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Une quatrième de couverture : "SUITE FRANCAISE" d'Irène NémirovskyIrène Némirovsky brosse dans son dernier roman un portrait sans complaisance de quelques Français pendant l'Exode et l'Occupation allemande dans les années 1940-42.
Le prix Renaudot 2004 a été, de manière tout à fait exceptionnelle, décerné à titre posthume à Irène Némirovsky pour son roman "Suite française". Ce prix ne venait pas couronner un auteur dont l'œuvre aurait été injustement méconnue: Irène Némirovsky était, dans les années 30 un écrivain reconnu et fêté. Non, ce prix récompensait un roman dont le manuscrit avait miraculeusement survécu à celle qui l'avait écrit 60 ans plus tôt et qui était morte à Auschwitz en 1942.

La très intéressante préface de Myriam Anissimov nous apprend qu' Irène Némirovsky était née en Ukraine en 1903, dans une famille juive aisée qui devait fuir le régime bolchevique en 1920 et trouver refuge en France après de nombreuses péripéties. Elle avait probablement eu une gouvernante française, ainsi qu'il était de bon ton dans la haute société russe, et, dès son arrivée à Paris, elle s'était inscrite à la Sorbonne où elle allait obtenir une licence de lettres. Ceci pour expliquer sa connaissance du français, qui est assez stupéfiante.

Son premier roman, "David Golder", fut publié chez Grasset en 1929 et obtint un tel succès qu'elle devint célèbre du jour au lendemain. Le succès ne devait pas fléchir et ses romans suivants: "Le Vin de Solitude", "Les Chiens et les Loups", "L'enfant prodige", "Le Bal"…furent tous bien accueillis par la critique. Irène Némirovsky était, dans les années 30, un écrivain comblé menant une existence aisée et insouciante entre son mari, Michel Epstein, et ses deux petites filles, Denise et Elisabeth.

En 1939, sentant monter le péril nazi, elle se convertit au catholicisme avec ses deux filles et son mari.
Curieusement, malgré son amour de la France et sa célébrité, elle n’avait pas obtenu la nationalité française. En 1939, sentant monter le péril nazi, elle se convertit au catholicisme avec ses deux filles et son mari. Les premières lois raciales de Vichy d' Octobre 1940 vont inciter la famille Epstein à se réfugier dans un village de Saône-et-Loire, Issy l'Evêque (en zone occupée). Leur situation va encore s'aggraver après les deuxièmes lois de Juin 1941 sur le statut des Juifs.

L'étau va se resserrer et Irène Némirovsky sera arrêtée en Juillet 1942, transférée au camp de Pithiviers puis déportée à Auschwitz où elle mourra quelques mois plus tard. Son mari sera déporté à son tour en Octobre 1942 et les deux fillettes seront prises en charge par une tutrice. Elles devront se cacher pendant toute la guerre fuyant d'un refuge à l'autre mais ne se séparant jamais du dernier manuscrit auquel leur mère travaillait jusqu'à son arrestation.

Les deux filles d’Irène Némirovsky, Denise Epstein et Elisabeth Gille, restèrent en possession de ce manuscrit, douloureux témoin du drame qu'elles avaient vécu, sans vouloir l'éditer, ni même le lire. Mais, avant de le confier il y a quelques années à l'IMEC (Institut Mémoire de l'Edition Contemporaine) Denise Epstein décida de le dactylographier. Elle prit enfin connaissance de la dernière œuvre de sa mère et, jugea probablement qu'elle méritait d'être publiée.

Il n'est pas toujours nécessaire de connaître la biographie d'un auteur avant d'entreprendre la lecture d'une de ses œuvres (à la belle époque du structuralisme on le déconseillait même fortement aux étudiants!), mais dans le cas présent, l'itinéraire d'Irène Némirovsky, l'histoire de ce manuscrit publié 60 après sa mort tragique, ainsi que les notes précieuses de l'auteur et la correspondance très émouvante qui figurent en annexe nous donnent une approche du texte très différente de celle qu’aurait le lecteur non averti.

