"Dayénou" - Pour cette raison, nous devons être encore plus reconnaissants envers D.ieu de tous les nombreux bienfaits qu’Il nous a accordés. Il nous a fait sortir d’Egypte, Il a exercé Sa justice sur les Egyptiens et sur leurs dieux. Il a tué leurs premiers-nés. Il nous a fait don de leurs richesses. Il a partagé la mer en notre faveur, nous l’a fait traverser sur une terre sèche, puis y a noyé nos oppresseurs. Il a subvenu à nos besoins dans le désert durant 40 ans et nous a nourris de la Manne. Il nous a donné le Chabbat, nous a conduits au Mont Sinaï et nous a donné la Torah. Il nous a emmenés sur la Terre d’Israël et a construit pour nous le Temple afin d’expier toutes nos fautes. (Haggadah de Pessa’h)
Pour démontrer toutes les conséquences positives d’avoir choisi D.ieu, la Haggadah dresse la liste de tous les bienfaits dont Il a comblé le peuple juif à travers son histoire.
"Dayénou" comprend 15 couplets, 15 aspects, 15 dons. Les cinq premiers couplets concernent le fait d’avoir quitté la condition modeste de l’asservissement de notre corps. La deuxième série de cinq versets décrit des miracles -- i.e. comment D.ieu modifie la nature. Et les cinq derniers parlent de la proximité avec D.ieu.
CINQ COUPLETS SUR NOTRE LIBÉRATION DE L’ESCLAVAGE
1) "S’Il nous avait fait sortir d’Égypte."
Le fait de quitter l’Égypte nous élève à la prise de conscience de notre âme. Pour de nombreuses personnes, atteindre ce moment de transcendance constitue la plus grande expérience de leur existence. Ils n’hésiteraient pas à passer leur vie à parcourir le monde entier pour vivre cela. Songez un instant à ce que vous ressentez lorsque vous êtes amoureux, ou lorsque vous vous tenez au sommet d’une montagne et que, tout à coup, vous percevez la beauté qui réside en toute chose. En ces moments, vous savez que vous êtes une âme. Vous venez juste de quitter l’Egypte. C’est fantastique, n’est-ce pas ? Cela aurait suffi.
2) "S’Il avait exercé Sa justice sur les Egyptiens."
La justice signifie qu’une fois que vous avez une vision claire de la situation et que vous savez faire la distinction entre le bien et le mal, vous pouvez combattre celui-ci. Il est formidable de voir une méchante personne, comme une brute ou un exploiteur, coupée dans son élan. Nous nous sentons transportés lorsque quelqu’un se dresse devant eux avec un sens moral. Les gens payent pour voir des films où le "bien" triomphe du "mal". Dans un monde si cynique, on a du mal à croire que le "bien" puisse l’emporter, mais tout le monde meurt d’envie d’assister à cette victoire. Et si vous le méritez, vous en êtes témoin dans la réalité. Cela aurait suffi.
3) "S’Il avait exercé Sa justice sur leurs dieux."
Cette phrase fait allusion au fait que certaines personnes qui adhèrent à des idéologies prônant l’égoïsme et la cupidité et qui semblent prospères et heureuses voient, par la suite, le mensonge de leurs dieux, exposé aux yeux de tous. Lorsque vous êtes témoins de ce type d’événement, votre sens intuitif des valeurs est rétabli. Ce qui est bien est bien et ce qui est mal est mal. Cela aurait suffi.
4) "S’Il avait tué leurs premiers-nés."
Nous atteignons un niveau supérieur de satisfaction lorsque "les premiers-nés " - les despotes - reçoivent ce qu’ils méritent. Bien entendu, nous préférerions que des êtres humains corrigent leur manière d’agir et qu’ils évitent ainsi le châtiment. Mais si l’on ne peut les changer, ce qu’il y a de mieux à espérer est de les voir tués. Croyez-le, lorsque Hitler est mort, les gens étaient très heureux. Le monde entier poussa un soupir de soulagement. C’est encore plus fort que de simplement mieux comprendre la situation ou de voir une idéologie erronée détruite. Là, vous êtes témoins du fait que le pouvoir de ces cruels exploiteurs est réduit en miettes. Cela aurait suffi.
5) "S’Il nous avait donné leurs richesses."
Lorsque nous nous soumettons à notre corps, nous n’obtenons pas réellement de plaisir physique. Parce que nous ne sommes jamais rassasiés ou satisfaits. Par exemple, une relation sexuelle sans amour n’est finalement pas très agréable. Et l’argent, connaît-il des limites ?
