ORIGINE ET SENS DE LA VIE
L'homme est ainsi le trait d'union entre le monde d'en bas et celui d'en haut. II est facteur d'équilibre et d'harmonie.
D.ieu dit: "Que
la lumière soit et la lumière fut" (Genèse 1,
3). Cette lumière apparaît dans l'ordre de la Création après
le ciel et la terre alors que la terre (mais pas le ciel) était "tohu-bohu",
solitude et chaos.
"D.ieu vit que la lumière était bonne et il sépara
la lumière des ténèbres". D.ieu vit que les méchants
ne mériteraient pas de profiter de cette lumière et il la mit
en réserve pour les Justes dans les temps à venir. Cette lumière
n'est-elle pas la "lumière de la Torah" qui est la loi de notre
Univers créé et qui permet à l'homme de percevoir tous
les phénomènes matériels et spirituels de la Création?
Le Zohar ("la Splendeur",
ou livre de la mystique), s'appuyant sur le verset des Proverbes 20, 27: "L'âme
de l'homme est le flambeau de D.ieu et scrute l'intérieur des entrailles",
affirme que l'âme d'Israël est justement taillée dans cette
lumière.
"Le sixième
jour, D.ieu dit: Faisons l'homme à notre image, à notre ressemblance,
et qu'il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les
animaux, sur toute la terre et sur les êtres qui s'y meuvent."
Si la Création pouvait être comparée à une pyramide,
l'homme se trouverait placé à son sommet, aussi bien sur le plan
de son corps que sur celui de son esprit. Adam se distingue de tous les autres
vivants. Pour sa création, le terme biblique employé est écrit
avec deux youd (pour les animaux le même mot est écrit avec
un seul youd). II s'agit pour lui d'une double création : une
pour ce monde et une pour l'ère de la résurrection.
"Poussière
de la terre, il le créa . . . " D.ieu a ramassé, pour
former le corps d'Adam, de la poussière de toute la terre, des quatre
points cardinaux, de telle sorte que là où l'homme viendra à
mourir, la terre acceptera d'être sa tombe. Autre explication: c'était
la poussière prise de l'endroit dont il est dit: "Tu me feras
un autel de terre" (Exode 20, 24). D.ieu s'était dit: puisse-t-elle
lui servir d'expiation afin qu'il puisse subsister (Rachi).
"II insuffla dans
ses narines une âme de vie et Adam devint une âme vivante".
Impérativement, D.ieu a formé Adam d'éléments d'ici-bas
et d'éléments d'en haut. Le corps, d'en bas; l'âme, d'en
haut. Car le premier jour avaient été créés le ciel
et la terre. Le second jour, D.ieu créa un espace au milieu des eaux
d'en haut. Le troisième jour, il dit que la terre ferme apparaisse, en
bas. Le quatrième jour, il créa les luminaires, en haut. Le cinquième
jour, il dit que les eaux pullulent, en bas. II fallait bien, le sixième
jour, achever avec le monde d'en haut et avec le monde d'en bas. Sinon il y
aurait eu un déséquilibre dans l'œuvre de la Création,
l'un des deux éléments aurait dépassé l'autre d'une
journée de création.
L'homme est ainsi le trait
d'union entre le monde d'en bas et celui d'en haut. II est facteur d'équilibre
et d'harmonie. Son âme est la plus vivante de toutes car elle est d'essence
divine et elle a, en plus, la parole, témoin de l'intelligence et témoin
aussi de la possibilité qu'aura Adam de communiquer avec toute la nature
qui l'entoure et plus tard avec ses semblables.
LA FAUTE D'ADAM, UNE
RUPTURE D'EQUILIBRE
La véritable faute d'Adam est d'avoir séparé la spiritualité (le fruit qu'il mangera) du concret (l'arbre ou "l'écorce" qu'il ignore). Il est incapable de concevoir l'unité du monde.
En fait, le texte nous dit:
"Adam était devenu une âme vivante", c'est-à-dire
que lui-même était devenu l'âme vivante d'une quantité
innombrable de mondes. Car de la même manière que tous les gestes
et tous les mouvements du corps sont sous la dépendance de la force de
l'âme, qui est imperceptible, à l'intérieur de chaque homme,
de cette même façon l'homme est lui-même la force et l'âme
vivante de mondes supérieurs et inférieurs qui sont tous sous
sa dépendance directe. Sa responsabilité se trouve agrandie ainsi
et ramenée à une dimension cosmique (néfèche
ha'hayime). Celui qui touchera à sa vie, touche à l'image
divine et ébranle toute la Création.
La création de l'homme
répond à un acte d'amour de D.ieu "qui se donne un autre
à aimer" ou bien elle répond à un acte de liberté
de D.ieu (qui n'est en rien arbitraire). D'ailleurs, amour et liberté
sont indissociables dans la création, comme le montre le texte de la
Genèse: au premier chapitre, D.ieu est désigné par le nom
biblique Elokim, attribut de rigueur, auquel s'ajoute, dés le
second chapitre, le nom A-donaï, attribut d'indulgence (2, 4 et
7).
C'est D.ieu lui-même
qui insuffla à Adam son âme. C'est cette âme qui fait sa
force et lui donne une aptitude à connaître tout l'Univers. II
relève de la nature matérielle et des sphères célestes
faites d'esprit et de raison purs. Le tout est uni en lui dans une parfaite
harmonie. Et son rôle sera de ne pas rompre cet équilibre, en sacrifiant
un élément pour l'autre.
