branlantes
et faibles, ne se lèveront pas. "
Rabbi Yo'hanan répond : "
Vous n'avez apporté aucun plaisir au Créateur, en formulant une
telle affirmation au sujet de l'ignorant en Torah. "
Rabbi Eléazar, voyant que
ses paroles causaient de la peine à Rabbi Yo'hanan, dit : " Mon
Maître, j'ai trouvé un remède pour eux dans la Torah. Il
est écrit : Vous seuls qui êtes restés attachés à
l'Eternel votre D.ieu, êtes tous en vie aujourd'hui (Deut 4 : 4).
Mais comment est-il possible pour un être humain d'être attaché
à la Présence divine, quand il est écrit : L'Eternel
ton D.ieu est un feu dévorant (Ibid 24). Une personne peut-elle s'attacher
au feu ? Pour t'enseigner que toute personne qui marie sa fille à un
étudiant en Torah, qui l'aide dans ses affaires ou qui partage sa propriété
avec lui, D.ieu la considère comme si elle Lui était directement
attachée
" (Talmud, Ketubot, 111b).
Pourquoi la résurrection devrait-elle
être liée à notre niveau dans l'étude ?
Et comment pouvons-nous comprendre l'idée que s'attacher à un
étudiant en Torah équivaudrait à s'attacher à D.ieu
Lui-même ?
L'un des 613 commandements est d'aimer
D.ieu. Ce commandement semble impossible à accomplir. Comment pouvons-nous
aimer quelqu'un que nous ne connaissons pas ?
De plus, D.ieu est infini alors que nous ne le sommes pas, nous n'avons aucune
notion de la façon dont Il pense, de ce que sont Ses préoccupations,
Ses désirs, ou toute autre chose Le concernant.
Si nous ne connaissons pas un minimum de ces éléments sur une
autre personne, il nous est impossible de déterminer si nous l'aimons.
Nous pouvons considérer cette personne comme importante, nous pouvons
même l'admirer. Mais pour pouvoir l'aimer et y être attachée,
cette personne doit d'abord nous être familière. Ce qui est également
vrai de notre amour pour D.ieu. Nous ne pouvons L'aimer que si nous développons
une certaine connaissance et familiarité à Son égard. Mais
comment y parvenir ?
La solution évidente passe
par notre connaissance de la Torah. D.ieu nous a donné dans Sa Torah,
de nombreuses informations Le concernant. Il nous parle de Son sens de la justice
et de l'équité, de Ses priorités et de Ses sentiments,
de Ses espoirs et de Ses ambitions pour notre futur.
Il existe deux aspects à la
Torah : la connaissance et l'étude.
1) Tous les juifs doivent accumuler
un savoir en Torah suffisant pour leur permettre d'accomplir les commandements
comme il faut, puisque l'accomplissement des commandements est un devoir.
2) Le second aspect n'est pas lié à l'accomplissement des
commandements. Le Talmid 'Hakham (le Sage) étudie la Torah
pour se familiariser avec D.ieu et connaître Sa culture.
Le premier mot des Dix Commandements
est Anokhi. Le Talmud nous révèle qu'il s'agit de l'acronyme des
mots ano nafshi katvit yahavit, " J'ai écrit Moi-même ce livre
que Je vous donne " (Talmud Shabbat, 105a).
Le Talmid 'Hakham qui passe sa vie, plongé dans l'étude
de la Torah, s'imprègne de l'Ame même de D.ieu, en même temps
que des paroles de Sa Torah.
Notre but est d'acquérir une familiarité avec D.ieu, avec Lequel
nous sommes susceptibles de développer une relation. Nous voulons aimer
D.ieu et qu'Il nous aime en retour, nous voulons également que ces sentiments
soient ressentis de manière réciproque de part et d'autre. Pour
cela, nous avons besoin du Talmid 'Hakham.
Ce n'est que grâce à
lui que nous acquérons la connaissance de D.ieu, élément
préalable à toute éventualité d'une relation avec
Lui. Puisque, pour parvenir à aimer D.ieu, la connaissance doit précéder
les sentiments.
Sans le Sage, cette connaissance et donc cet amour serait absent du monde.