Mais lorsque nous affinons notre âme, nous obtenons le plaisir physique également. Nous pouvons l’atteindre, dans une juste mesure et sous contrôle. Nous pouvons apprécier la nourriture et les relations intimes et avoir le sentiment que ce que nous faisons est juste. Pour cela, il nous faut diriger la pulsion animale qui est en nous et nous en aurons les bénéfices. C’est ce que signifie la phrase : "ils acquirent la richesse des Égyptiens ". Au moment où les Juifs quittèrent l’Égypte, ils devinrent une âme. Et cela aurait suffi.
CINQ COUPLETS SUR LES MIRACLES
6) "S’Il avait partagé la mer en notre faveur."
Avez-vous jamais vu le monde s’ouvrir pour vous ? J’ai demandé à des groupes de personnes de nombreuses fois : "Combien d’entre vous ont-ils déjà vécu un miracle personnel ?" Presque tout le monde dans la pièce lève la main. Les gens ne croient pas aux miracles des autres, mais ils sont convaincus que "quelque chose m’est arrivé à moi, je ne peux pas l’expliquer, c’était stupéfiant." Un élève m’a dit que, de toute sa vie, il n’avait jamais attaché sa ceinture de sécurité. Cependant, un jour, alors qu’il montait dans sa voiture, il ressentit le très fort besoin de la mettre. Ce jour-là, sa voiture fut totalement détruite. Sans sa ceinture, il aurait indubitablement été tué. Un miracle.
Le partage de la mer est un miracle flagrant au cours duquel la nature subit une modification. Il est bien plus agréable de voir un miracle flagrant, juste sous nos yeux. La plupart d’entre nous n’ont jamais été témoins de ce niveau de miracle. Toutefois, à partir de ce que nous avons vu, nous pouvons déduire la possibilité de plus grands miracles encore.
Lorsque vous choisissez d’être une âme, le monde physique s’ouvre pour vous. La tension se relâche. Vous n’avez pas à combattre la nature comme nous sommes si habitués à le faire. Lorsque nous fûmes devant la mer, D.ieu nous délivra de cette contrainte. Cela aurait suffi.
7) "S’Il nous avait fait traverser sur une terre sèche."
Il ne s’agit pas là de simplement bénéficier d’un miracle, mais de l’obtenir dans la facilité. La route s’ouvre devant vous ; rien de plus facile. Elle vous mène là où vous voulez aller. En fait, vous n’êtes pas seulement témoin d’un miracle, vous passez à travers lui. La route et vous ne formez qu’un. Vous passez à travers la nature, jusque dans les bras du Tout Puissant. A l’intérieur du miracle. A l’intérieur d’Israël. A l’intérieur de l’âme. Cela aurait suffi.
8) "S’Il avait noyé nos oppresseurs."
Ce n’est pas seulement que la nature "n’est pas votre ennemie", mais elle a été complètement submergée et est, à présent, votre amie. Elle travaille et produit pour vous. De même que nous voulons tout donner à nos enfants, le Tout Puissant veut nous aider à "élever" la nature de sorte qu’elle se comporte avec nous comme avec un ami.
Lorsque les Juifs aperçurent les corps des Egyptiens noyés, ils réalisèrent que la nature n’avait plus de pouvoir sur eux. Pas simplement pour une ou deux semaines, mais de manière permanente. Ce fut une source de grand plaisir. En fait, le Midrach dit que les juifs étaient encore tendus et qu’ils n’y croyaient pas. Ils sont sortis de l’autre côté de la mer et les Egyptiens ont été noyés. Cependant, ils ont dit : "Peut-être vont-ils ressortir de l’eau, un peu plus loin en aval, et nous attaquer." Alors D.ieu acheva le travail : Il rejeta les cadavres sur la rive afin que les Juifs puissent s’assurer qu’ils étaient bien morts. A quel point nous sommes perdants lorsque nous avons toujours peur de subir, d’une manière ou d’une autre, une nouvelle défaite ! D.ieu a retiré ce sentiment d’insécurité. Cela aurait suffi.
9) "S’Il avait subvenu à nos besoins dans le désert durant 40 ans."
Imaginez que vous soyez lâché dans le désert du Sahara sans rien durant 40 ans. C’est la liberté, mais c’est dur. Durant 40 années, les Juifs eurent tout ce dont ils avaient besoin. Ils avaient un "puits transportable " qui leur fournissait de l’eau ; leurs vêtements ne s’usaient pas ; ils étaient automatiquement lavés. D.ieu prit soin d’eux afin qu’ils ne fussent pas obsédés ou distraits par des détails matériels. A la place, ils pouvaient se concentrer sur leur évolution spirituelle et l’étude de la Torah. Ils sentaient que le monde entier fonctionnait en fonction d’eux. Ils étaient entourés de nuées spirituelles qui leur donnaient l’impression d’être enveloppés par la présence de D.ieu. Imaginez cet instant où vous sortez marcher et que c’est le premier jour magnifique et chaud du printemps. "Ouah, ce monde est merveilleux !" Vous sentez la nature qui vous entoure dans toute sa beauté. C’est ce qu’ont ressenti les Juifs durant 40 ans dans le désert. Cela aurait suffi.
