L’âme humaine est une entité complexe divisée en plusieurs parties importantes. Nous consacrerons ce deuxième article sur l’âme à l’étude de sa composition et au moyen de nous connecter à ses différentes parties.
Afin de comprendre la structure de l’âme, il nous faut commencer par décrire comment la réalité elle-même est structurée.
Nous vivons dans un univers entièrement créé. Cela signifie que D.ieu a créé l’univers ex nihilo. Lorsque D.ieu a entrepris le processus de la création, il n’y avait ni espace ni temps, ni matière ni énergie (autre que celle de D.ieu, cela va sans dire). Il ne put façonner l’univers à partir de matériaux préexistants.
Par conséquent, c’est la pure énergie divine, seule « substance » alors disponible pour D.ieu, qui constitue réellement l’univers. Ceci est un point fondamental qu’il nous faut établir et, malgré les apparences, un de ceux dont les implications ne sont pas si évidentes.
L’INERTIE DANS UN UNIVERS CREE
Lorsque je regarde un des arbres plantés dans mon jardin, et que quelqu’un me demande si je m’attends à ce qu’il soit encore là demain, je réponds par l’affirmative. L’arbre est matériel et par suite possède de l’inertie. A moins que quelqu’un n’exerce sur lui une grande force, l’arbre restera où il se trouve indéfiniment simplement parce qu’il est là maintenant.
A bien considérer, cette perception s’avère n’être qu’illusion. Dans un univers créé de toutes pièces, l’arbre n’a aucune réalité substantielle et est en fait constitué de pure Energie divine. L’arbre que je vois dans mon jardin n’est là que parce que D.ieu veut son existence. Donc, Il doit continuer à vouloir qu’il existe afin qu’il demeure là. L’inertie est une propriété des choses mais non pas de la volonté.
Pourquoi la reconnaissance de cette facette de la réalité aide-t-elle à appréhender ce qu’est l’âme ? Afin de clarifier ce problème, il nous faut poser un certain nombre de questions supplémentaires. Si chaque chose dans le monde est composée d’Energie divine, cela ne signifie-t-il pas que nous sommes tous D.ieu ? Et qui plus est, puisque toute chose est constituée de la même substance, comment se fait-il que les objets soient si variés et si complexes ? Enfin, du fait que l’Energie divine est manifestement spirituelle, comment une partie de la réalité peut-elle être physique ?
Les sources kabbalistiques en donnent la réponse. Les différences dans les niveaux de réalité sont attribuées à deux facteurs : des voiles qui obscurcissent les origines divines de l’être et la distance par rapport à la source suprême. Parce que l’âme est une partie de la réalité, elle est influencée par ces facteurs comme l’est le reste de la création.
LE NIVEAU D’ATSILOUT
Dès qu’on commence à s’éloigner de la Source, le premier niveau de réalité qui nous est accessible est appelé par les Kabbalistes Atsilout, « émanation » en français. On désigne par le mot « émanation » le premier niveau de réalité accessible afin de souligner l’idée qu’il est impossible de fournir une description positive de l’essence divine même dans des termes kabbalistiques. Même le niveau d’Atsilout, de loin le plus haut niveau de réalité dont la Kabbala est apte à nous donner quelque notion, est purement une émanation correspondant à l’idée de D.ieu tel qu’Il est pour Lui-même.
D.ieu ordonnance le chef-d’œuvre de la création dans Son propre être en vue de lancer l’opération de réalisation.
Dans l’ Atsilout, la création ne s’est pas encore séparée de D.ieu mais D.ieu a déjà organisé l’Energie divine qu’Il a l’intention d’investir dans la création, au sein de Son propre être, si l’on peut dire. On pourrait comparer cela à un grand peintre inspiré par une nouvelle idée pour réaliser un chef-d’œuvre. Pour le reste du monde, la peinture qui se trouve dans l’esprit de l’artiste n’existe pas encore. Personne ne peut la percevoir ou y accéder. Elle fait partie de la réalité qui se trouve à l’intérieur du peintre.
Mais pour l’artiste lui-même, le tableau est déjà une réalité distincte. Son imagination le lui fait envisager clairement et il le regarde déjà comme quelque chose de séparé, une vision dont il nourrira son talent et son énergie artistiques quand il procédera à son exécution. D.ieu ordonnance le chef-d’œuvre de la création dans Son propre être en vue de lancer l’opération de réalisation.
L’HOMME EST PRESENT AU PLUS HAUT NIVEAU
Cette énergie de création est organisée en deux paquets dans l’Atsilout ; c’est l’énergie divine qui sera déversée dans la création de l’homme et c’est l’énergie qui façonnera le reste de l’univers. Il est nécessaire de franchir une nouvelle étape essentielle pour inclure la notion de l’âme dans ce qui vient d’être dit. Qu’est-ce qui nous fait penser que l’homme fit son apparition au tout début de la création ? La Torah ne décrit-elle pas l’homme comme étant la toute dernière créature à paraître dans le panthéon divin ?
