C'est ainsi que la nomination d'un parent proche pour des raisons d'intérêts a pu causer beaucoup de dommages et de graves angoisses.
L'existence du mot "    népotisme " atteste éloquemment des fréquentes nominations    de personnes non qualifiées à des fonctions publiques.
À l'origine, le    terme visait surtout l'Eglise, puisqu'il veut dire " neveu ", et que    les prélats, au Moyen-âge, favorisaient leurs " neveux "    - souvent leurs propres bâtards. Le mot " népotisme "    contient cependant aujourd'hui une connotation beaucoup plus large, et il est    largement pratiqué à tous les échelons de l'administration    et des affaires.
L'un des aspects négatifs    du népotisme est constitué par les dommages économiques    qui peuvent être causés quand des gens sont choisis pour diriger    des entreprises alors qu'ils n'ont ni les connaissances ni les aptitudes nécessaires.
Prenons le cas récent    de la société israelienne The Local Authorities Automation Company    (LAAC), une entreprise publique qui fournit des services informatiques à    un grand nombre de municipalités. Le patron de cette entreprise, Dani    Eldar, n'avait aucune formation en informatique, mais cela ne l'a pas empêché    d'en assumer la direction et d'émarger pour un salaire du double de ce    que gagnent la plupart des PDG des entreprises publiques. Le neveu d'Eldar -    son véritable neveu -n'est autre que Adi Eldar, chef du " Centre    de Pouvoirs Locaux ", qui détient des intérêts dominants    dans LAAC. Cette société avait fourni ses services à des    autorités locales pour des centaines de millions de chéqels que    celles-ci, aux prises avec des difficultés financières aiguës,    n'avaient pas payés.
Cela a gravement compromis    la position de LAAC qui comptait très fortement sur les pouvoirs locaux    pour pouvoir fonctionner. Dans une situation normale, elle aurait attaqué    en justice les municipalités défaillantes ou cessé de leur    fournir des services jusqu'à paiement des factures. Mais à cause    du rapport népotique entre les dirigeants de ces deux entreprises, LAAC    a continué de fournir des services jusqu'à ce que sa propre situation    devienne intenable. Forte de 600 employés, elle a été mise    dans la nécessité de licencier des salariés et de se restructurer    afin de pouvoir restaurer sa viabilité économique (Globes, 21/3/01).
Il est hautement probable    que Adi Eldar avait recommandé la nomination de son oncle afin de faciliter    la continuation des services rendus par LAAC à des municipalités    surendettées. Il en est cependant résulté pour la société    de lourdes pertes financières, et pour beaucoup de ses salariés    une perte injuste de leur emploi. Même s'il est impossible de le savoir    de manière certaine, il est possible que cela aurait pu être évité    si la société avait été dirigée par une personne    sans de telles attaches familiales. C'est ainsi que la nomination d'un parent    proche pour des raisons d'intérêts a pu causer beaucoup de dommages    et de graves angoisses.
 
EXTENSION DE L'INTERDICTION    DE FAVORITISME
 
On doit pouvoir compter sur la compétence des personnes nommées dans le domaine qui est le leur et supposer qu'ils ne seront pas enclins à laisser des pressions extérieures influer sur leurs décisions.
Dans la parachath Devarim,    Moïse rappelle le conseil qu'il avait donné aux juges d'Israël    : 
" J'ai ordonné à vos juges, en ce temps-là, en disant    : "Ecoutez entre vos frères, et jugez avec exactitude, entre    frères et entre étrangers. Vous ne favoriserez pas en justice,    écouterez avec une égale attention le petit comme le grand, vous    n'aurez peur d'aucun homme, car la justice émane de D.ieu, et toute question    difficile devra m'être soumise" " (Deutéronome 1,    16 et 17).
L'interdiction de tout favoritisme    en justice est répétée dans la parachath Choftim    (16, 19). Le Sifri (Midrach à contenu juridique) explique la raison de    cette répétition en définissant deux interdictions distinctes    : celle de Choftim s'impose au juge, qui doit se montrer impartial quand    il rend son jugement, tandis que la première, celle de notre paracha,    vise ceux qui nomment les juges. " Ils ne doivent pas dire : "Celui-ci    est élégant, je vais en faire un juge ! Celui-là est de    ma famille, je vais en faire un juge !" Car il ne connaît pas les    lois, et risque donc d'acquitter le coupable et de condamner l'innocent. Aussi    celui qui l'a nommé est-il considéré comme s'il avait fait    preuve de partialité. "
Nous pouvons déduire    de ce Midrach que le concept de justice injuste s'impose même hors de    la salle d'audience. Quiconque, par favoritisme, peut avoir causé un    échec de la justice en est tenu pour responsable, même s'il n'a    pas lui-même rendu de jugement. Il en est ainsi parce qu'il aurait dû    employer sa position à nommer des candidats appropriés.
Il est facile maintenant    de voir la leçon qui peut en être tirée pour les décisions    nommant les dirigeants d'entreprises. Si le titulaire est choisi à cause    de ses talents, on peut compter qu'il servira fidèlement ses intérêts.    Mais si d'autres considérations interviennent pour sa nomination, celle-ci    peut conduire à des conséquences catastrophiques pour l'entreprise.    Puisqu'une société est composée d'individus, salariés    et actionnaires, qui peuvent souffrir de cette nomination, il incombe aux dirigeants    d'être scrupuleusement honnêtes et de ne permettre à aucune    pression ni à aucun préjugé d'intervenir dans leur décision    quand ils choisissent un candidat.
Faute de se montrer circonspects,    ils pourront devoir partager la responsabilité tant du fiasco de l'entreprise    que des souffrances endurées par des innocents qui auront fait confiance    aux aptitudes de leurs dirigeants.
L'obligation de choisir    des dirigeants capables et impartiaux découle de celle de rendre une    justice impartiale. Les deux se situent à des niveaux de responsabilité    qui, s'il leur est porté atteinte, peuvent nuire gravement à des    innocents, même si elles ne sont pas provoquées intentionnellement.    Dans les deux cas, on doit pouvoir compter sur leur compétence dans le    domaine qui est le leur et supposer qu'ils ne seront pas enclins à laisser    des pressions extérieures influer sur leurs décisions.
Cependant, si tout le monde    convient que les juges doivent se tenir à l'écart des considérations    partisanes, beaucoup sont prêts à accepter que les nominations    dans le domaine des affaires soient marquées d'un certain népotisme.    L'erreur de ce point de vue est démontrée par le cas que nous    avons rapporté et par l'interprétation donnée par le Sifri    de l'interdiction du favoritisme qui va bien au-delà des juges eux-mêmes.
Finalement, comme le souligne    la haftara de la parachath Devarim, c'est D.ieu lui-même    qui nommera les vrais juges d'Israël : "Et je ramènerai    tes juges comme avant… alors tu seras appelé la ville de justice,    la cité fidèle " (Isaïe 1, 26).
(Traduit de l'anglais par    Jacques KOHN)