C'est l'une des merveilles du judaïsme
que le Tsaddik (le Juste) qui s'immerge totalement dans le service de
D.ieu - incluant la prière et les bonnes uvres, ressent souvent
un plus grand amour pour D.ieu que le Sage qui passe sa vie en poursuites intellectuelles.
Mais sans la connaissance de D.ieu, générée par le Sage,
le Tsaddik n'aurait jamais les moyens d'entreprendre sa quête émotionnelle
d'attachement à D.ieu.
L'amour de D.ieu émane donc
de la Torah.
Le Tsaddik qui s'attache au Sage, est le premier à ressentir cet
amour, et ceux qui s'attachent au Tsaddik perçoive cette chaleur
émanante et cette énergie, à travers lui. Mais la source
ultime de cet amour est la Torah et notre accès à la Torah dépend
nécessairement de la quantité de connaissances que nous avons,
grâce aux efforts et au travail ardu du Sage.
LA RECHERCHE DE RUTH
Ruth la moabite recherchait les 606
commandements manquants, non seulement parce qu'elle était en quête
de la vérité et de la bonne manière de vivre - ces motivations
étaient sans nul doute présentes dans son désir de se convertir
- mais surtout parce qu'elle voulait s'attacher à D.ieu avec fidélité
et se connecter ainsi à la Source de toute vie et de tout être.
Or, elle ne pouvait le faire qu'en
s'attachant à une personne déjà proche de D.ieu. Elle a
donc suivi Naomi, plutôt qu'une vérité abstraite.
Nous lisons son histoire à
Chavouoth, car c'est le genre d'acceptation de la Torah que nous recherchons.
Notre but n'est pas l'accomplissement des lois divines, mais l'attachement à
D.ieu Lui-même.
La seconde approche offerte par les
commentateurs pour expliquer la raison de cette lecture à Chavouoth,
est également suggérée dans son nom. Elle est nommée
Ruth parce que son arrière petit-fils, le Roi David, inonda D.ieu de
chants et de louanges (Yalkout, Tehilim 247). Le mot ravé en hébreu,
qui est une anagramme du nom de Ruth, signifie " abreuver ", hors
David composa le livre des Psaumes, qui est le livre d'hymnes de référence
pour la majorité de l'humanité. Selon la tradition, Chavouoth
est également l'anniversaire de la naissance de David, ainsi que du jour
de sa mort, et sa généalogie complète est mentionnée
à la fin du Livre de Ruth.
UN LIEN ESSENTIEL
Pour apprécier cette approche
à sa juste mesure, il est nécessaire d'avoir de plus amples informations
:
D.ieu dit à Moïse :
'N'attaque pas Moav et n'engage pas de combat avec eux.' (Deut. 2 : 9)
Pourquoi Moïse aurait-il envisagé d'entrer en guerre avec Moav sans
la permission de D.ieu ? Moïse raisonna ainsi : Si les Madianites qui ne
sont venus que pour aider Moab (dans la guerre que ces derniers ont engagée
avec Israël, telle qu'elle est décrite dans la Parashat Balak),
la Torah a commandé (à leur sujet) : Attaque les Madianites
et tuez les, car ils vous ont accablé par le complot qu'ils ont conspiré
contre vous
(Nombres 25 : 17-18). La même politique doit de toute
évidence être appliquée à l'encontre de Moab, les
instigateurs du complot. Mais D.ieu dit à Moïse : 'Mon avis est
différent ! J'ai encore un magnifique trésor enfoui dans cette
nation : Ruth, la moabite.' (Talmud, Baba Kama 38a)
Non seulement Ruth était l'arrière
grand-mère de David, mais c'était à elle que revenait la
tâche d'amener David dans le monde. Le besoin que le monde avait de Ruth
était si grand que la nation moabite toute entière fut maintenue
en existence pendant plusieurs centaines d'années en son mérite,
le monde entier attendant sa naissance.
Pouvons-nous trouver des raisons
nous permettant de comprendre, pourquoi seule Ruth était capable d'engendrer
la lignée qui devait donner naissance à David, duquel descend
le Messie ?
(Les anges pressèrent Lot,
lui disant :) 'Prends ta femme et tes deux filles qui sont ici' (Genèse
19 :15). Le terme hébreu nimtsaot ('qui sont ici') fait référence
dans le verset à deux importantes découvertes : Ruth, la moabite
et Na'amah, l'amonite. Il est écrit : J'ai trouvé Mon serviteur
David. Où D.ieu l'a-t-Il donc trouvé ? A Sodome (Yalkout, Lekh
Lekha 70).