Les apparences peuvent être trompeuses. Selon la Torah, le but de l’univers tout entier est de fournir un espace de vie et de travail à l’homme. Il est inconcevable de mettre de côté l’énergie divine servant à créer toute chose tant que toute l’énergie requise pour créer l’homme n’est pas complètement structurée. Tant que le projet humain n’est pas élaboré, le cadre nécessaire à ses besoins n’est pas envisagé.
Que l’homme soit apparu en dernier est dû au fait que le monde dans lequel il fut inséré a été modelé autour de ses besoins une fois seulement que tout fut conçu et préparé. Mais il est évident que l’homme existait déjà au stade de la conception car sinon il n’y aurait eu aucun moyen de connaître ses besoins.
A ce niveau d’Atsilout, c’est en tant que Knesset Israël, littéralement Assemblée d’Israël, que l’homme est connu. Il existe dans l’esprit de D.ieu tout comme une assemblée, un individu composite qui contient dans son être le potentiel spirituel de toute l’humanité jusqu’à la fin des temps emballé dans un seul paquet.
Cet homme de l’Atsilout possède déjà 248 membres spirituels et 365 articulations spirituelles. Il est le distillat ultime de l’humanité et, par conséquent, détient l’équivalent spirituel de la forme humaine.
LE NIVEAU DE BRIAH
L’étape suivante est celle du déploiement de la création. L’énergie divine se sépare de D.ieu comme une entité indépendante/séparée au moyen de la descente du premier rideau obscurcissant. Le monde situé au-delà du rideau est connu comme celui de Briah, « création » en français. Pour ce qui concerne les matières spirituelles, la langue hébraïque est très précise ; Briah signifie création à partir de rien (ex nihilo dans le langage théologique). La séparation de Briah est décrite dans la Genèse comme se faisant au moyen du langage : D.ieu dit, ‘Qu’il y ait’ dix fois lors de la réalisation du monde de Briah.
Pour que cette idée soit compréhensible à notre niveau, comparons la manière dont nous communiquons avec notre main et celle avec laquelle nous communiquerions avec la main d’un robot entièrement sous notre contrôle.
Quand on soulève la main, il n’est nul besoin de parler. On sait que, scientifiquement, le cerveau transmet un signal aux muscles leur enjoignant d’accomplir l’action désirée et cela engendre vraiment une forme de communication ; néanmoins rien qui puisse être assimilé à la parole n’est nécessaire. Les choses sont très différentes lorsqu’il s’agit d’élever la main du robot. Par définition, celui-ci est obligé de faire tout ce qu’on lui ordonne mais il est incapable d’obéir avant qu’on ne lui ait dit. On doit utiliser la parole ou toute forme équivalente de communication afin de faire lever la main du robot.
L’HOMME ET LE MONDE DE BRIAH
A ce niveau, l’homme n’a aucune inclination au mal ou n’en possède aucun aspect et n’a pas de libre arbitre.
L’action consistant à séparer l’énergie divine de ses origines est décrite comme étant celle de la parole. Le rideau qui provoque le premier niveau de séparation est connu sous le nom de Briah. Dans le monde de Briah, l’homme est appelé Néchama, l’âme. L’homme composite de Knesset Israël s’est déjà cristallisé en une forme individuelle ; en fait, il reste une entité mâle et femelle. Ses deux parties, mâle et femelle, ne sont pas fondues en éléments qu’on peut identifier séparément. Ainsi D.ieu créa (vayivrah du mot barah) l’Homme à Son image, à l’image de D.ieu Il le créa ; mâle et femelle Il les créa (Genèse 1,27).
A partir du niveau de Briah et au-delà, l’homme existe en tant qu’individu. Du fait que ce niveau n’est que de l’autre côté du rideau d’Atsilout, l’être humain de Briah est conscient qu’il vient seulement de se séparer de Knesset Israël, de l’être humain collectif dont l’énergie fait encore partie de D.ieu. L’homme comme Néchama est totalement conscient de ses origines divines et ne peut s’imaginer ni exister sans D.ieu ni exister séparément de son élément mâle ou femelle. A ce niveau, l’homme n’a aucune inclination au mal ou n’en possède aucun aspect et n’a pas de libre arbitre.
YETSIRAH ET SON HABITANT HUMAIN
Alors que l’énergie divine continue à s’écouler de la source, un deuxième rideau descend. La réalité qui se situe à l’extérieur de ce rideau est désignée comme le monde de Yetsirah, « Pensée créatrice » ; l’homme existe dans ce monde en tant que Roua’h, un pur esprit. C’est à ce niveau qu’il est séparé en sexes différents et il prend contact avec le monde de son corps, bien que le corps lui-même n’existe pas dans le Yetsirah ; celui-ci se trouve de l’autre côté du rideau suivant, là où le flot sortant de l’énergie divine prend une forme matérielle. Et D.ieu YHVH forma (Vayitser du mon Yetsirah) l’homme de la poussière de la terre et Il insuffla dans ses narines l’âme (Nichmat du mot Néchama) de vie et l’homme devint un être vivant (Genèse 2,7).