Irène Némirovsky, tout en écrivant ses romans tenait un carnet de notes qui se révèlent ici particulièrement précieuses. Elle y parlait de l'agencement du récit, des personnages, des relations qu'elle prévoyait pour eux dans les chapitres à venir, de la documentation qu'il lui faudrait consulter pour telle ou telle partie du livre, etc…Ces notes étaient écrites en français, avec de temps en temps un mot russe quelquefois illisible. Grâce à ces notes, nous apprenons que, comme une symphonie, "Suite française" devait comporter cinq parties. Deux seulement nous sont parvenues: "Tempête en Juin" et "Dolce".

Les trois suivantes: "Captivité", "Batailles"?, "La Paix"? ne furent jamais écrites .Les points d'interrogation figurent dans les notes de l'auteur car qui pouvait savoir, en 1942, comment la guerre allait évoluer?

"Tempête en Juin" décrit la panique des Parisiens effrayés par l'avance de l'armée allemande en Mai-Juin 1940 et se jetant sur les routes dans des voitures surchargées ou à pied, une valise à la main, en direction du Sud. Le lecteur suit les péripéties de quelques personnages dont les destinées devaient se croiser dans la suite du roman. Ce sont pour la plupart de grands bourgeois trop occupés à sauver leurs biens pour se soucier de leurs compagnons d'infortune ou mesurer l'ampleur et les conséquences de la défaite.


La deuxième partie, "Dolce", nous fait partager la vie d'un village français de Saône-et-Loire occupé par un régiment allemand, dont les soldats et les officiers sont cantonnés chez les paysans et les notables du village. Irène Némirovsky décrit cette cohabitation forcée avec pas mal de férocité et d'humour. On voit déjà qui va collaborer avec les Allemands, qui sera résistant, qui va rejoindre les réseaux communistes. Le titre "Dolce" n'est jamais explicité, il est d'autant plus énigmatique qu’il n'y a guère de douceur dans ce roman plutôt grinçant.

Dans son roman, Irène Némirovsky n’évoque aucun personnage juif, ne fait aucune allusion aux lois de Vichy qui l'avaient obligée elle-même à se cacher.
Je ne sais pas s'il existe un autre roman écrit à chaud, presqu'au jour le jour, comme Irène Némirovsky le fait dans "Suite Française". Il ne s'agit ni d’un journal, ni de réflexions sur la guerre, mais d'un roman très construit, dont le destin des personnages aurait suivi l'évolution de la guerre, et dont la fin reste ouverte. L'écriture lui a sans doute permis d'oublier un peu les humiliations (elle a porté l'étoile jaune), l'obligation de se cacher et la peur du lendemain.

On peut toutefois s'étonner qu'il n'y ait dans son roman aucun personnage juif, aucune allusion aux lois de Vichy qui l'avaient obligée elle-même à se cacher. Cette négation de son identité ne lui fut cependant d'aucune utilité. On voit, dans la correspondance en annexe, comment, lorsqu'elle a été arrêtée, son mari a écrit aux plus hautes autorités en faisant valoir que, dans ses livres, "elle parle des Juifs sans aucune tendresse", elle n'a pas été libérée pour autant. Bien au contraire: on est venu l'arrêter lui aussi et il n'a pu rejoindre sa femme que dans la mort.

"SUITE FRANCAISE" d'Irène Némirovsky (Denoël - 430 pages - 22 euros)



A PROPOS DE L'AUTEUR
Monique SIAC
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COMMENTAIRE(S) DE VISITEUR(S)  2
"SUITE FRANCAISE" d'Irène Némirovsky - 21 Septembre 2006 - par Trentesaux Audrey <atrentesaux@mrbc.irisnet.be>
un merveilleux hommage
Un merveilleux cadeau à nous lecteurs
Merci à Madame Epstein et Madame Gille
une suite française d'irène Némirovsky - 2 Février 2005 - par chiche ora
très émouvante histoire. Et on peut penser que les allemands connaissaient les lois juives. Quand on est juif c'est pour la vie ou jusqu'à la mort au choix. Même en se convertissant, elle n'as pu être sauvée, ni son mari. c'est dommage qu'elle ne puisse recevoir ce prix qu'a titre postume dû à la barbarie la cruauté des certaines personnes. On peut voir ou la haime à mené l'histoire, mais l'histoire passe et la barbarie reste. Pourquoi ?? Ora chiche
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