La Tablette d'Adar est un dessin,
souvent pittoresque et très coloré, reproduisant divers symboles se rattachant
à ce mois, et bien entendu à Pourim. Ce dessin porte aussi en hébreu, soit en
ligne droite, soit en forme d'arc de cercle, l'inscription suivante Michénikhnass
Adar Marbime Bessim'hah : " Avec l'arrivée d'Adar, plus grande doit
être la joie".
DES MOIS FAVORABLES
Voici quelques-uns des symboles
que vous pouvez trouver dans une Tablette d'Adar : une bouteille de vin et des
verres à vin; un Hamantache ( "oreille d'Haman, gâteau de
Pourim de forme triangulaire et rempli d'une farce de fruits secs ou
de grains de pavot) ; une crécelle ; une table dressée pour un banquet, avec ou
sans convives ; deux poissons géants nageant l'un au-dessous de l'autre,
peut-être aussi des lions et des oiseaux.
Voyons maintenant ce que
signifient ces symboles. Tout d'abord, la devise spéciale d'Adar : " Quand Adar
est arrivé, beaucoup de joie en est dérivée", ou quelque chose d'approchant,
comme nous l'avons dit. Le dicton hébraïque cité plus haut a son origine dans
le Talmud.
Nos Sages ont dit qu'il est des
jours et des mois " heureux " pour les juifs. Non qu'ils soient marqués d'une
chance spéciale ou d'une superstition, mais en raison de certains événements
heureux qui eurent lieu ce jour-là ou ce mois-là. Le troisième jour de la
semaine, par exemple, est considéré
comme " bon " parce que, le troisième jour, parlant de la Création, la Torah
répète deux fois les mots : " Et Dieu vit que cela était bon ". Adar
est un mois heureux pour les juifs parce que s'y produisirent les événements
qui engendrèrent la fête de Pourim, et qu'en ce mois, nous avons, aussi
maintenant, cette joyeuse fête.
Nos Sages expliquent plus loin
que Dieu favorise certains jours et certains mois, déjà marqués par quelques
événements heureux pour les juifs, en y provoquant d'autres circonstances
propices. De la même manière, Il favorise les hommes bons en leur donnant des
occasions supplémentaires de faire le bien, et en faisant d'eux l'instrument
par l'intermédiaire duquel Dieu accomplit un acte spécial de bien. Le contraire
est également vrai, disent nos Sages. (Le mois d'Av, et particulièrement le
jour de Tichah-béav, sont associés à la destruction du Temple et d'autres
événements tragiques. Mais nous avons la promesse Divine que ces jours, eux
aussi, deviendront des jours heureux quand le Messie viendra et apportera
la rédemption finale de notre peuple).
LA DOUBLE ERREUR D'HAMAN
Mais on pourrait demander :
Pourquoi ne pas avoir une Tablette similaire pour les autres mois, tel que
Kislev, par exemple, où nous célébrons l'heureuse fête de 'Hanouccah?
La réponse est que Pourim
appartient à une catégorie à part pour la raison que ce qui est arrivé à Pourim
était un retournement complet des événements. Haman était au faîte de la
puissance, et il projetait l'anéantissement de tous les juifs. II était si
assuré de triompher qu'il fit dresser un gibet pour Mordékhaï le juif. Mais,
comme le boomerang qui revient à son point de départ, tous ses plans se
retournèrent contre lui. C'est Haman qui fut pendu au gibet préparé par lui
pour Mordékhaï. Et ce qu'il avait voulu comme un jour de défaite et
d'anéantissement pour les juifs se changea en jour de triomphe et de
réjouissances pour eux. Et étant donné que chaque génération sécrète son propre
Haman, il est bon que nous soient rappelés Adar et Pourim. Nous, juifs, certes
nous nous souvenons. Puissent les Haman se souvenir, eux aussi !
Quand Haman tira au sort pour
trouver le jour où il exécuterait son plan atroce d'anéantissement de tous les
juifs, et que le mois d'Adar fut désigné, le cruel ministre fut fort satisfait.