Quand D.ieu détruisit Sodome,
Il épargna Lot, à cause de ses deux filles. Ses filles, croyant
que leur père et elles étaient les seuls êtres vivants sur
terre, eurent avec lui dans une relation incestueuse. En conséquence,
l'une donna naissance à Moab et l'autre à Amon (fondateurs des
deux peuples du même nom).
Il semblerait donc que Ruth soit
nécessaire, parce qu'elle descendait de Lot ?
Et qui était donc Lot ?
Voici maintenant les chroniques
de Téra'h : Téra'h engendra Avram, Na'hor et Haran ; et Haran
engendra Lot
Et Avram et Na'hor prirent pour eux des épouses. Le
nom de la femme d'Avram était Saraï et le nom de la femme de Na'hor
était Milka, fille de Haran - qui était le père de Milka
et de Iskah. (Genèse 11 : 27-28)
L'examen approfondi de ce passage
révèle une information étonnante. Il semble que Haran,
frère de Avram, était le grand-père de la femme la plus
importante de l'histoire. Les Sages nous enseignent en effet que Iskah n'était
autre que Sarah (voir Rashi ibid), Rebecca était la petite-fille de Milka,
et toutes les femmes de Jacob étaient ses arrières-petites-filles.
Lot étant le fils de Haran, Ruth était elle aussi sa petite-fille.
Peut-il s'agir d'une simple coïncidence
? Tentons de découvrir la signification de tout cela.
UN GENIE SPECIAL
L'électricité avait
déjà été comprise et découverte depuis de
nombreuses années, quand Edison est né. Et Graham Bell ne découvrit
rien de nouveau dans la nature des vibrations acoustiques. Pourtant sans ces
deux génies, la connaissance de l'électricité et des vibrations
acoustiques n'aurait pas profité au monde.
Il faut mettre en uvre un génie
spécial pour exploiter des idées, de même qu'il faut du
génie pour les découvrir. En hébreu, ce génie est
désigné sous le nom de binah, souvent traduit par "
compréhension ", et qui est une caractéristique propre aux
femmes.
En prélude au Don de la Torah,
nous lisons :
Voici ce que tu devras dire à
la Maison de Jacob et annoncer aux Enfants d'Israël. (Exode 19 : 3)
Rashi explique la raison de cette
redondance apparente dans les termes " Maison de Jacob " et "
Enfants d'Israël ". La Maison de Jacob se réfère aux
femmes juives - les femmes juives constituent la maison. Les principes du judaïsme
voient le jour au sein de la maison juive et se voient matérialisés
sous les conseils de la femme juive. L'homme juif a reçu l'obligation
d'étudier la Torah, mais c'est à la femme juive d'en traduire
les principes de manière concrète au quotidien.
Abraham fut le génie qui apporta
la connaissance de D.ieu au monde. Son frère Haran portait en lui les
graines de génie nécessaires à la transposition de ce savoir
dans la vie de tous les jours. Ce qui explique comment les plus grandes femmes
juives ont pu descendre de Haran.
Le royaume juif est un reflet du
Royaume céleste. Le Royaume céleste renferme un grand pouvoir.
Ce pouvoir a pour fonction de libérer, de régénérer
et de garantir qu'aucune partie de l'humanité qui serait noble et précieuse,
ne soit jamais perdue.
Une Intervention céleste était
donc nécessaire quand Lot, fils de Haran, quitta Abraham pour se perdre
à Sodome. Les pouvoirs de sainteté et de grandeur enfouis en lui,
risquaient d'être perdus à tout jamais.
Mais comme D.ieu est un Souverain absolu qui contrôle l'histoire (tout
en laissant l'homme libre de faire ce qu'il veut), Il est en mesure de garantir
le sauvetage d'un potentiel menacé. Ceci est la véritable signification
du Royaume céleste.
Empêcher la perte et assurer
la sauvegarde de toute chose de valeur, requiert une vigilance éternelle.
