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Quelques principes à intégrer dans les codes éthiques des entreprises

Quelle peut être la contribution de la Tradition juive à l'élaboration de codes de déontologie au sein des entreprises?
Il est devenu de pratique courante dans beaucoup de pays que des sociétés élaborent un code de déontologie à l'intention de leurs cadres et de leurs employés.
Un PDG a prétendu que cette codification était de pure perte puisque " les sociétés qui s'appuyent sur une base morale solide n'en ont pas besoin, et que pour les autres c'est comme un cautère sur une jambe de bois ! " On peut remarquer, à l'appui de cette opinion, que la confection de tels codes n'a pas empêché les récents scandales liés à la délinquance " en cols blancs ".
Cependant, la confection même de tels codes est en elle-même d'une grande importance du point de vue éthique et éducatif.
Elle traduit en une réalité le principe selon lequel un comportement moral ne doit pas être laissé simplement à la conscience de l'individu. Cela correspond à un enseignement transmis par la tradition juive selon lequel, si la conscience et la connaissance morale sont essentielles, elles ne sont pas suffisantes, à elles seules, à créer un système éthique. Cela nécessite un cadre législatif qui puisse encadrer les codes éthiques. Tous ceux que cela concerne ont une perception claire de ce qui peut ou ne peut pas être fait, et cette connaissance, même si elle ne supprime la malhonnêteté, au moins la réduit.
Aucun code éthique institué par une société ne peut fonctionner quand la politique de la direction cherche à trouver des échappatoires légales aux exigences des autorités de surveillance et des services fiscaux.

Malgré les progrès réalisés en cette matière, on trouve une tendance à différencier, dans les codes éthiques de déontologie, ce qui est exigé des dirigeants et ce qui est demandé aux employés. Il est difficile aux simples salariés de révéler les défauts qu'ils ont constatés dans les marchandises ou les services offerts par leur société, alors qu'ils sont soumis à des pressions constantes exercées par les directions pour qu'ils réalisent des ventes à tout prix. Les codes qui encouragent les " coups de sifflet " doivent, en toute loyauté, assurer la protection de ceux qui les donnent, protection à la fois financière, morale et pour la sécurité de leur emploi.

Aucun code éthique institué par une société ne peut fonctionner quand la politique de la direction cherche à trouver des échappatoires légales aux exigences des autorités de surveillance et des services fiscaux. De même que les codes en appellent à l'honnêteté et à la conscience individuelles, de même attendent-ils des dirigeants des entreprises qu'ils comprennent que le respect de la loi n'est pas suffisant.
 

LE CONSENSUS éTHIQUE AU SEIN DE L'ENVIRONNEMENT SOCIO-CULTUREL

On ne fait pas des affaires dans le vide spirituel. Le comportement moral et éthique tant des employés que des chefs d'entreprise subit une puissante influence de l'environnement culturel, religieux et politique qui les entoure. Cette atmosphère influe sur le comportement bien plus que les sermons moraux et les principes de la société, et il n'est pas possible de les ignorer quand on veut essayer d'introduire un meilleur climat moral dans les affaires.

Dans des pays socialistes et communistes, on a mis en œuvre des politiques qui allaient à l'encontre de la nature humaine et de la logique économique. Ces politiques ont créé un environnement dans lequel la fraude et la corruption sont devenues monnaie courante. Les quotas irréalistes imposés aux usines de l'U.R.S.S. par les planificateurs centraux, et appelés à remplacer les mécanismes du marché ont entraîné, pour pouvoir être atteints, la généralisation des faux comptes-rendus et un contrôle frauduleux de la qualité.

L'égalitarisme en matière de salaires en Israël a créé une structure des rémunérations où l'on a introduit les notions de participation aux bénéfices et de primes prétendument liées à de travaux supplémentaires, ce qui a entraîné une généralisation des fausses comptabilités. Les subventions et autres mesures protectrices conduisent au gaspillage, mais aussi à des moyens malhonnêtes pour les obtenir, comme dans l'agriculture des pays de l'Union européenne.

L'environnement socioculturel influe sur la politique des patrons et des employés en matière d'éthique.

Les obligations sociales des sociétés sont elles aussi fonction de l'environnement moral. Le Japon et les Etats-Unis offrent à ce sujet une vision fortement contrastée et présentent de bons exemples des effets produits sur l'économie par des environnements moraux différents. L'accent mis dans tous les domaines sur les mérites de la concurrence, sur l'individualisme et sur la méfiance à l'égard du gouvernement central ont conduit aux Etats-Unis à une constante diminution de filets protecteurs de l'économie, de la sécurité de l'emploi et à un manque de loyauté des salariés.