Le monde de Yetsirah est celui de la pensée. Tous les êtres humains en sont aptes. La pensée mène à un aspect inédit de la réalité car penser, c’est déjà une affaire de choix. Molière avait la capacité de penser et de créer ses magnifiques pièces de théâtre au moyen de sa pensée. Probablement il aurait pu en écrire un plus grand nombre s’il l’avait décidé. Il aurait pu aussi choisir de ne pas en écrire du tout. Les pensées font partie de la nature mais non pas du monde de la cause et de l’effet. Il y a toujours un choix de penser ou de ne pas penser. Il y a ensuite une décision de communiquer ses pensées. Nous le verrons en détails quand nous examinerons le prochain niveau de réalité mais rien ne nous empêche dès à présent d’affirmer que le libre arbitre commence dans Yetsirah.
ASSYAH, NOTRE PROPRE MONDE ET LE MOI QUI NOUS EST FAMILIER
Alors que l’écoulement de l’énergie divine se poursuit, le dernier rideau tombe. Le monde qui se trouve de l’autre côté de ce rideau est appelé le monde de Assyah, qui veut dire « action achevée ». C’est le monde dont nous avons vraiment conscience d’habiter. L’homme y est une Néfech, une force vitale ou un esprit énergétique ; il possède également un corps.
C’est ici que les choses commencent à devenir plus complexes. La Néfech qui est un prolongement du Roua’h est aussi spirituelle que le reste de l’âme humaine dont elle dérive. C’est la partie la plus extrême de la Néchama humaine. Le corps de l’homme, d’autre part, est purement matériel et non-spirituel. Il ne peut y avoir de liaison directe entre le corps et l’esprit. Des entités qui sont diamétralement opposées sont incapables de s’assembler l’une à l’autre de manière permanente. L’union du corps et du pur esprit est analogue à celle du feu et de l’eau.
LE MARIAGE FORCE ENTRE DEUX CONTRAIRES
Afin de résoudre ce problème, il fut aussi donné à l’homme une seconde Néfech en vue de servir d’intermédiaire entre son corps et la Néfech qui est la vue externe de sa Néchama. Cette seconde Néfech est appelée la Néfech habéhémit ou la Néfech animale ; c’est ce que nous connaissons comme étant la force vitale.
C’est cette Néfech animée qui, d’après la Torah, est liée au sang. « Quiconque aussi, dans la maison d ‘Israël ou parmi les étrangers résidant avec eux, mangera de quelque sang, je dirigerai mon regard sur l’âme (Néfech) qui aurait mangé de ce sang et je la retrancherai du milieu de mon peuple . Car l’âme (Néfech) gît dans ce sang et moi je vous l’ai accordé sur l’autel pour procurer l’expiation à vos âmes (Néfachot pluriel de Néfech) car c’est sur le sang qui fait l’expiation sur l’âme (Néfech) » (Le Lévitique 17, 10-11)
La partie de la Néfech qui est liée au Roua’h est appelée la Néfech élokit (la Néfech divine). Elle est enveloppée dans la Néfech habéhémit, la force vitale qui actionne le corps. C’est par l’entremise de l’enveloppe de la Néfech habéhémit que la Néfech élokit s’unit au corps.
Tout comme en physique où la dynamique est la partie la plus fascinante de la réalité, la dynamique représente l’aspect le plus subjuguant de l’âme.
Cela signifie que l’homme se trouve à l’état de conflit existentiel continuel dans le monde de Assyah. Deux Néfachot habitent son corps et toutes deux sont intelligentes. La Néfech habéhémit est néanmoins quelque peu spirituelle sinon elle ne pourrait jamais servir d’intermédiaire entre le corps et la Néfech élokit. Au même moment, du fait que la Néfech habéhémit est directement rattachée au monde physique du corps et qu’elle est la force vitale qui stimule ce corps, elle a tendance à exécuter une tâche supérieure et à lui fournir des sensations ultimes de plaisir physique qui lui procurent le sentiment d’être en vie. La Néfech élokit qui est enveloppée dans cette Néfech habéhémit bien que purement spirituelle et reliée au Roua’h dans Yetsira et au moyen du Roua’h à la Néchama et ce qui se trouve au-dessus, cherche constamment à extraire du corps tout l’organisme de l’homme et à le tirer vers la Néchama.
Ceci décrit, tout au moins dans une certaine mesure, ce à quoi notre âme ressemble, et explique le mécanisme la reliant à notre corps. Par analogie avec la physique, cet article pourrait s’intituler la mécanique de l’âme. Tout comme en physique où la dynamique est la partie la plus fascinante de la réalité, la dynamique représente l’aspect le plus subjuguant de l’âme. La mécanique décrit la structure. La dynamique est l’étude des forces et les possibilités générées par la structure. Dans
les prochains articles, nous verrons les conséquences de cette mécanique et tenterons d’expliquer comment nous fonctionnons de manière dynamique en tant qu’âmes.
Traduction : Claude Krasetzki