C'est pour cela que D.ieu
lui donnera une mitsvah, une seule, afin qu'il n'oublie pas son Maître-Créateur
et qu'il est fait justement de l'union du corps et de l'esprit. Cette mitsvah,
pratiquée, est un acte matériel-spirituel " qui scelle
l'unité esprit-matière ". Hélas, cette situation
n'aura pas duré, Adam s'est vite oublié. Il veut rester dans le
Jardin d'Eden de pur intellect où seule est réelle l'œuvre
de la pensée. Il imagine " que la nature entière n'existe
en fait que dans la pensée humaine ".
Et il va si loin dans son
raisonnement qu' "il en vient à scier la branche même de l'arbre
sur laquelle il est assis" ! Il renie la nature. La véritable faute
d'Adam est d'avoir séparé la spiritualité (le fruit qu'il
mangera) du concret (l'arbre ou "l'écorce" qu'il ignore). Il
est incapable de concevoir l'unité du monde. Il sera chassé du
Jardin d'Eden, envoyé en exil, pour apprendre à faire la jonction
entre sa vision spirituelle et la réalité, travailler et comprendre
la terre, cette fois et pas seulement la Torah spirituelle.
ENTRE LA VIE DANS CE
MONDE ET LA VIE DU MONDE A VENIR ...
Le monde présent ressemble à une antichambre devant le monde futur. Prépare-toi dans l'antichambre pour que tu entres dans le palais.
L'homme a deux vies séparées
par un jugement. II est libre et responsable. II doit avoir eu, ici-bas, une
vie morale irréprochable pour mériter le "monde à
venir".
Rabbi Yàacov dit
(Pirké Avott 4, 1617): "Le monde présent ressemble à
une antichambre devant le monde futur. Prépare-toi dans l'antichambre
pour que tu entres dans le palais". II ajoutait: "Mieux vaut
une heure employée à la techouva (repentir) et aux bonnes actions
dans ce monde 'que toute la vie du monde futur. Et pourtant une heure de béatitude
dans le monde futur vaut plus que toute la vie du monde présent".
Rabbi Yaacov reprend là
un verset bien connu du Deutéronome (7, 11): "Et tu observeras
la loi, les décrets et les règles que je t'ordonne de faire, aujourd'hui".
Aujourd'hui, pour les faire et pas demain, aujourd'hui pour les faire, mais
pas aujourd'hui pour en recevoir la récompense (Eirouvine 22a).
Car "De récompense à la mitsva dans ce monde il n'y en
a pas "(Kiddouchine 40b). Elle est réservée pour
le monde futur.
Et d'ailleurs comment pourrait-il
en être autrement sans porter atteinte à la règle absolue
du libre-arbitre de l'homme? Quand nous vivons dans le bien-être matériel,
ayant la paix et la sécurité, la santé et la richesse (des
fois la situation inverse est aussi apte) c'est pour pouvoir servir D.ieu, étudier
la Torah et mieux l'approfondir, hors des soucis matériels. II ne s'agit
pas d'une récompense à notre conduite. II est d'ailleurs fréquent
que, sur le plan matériel, "le juste soit dans une mauvaise situation
et que le méchant réussisse". Ce monde matériel
dans lequel nous vivons notre expérience humaine, nous y sommes accrochés
par instinct et attachés par tant de liens: la volonté de conquêtes
politique, sociale, religieuse, intellectuelle. II n'est que l'antichambre,
le portique par lequel on entre dans le palais du Roi.
Dans l'antichambre, il arrive
fréquemment que les ambitieux, les riches, les gens sans scrupules réussissent
à occuper les meilleures places. Mais lorsque l'orgueilleux arrivera
au jugement devant le Roi, son Créateur, tout le décor extérieur
ne lui servira à rien. Le Juge ne regarde pas les parures, "il
scrute l'intérieur des entrailles". C'est la Torah qu'il a étudiée,
les mitsvot qu'il a accomplies vis à vis de son prochain et vis à
vis de D.ieu, qui seront ses vrais intercesseurs auprès de l'Eternel.
Et ce travail, car il s'agit bien d'un véritable travail, il ne peut
le faire qu'ici-bas.
UNE HEURE DE VIE ....
ET TOUTE UNE VIE
Il y a deux façons
d'acquérir dans ce monde la vie du monde futur : la façon habituelle
de l'expérience continue qui s'étend sur toute la vie. Et la façon
brutale de l'acquisition instantanée par la techouva. II s'agit
alors d'un instant décisif dans la vie d'un homme ou d'une femme
C'est pourquoi, pour nous,
juifs, même une heure de vie compte. Le Talmud en donne plusieurs illustrations.
Le cas de Rabbi Eléazar ben Dordeya est le plus typique. Au moment de
faire techouva, il a appelé à son secours, sans résultat,
les montagnes et les collines, puis, plus haut, le ciel et la terre, et enfin,
plus haut encore, le soleil et la lune. Finalement il comprit que la techouva
ne dépendait que de lui-même. Les astres ne pouvaient rien y changer.
Et il pleura jusqu'à ce que son âme l'eût quitté.
La Voix du ciel proclama alors: Rabbi Eléazar ben Dordeya est prêt
pour la vie du monde futur!
Publié par le département de l'Education et de la Culture par la Torah dans la diaspora de l'Organisation Sioniste Mondiale, Jérusalem, B.P. 92, 1982