La conversion de Ruth a rendu possible la récupération du pouvoir
égaré d'Haran, lequel était nécessaire pour permettre
la naissance du royaume d'Israël, reflet du Royaume céleste sur
terre. Ruth portait en elle la binah qui lui permettait de traduire ce pouvoir
au quotidien.
L'ERREUR DE LOT RECTIFIEE
Le mariage de Ruth avec Boaz souligne
cet aspect de rédemption, impliqué dans l'établissement
du royaume d'Israël, car ce fut un mariage par lévirat qui eut pour
ultime conséquence la naissance de David.
Ce type de mariage est recommandé
spécifiquement par la Torah, afin de récupérer une âme
qui a quittée ce monde sans être parvenue à y laisser de
descendance. Le but tout entier du mariage de Ruth était donc de garantir
que l'âme de son défunt mari Ma'hlon - c'est-à-dire le pouvoir
et la grandeur spirituels qui étaient en lui - ne soit pas perdue pour
le monde et pour Israël.
La récupération de
ce potentiel s'est produite au moyen de la réparation de l'erreur de
Lot par son arrière-arrière-petite-fille, Ruth.
Lot avait quitté Abraham pour
des possessions matérielles. Après tout, il était déjà
croyant, il savait la vérité, il avait appris comment servir D.ieu
et ne pensait plus avoir besoin d'Abraham. Ne percevant aucunement la nécessité
spirituelle de rester auprès d'Abraham, Lot partit pour Sodome.
Son erreur fut que pour servir D.ieu, il n'est pas suffisant d'être conscient
de la vérité absolue, il faut s'attacher à D.ieu. L'attachement
à D.ieu se manifestant au moyen de l'attachement au Talmid 'Hakham,
il aurait dû rester avec Abraham.
Le Gaon de Vilna explique comment
Ruth corrigea cette erreur par un attachement inébranlable.
L'une des lois de la conversion que nous apprenons de l'histoire de Ruth est
la nécessité de décourager le candidat à la conversion.
Naomi parla donc à sa belle-fille Orpa et essaya de dissuader Ruth également.
Au bout d'un certain temps, Naomi abandonna.
Le Gaon demande : Comment Naomi sut-elle
exactement quand arrêter ?
Le texte dit : Voyant qu'elle était fermement décidée
à l'accompagner, elle cessa d'insister auprès d'elle. (Ruth
1 : 18) Naomi étant bien plus âgée que Ruth, Ruth n'aurait
pas dû avoir de difficultés à marcher au même rythme
qu'elle. Pourtant, Naomi vit que Ruth faisait de grands efforts pour maintenir
son allure sur la sienne. De là, elle comprit que Ruth était déchirée
et qu'une partie d'elle était encore réticente à l'idée
de se convertir.
Selon la tradition, Ruth était
une princesse moabite. Elle était habituée à recevoir le
meilleur de ce que la vie pouvait offrir. C'était aussi une très
belle jeune femme dans la fleur de sa vie. Le pas qu'elle s'apprêtait
à franchir, allait lui faire connaître une vie de pauvreté
; sa belle-mère avait tout perdu dans ses malheurs et rentrait chez elle
complètement démunie. En suivant Naomi, Ruth quittait une vie
sociale élevée pour devenir une simple convertie au statut douteux.
Il n'était même pas clair qu'un juif serait autorisé à
l'épouser.
La majeure partie de son être
s'écriait : " Pourquoi aller en Israël ? Tu peux servir D.ieu
n'importe où. Après toutes ces années passées dans
une maison juive, tu connais toutes les lois, tu peux observer les commandements
en restant chez toi. Ce n'est pas la peine de faire un tel sacrifice. "
Ruth était déchirée. Elle recherchait avant tout la proximité
avec D.ieu, elle voulait s'attacher à Lui. Rester à Moab en observant
les commandements ne lui serait d'aucune utilité, seul son attachement
à un Talmid 'Hakham pouvait lui permettre d'atteindre son but.
Elle décida donc de partir avec Naomi pour rejoindre le peuple juif,
sans se soucier de son avenir. Mais la tension de ce conflit intérieur,
rendit sa marche plus difficile.
C'est à ce moment-là
que Naomi cessa de la décourager. Elle comprit Ruth et vit que celle-ci,
recherchant l'attachement à D.ieu, avait intégré le véritable
message du judaïsme.
Traduction et Adaptation de Tsiporah Trom