10) "S’Il nous avait nourris de la Manne."
Le fait de gagner sa vie est vraiment un miracle caché. Nous faisons des efforts, nous nous inquiétons et prions, puis, si nous réussissons ce que nous avons entrepris, nous pensons que c’est grâce à notre pouvoir et notre génie ! C’est bien de se dire que son génie y est pour quelque chose, mais, d’un autre côté, cette attitude conduit à l’arrogance.
Avec la Manne, les Juifs se réveillaient chaque matin et apercevaient une fine couche de nourriture qui couvrait le sable du désert. Ils ramassaient exactement ce dont ils avaient besoin pour la journée. Ils n’avaient pas besoin d’en placer sur un compte en banque. Ils savaient que le lendemain, D.ieu allait ouvrir les cieux et faire tomber à nouveau Sa bénédiction. Ils avaient le sentiment qu’on prenait soin d’eux. Comme s’ils étaient dans le ventre de leur mère. Ils n’avaient pas besoin de se faire du souci. Cela aurait suffi.
CINQ COUPLETS SUR LE FAIT D’ÊTRE AVEC D.IEU
11) "S’Il nous avait donné le Chabbat."
Qu’est-ce que Chabbat ? De même que l’espace physique peut être sanctifié- les personnes qui arrivent en Israël, lorsqu’elles descendent de l’avion, ressentent quelque chose de spécial - il en est ainsi du temps. Plutôt que de vivre cette vie insensée toute la semaine - à gagner de l’argent, encore et toujours, il y a au moins un jour dans la semaine où l’on ne peut pas en gagner ! A la place, on s’installe confortablement, on se détend et on profite de l’existence. On ressent la présence du Tout Puissant. Chabbat est un jour spécial pour se concentrer sur l’étude et le développement spirituel. On n’a pas à sauter dans la voiture pour aller quelque part. Le monde occidental a perdu le concept de la vie de famille. Chabbat permet de le retrouver. Et cela aurait suffi.
12) "S’Il nous avait conduits au Mont Sinaï."
Je me souviens que lorsque j’étais enfant, le Président Kennedy avait dit que nous allions mettre un homme sur la lune. Tout le pays se mobilisa : les universités, les grandes entreprises, les agences gouvernementales. Tout le monde s’est investi dans le projet de mettre un homme sur la lune et l’Amérique l’a fait !
Lorsque les Juifs arrivèrent au Mont Sinaï, ils étaient parfaitement unis en tant que peuple. Le fait, pour une société, d’oeuvrer de concert pour ressentir la présence de D.ieu est quelque chose d’entièrement nouveau. Au Mont Sinaï, le peuple juif parvint à une révélation d’ordre national.
Lorsqu’Adam et Eve étaient dans le Jardin d’ Eden, la spiritualité était une chose facilement accessible et évidente. Cependant, ils commirent une faute et mangèrent le fruit. Le matériel devint irrésistible et depuis, il nous faut lutter pour dévoiler la spiritualité. Toutefois, celle-ci est, en réalité, comme l’eau : si l’on prend une pelle pour creuser en divers endroits, on la verra jaillir. Ainsi, la spiritualité réside en toute chose, mais nous ne la voyons pas.
Lorsque D.ieu nous amena au Mont Sinaï, Il ouvrit tous les puits. Les Juifs regardaient chaque chose et comprenaient son origine spirituelle. Un monde spirituel chatoyant les entourait. Personne n’avait le moindre doute au Mont Sinaï. Et il n’y a pas de plus grande joie que de se débarrasser de ses doutes. Ils étaient totalement unis entre eux et avec D.ieu. Cela aurait suffi.
13) "S’Il nous avait donné la Torah."
Chacun de nous a des moments de transcendance au cours desquels il ressent D.ieu. Cela peut être un matin d’hiver après une chute de neige lorsque vous regardez par la fenêtre et que vous voyez de la glace suspendue aux arbres. Un rayon de soleil frappe alors la glace et la fait briller et c’est en cet instant que vous prenez conscience de la beauté et de la pureté de toute chose. Vous vous sentez transporté. Mais, ensuite, vous vous retournez et vous devez faire face à vos enfants, à votre travail, à votre belle-mère. Si vous vivez une expérience d’élévation spirituelle et qu’ensuite vous revenez au monde matériel sans savoir comment appliquer votre expérience, vous tomberez de haut. La vie devient très complexe. C’est une lutte permanente que de retourner vers D.ieu.