Le Japon, avec sa structure industrielle féodale, une population ethniquement homogène et une société réunie autour d'un consensus, a mis vigoureusement l'accent sur la sécurité de l'emploi, la protection de l'économie et l'identification des employés au bien-être de l'employeur.

Les économistes ont attribué à la fois l'efficacité et les coûts de revient dans ces deux pays à ces différences culturelles. Indépendamment de cela, il est clair que le comportement éthique des employeurs en ce qui concerne les décisions de licencier des ouvriers, la responsabilité de l'entreprise envers son personnel âgé ou surabondant seront largement fonction de cet environnement socioculturel.
 

L'EXPERIENCE JUIVE

L'Etat d'Israël a adopté des politiques économiques et sociales qui, malgré leur vernis séculier et socialiste, possèdent de profondes racines morales juives.

Puisque le judaïsme possède un système éducatif et un cadre législatif largement orientés sur les règles morales, très différents de ce que l'on trouve dans d'autres cultures religieuses, on peut s'attendre à ce que ses principes éthiques aient produit des modèles de comportement spécifiquement juifs.

Au Moyen-Âge, alors que l'Europe était traversée par le chaos politique et l'insécurité, les Juifs ont été capables de s'engager dans le commerce et la finance à une échelle qui dépassait celle de leurs voisins chrétiens. Leur réussite est à attribuer non seulement à leur état de minorité persécutée, mais surtout à une culture morale commune qui débordait sur les frontières politiques et géographiques. Un système légal commun, une langue commune et une culture commune découlant du judaïsme, voilà ce qui a rendu cela possible.

Leurs négociants venus de tous les pays d'Europe, du Moyen-Orient et de l'Extrême-Orient pouvaient compter sur des tribunaux rabbiniques appliquant une loi commune dans leurs relations avec d'autres Juifs dans toutes ces régions. Les Juifs pouvaient voyager avec des " passeports " émis par leurs communautés et attestant qu'ils étaient des citoyens de bon aloi, méritant qu'on leur procure hospitalité, informations et facilités commerciales. Les fonds pouvaient être transférés aisément et en toute sécurité malgré les dangers physiques courus par ceux qui traversaient le chaos de l'Europe médiévale, et ce au moyen d'instruments financiers sur lesquels on pouvait compter même entre négociants vivant dans des pays et des continents différents et occupés à des activités commerciales distinctes. Ce n'est que tout récemment que le monde a établi un modèle éthique culturel identique à celui qui existait depuis des siècles dans la vie juive.

L'Etat d'Israël a adopté des politiques économiques et sociales qui, malgré leur vernis séculier et socialiste, possèdent de profondes racines morales juives. Il est presque impossible, bien sûr, de déterminer en quoi ces politiques sont les produits de valeurs spécifiquement juives et en quoi elles ont été empruntées à Tolstoï ou à Marx.

Il peut être néanmoins démontré que les politiques de plein emploi, les prélèvements fiscaux destinés à satisfaire les besoins des pauvres, et les concepts de sécurité de l'emploi constituent autant de reflets de la justice sociale et du sens de la responsabilité mutuelle inhérents au judaïsme. L'intégration des immigrants sur une échelle sans précédent par rapport à la population d'accueil a toujours été une préoccupation essentielle dans la politique économique israélienne, malgré le lourd fardeau des prélèvements fiscaux nécessités par l'élaboration d'infrastructures, de moyens éducatifs et de bien-être. L'appréhension devant le coût moral du chômage a conduit en 1985 au rejet du chômage massif comme un moyen de réduire l'inflation, contrairement à ce qui s'est passé aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Europe occidentale. Les subventions accordées au crédit, malgré toutes les distorsions économiques qu'elles entraînent, ont représenté un facteur majeur dans la politique monétaire et bancaire.

Toutes ces politiques représentent des mises en application de concepts juifs de charité qui mettent l'accent sur la responsabilité collective, les impositions fiscales, la création de postes de travail et les prêts sans intérêt pour favoriser les activités des entreprises.

Mais en même temps, le défaut de symétrie avec d'autres aspects de la morale juive a conduit à une répétition en Israël de beaucoup de pratiques contraires à l'éthique en honneur dans d'autres sociétés socialistes.

 

Traduction et adaptation de Jacques KOHN


A PROPOS DE L'AUTEUR
le Dr Meir TAMARI
Le Dr Meir Tamari a été directeur du service " Economie " du Bureau du Gouverneur de la Banque d’Israël, et fondateur du JCT [Centre pour l’éthique dans les affaires et pour la responsabilité sociale]
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