Car il savait que c'était le seul mois qui ne contînt aucune fête, c'est à-dire
aucun jour heureux pour les juifs. Un fait qu'il connaissait redoubla sa joie :
le septième jour d'Adar, Moché Rabbénou, Moïse, le prophète le plus grand
pour les juifs, celui qui avait reçu la Torah au Mont Sinaï, était mort. Adar
ne pouvait donc qu'être un mois malheureux pour le peuple d'Israël. Double
satisfaction, double erreur. Certes, Adar n'avait pas encore de fête, mais il
était réservé pour celle de Pourim, dont serait cause Haman lui même. Quant au
sept Adar, ce dernier oubliait, ou peut-être ignorait, que c'était aussi
l'anniversaire de la naissance de Moché Rabbénou !
LE SYMBOLE DES POISSONS
Cela nous amène au symbole des
poissons figurant sur la Tablette d'Adar. L'une des raisons en est que Moche
Rabbénou fut " tiré hors de l'eau " après que sa mère l'eut placé dans une
corbeille qu'elle posa sur les eaux du Nil. Ce symbole nous rappelle donc Moché
Rabbénou et son anniversaire le sept Adar.
Les poissons nous rappellent
aussi ceci : de même que le poisson ne peut vivre sans eau, ainsi nous, juifs,
ne pouvons subsister sans la Torah. C'est l'une des raisons pour lesquelles
celle-ci est comparée à l'eau. Quand le peuple d'Israël abandonne la Torah,
même un être aussi abject qui Haman peut devenir puissant et comploter contre
les juifs. Mais que ces derniers demeurent fidèles à la Torah ou y reviennent
s'ils s'en sont écartés, aucun ennemi ne peut l'emporter sur eux.
LA RAISON PRINCIPALE
Mais la raison principale de la
présence du symbole des poissons dans la Tablette est que le mois d'Adar est
relié à la constellation des Poissons dans les signes du zodiaque. Le zodiaque
est une ceinture imaginaire dans le ciel, à l'intérieur de laquelle le soleil
parait se mouvoir au long de l'année. Les anciens astrologues avaient la
croyance que les étoiles ont le pouvoir de déterminer le destin de l'individu.
En trouvant laquelle d'entre elles dominait à la naissance de celui-ci, ils
prétendaient savoir à coup sûr les jours où la chance lui sourirait.
Il a toujours été enseigné au
peuple juif que le destin, soit de l'individu, soit de la collectivité dans son
ensemble, n'est jamais déterminé par les étoiles, mais par la Providence de
Dieu. Nos Sages l'ont exprimé dans leur maxime célèbre : " Ein Mazal l'Yisraël
- Les juifs ne sont pas influencés par les étoiles". Mazal est le terme
hébraïque désignant une constellation d'étoiles. Sa racine en hébreu signifie "
verser" ou " influencer ". Quand le juif dit " MazalTov ", il ne veut pas dire
par là une " bonne étoile ", mais : " que Dieu t'accorde de la chance ".
Nous avons douze mois hébraïques (Nissan, lyar, Sivan, etc.), et il y a douze
signes du zodiaque (Aries, le Bélier ; Taurus, le Taureau; Gemini, les Gémeaux;
etc.). Chaque mois hébraïque a son propre Mazal se rattachant à l'aspect
principal du mois. Par exemple, le Bélier (en hébreu Mazal Tleh - Agneau)
correspond au mois de Nissan, quand le sacrifice de Pessah était un agneau; les
Gémeaux correspondent à Sivan, quand la Torah fut donnée (Deux Tables avec les
Dix Commandements); la Balance (Librra) correspond à Tichri, quand Dieu juge
tous les Juifs au jour du Jugement (Roche-Hachanah et Yom-Kippour). Les
Poissons (Pisces) sont le signe correspondant au mois d'Adar. Cela nous
rappelle Moché Rabénou et notre dépendance à l'égard de la Torah, dont dépend
notre vie même.
Les autres symboles de la
Tablette d'Adar - le vin, l'Hamantache, la crécelle sont des symboles
familiers de Pourim. Le vin et les réjouissances jouent un rôle important dans
l'histoire de Pourim, laquelle commence par le grand banquet d'Assuérus, et se
termine par la célébration du Miracle de Pourim, issu des banquets organisés
par la reine Esther pour le roi et pour Haman.
L'Hamantache, fourré de
choses cachées, symbolise le fait que nul ne peut jamais savoir quel sera son
sort; celui-ci est caché, et connu de Dieu seul. Mais il est certain qu'il sera
doux à la fin...
Ainsi donc la Tablette d'Adar est
un rappel bienvenu de l'esprit du mois, et les leçons de la fête qui l'éclaire
: la joyeuse fête de Pourim.