Le Mont Sinaï constitua une expérience spirituelle extrêmement élevée et ça fait du bien de savoir que D.ieu est avec nous. Néanmoins, il nous faut poursuivre notre vie quotidienne. Nous devons manger, élever nos enfants. Mais comment y parvenir ? Quelles sont les règles ? Où est le mode d’emploi ?
La beauté de la Torah réside dans le fait qu’elle nous indique ce que nous devons faire. Torat ‘Haïm signifie littéralement "Instructions de vie". La Torah nous enseigne à distinguer le bien du mal. Pas seulement sur le plan moral, mais également sur le plan pratique. La Torah recense toute chose et explique quelles actions sont bonnes et quelles actions sont destructrices avec des indications faciles à suivre. Et cela aurait suffi.
14) "S’Il nous avait emmenés sur la Terre d’Israël."
Nous avons déjà mentionné le fait que le temps pouvait acquérir de la sainteté sous la forme du Chabbat. La Terre également peut être sanctifiée. Bien entendu, D.ieu est partout. Mais en certains endroits, on ressent davantage Sa présence. Par exemple, D.ieu Se révèle plus en Israël. C’est la raison pour laquelle lorsque l’avion atterrit, on ressent quelque chose de particulier. Puis lorsqu’on arrive à Jérusalem, c’est encore plus spécial. Et quand on arrive au Mur, c’est... indescriptible. Tout le monde le ressent. Aussi, ne croyez pas que vous avez perdu la raison. Le Tout Puissant lève un peu le voile en Israël.
Israël comporte un second aspect. Vous vous sentez aussi "chez vous". Imaginez un enfant orphelin qui a un sentiment d’insécurité alors qu’il est rejeté d’une famille d’accueil à une autre, puis, qui trouve enfin une famille qui se soucie vraiment de lui, il a dès lors un endroit qu’il peut appeler "la maison". Il ressent un immense réconfort. Lorsque vous êtes "à la maison", vous êtes plus réceptifs à tout ce qui vous entoure.
Voilà ce que représente Israël pour un Juif. C’est notre maison à nous. Et cela aurait suffi.
15) "Il a construit le Temple pour nous."
Notre plus grand sujet de gratitude concerne le Temple de Jérusalem. Certains disent : "Qu’est-ce que le Temple a de si spécial ?" Et bien, pour commencer, c’est l’endroit du Sacrifice d’Isaac, celui du songe à l’échelle de Jacob, celui du Temple du Roi Salomon et le centre névralgique des espérances et des prières juives depuis 3 000 ans.
Dans le Jardin d’Eden, Adam et Eve avaient une expérience de D.ieu extrêmement intense et centrale. Une rivière coulait du Jardin d’Eden et se divisait en quatre directions, ce qui signifiait qu’Adam et Eve devaient transmettre leur expérience du Divin aux quatre coins du globe.
Voilà ce qu’était le Temple. Il procurait une immense, redoutable et exaltante sensation de la présence de D.ieu. Donc, l’idée était de communiquer cette expérience au reste du monde. C’est pour cette raison que le Mont du Temple est appelé le Mont Moriah, qui signifie "enseignement". De cet emplacement, nous pouvons enseigner la connaissance de D.ieu et élever toute l’humanité. Jérusalem enjambe tous les continents parce qu’il s’agit du centre de l’univers. C’est de là que tout coule. "C’est de Sion que sort la Torah et la parole de D.ieu de Jérusalem" (Isaïe 2:3).
Tout le monde sait que s’y rendre est quelque chose de spécial. Même le plus grand des athées, lorsqu’il vient en Israël, se rend directement au Mur des Lamentations. Et, ce n’est pourtant qu’un mur extérieur du Temple ! En fait, nos Sages ont prédit, il y a des milliers d’années, que le Temple serait détruit, mais que le Mur des Lamentations resterait debout, afin de nous donner un goût de ce que nous avons perdu et que nous voulons retrouver. Le Temple fut l’accomplissement ultime du nationalisme juif. Et cela n’aurait-il pas été suffisant ?
À la fin, la Haggadah dresse la liste de ces 15 éléments réunis. Cela parce qu’en plus du fait que chacun constitue un magnifique cadeau en soi, ils ne forment qu’une seule unité. Toutes ces pièces travaillent ensemble et lorsque vous avez le tout, vous les possédez en totalité.