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La secrétaire du Calife (3)" Tandis que l'attention des matelots et de tous les présents était concentrée sur le visiteur et le maître du bateau...

Résumé des chapitres précédents: Au temps du Calife AI Meamoun, dix Juifs - parmi lesquels 'Hakham Nissim et sa fille Dinah - sont capturés et amenés en bateau à Bagdad. Le marchand d'esclaves exige une rançon trop élevée pour ses captifs juifs. Les dirigeants de la communauté juive, avec Mar Yakoub à leur tête, décident de ne pas payer la rançon ; ils veulent plutôt essayer de racheter les captifs quand ils seront vendus au marché aux esclaves. Mais le lendemain le marchand d'esclaves n'arrive pas au marché. Intrigués et inquiets, les chefs juifs dépêchent des agents au port. Ceux-ci rapportent des nouvelles stupéfiantes: au petit matin un haut personnage montait à bord du bateau et, en le quittant une heure après, ses serviteurs emmenaient une jeune fille ; en même temps l'un des captifs s'est jeté à l'eau ; très emporté, le marchand d'esclaves fit lever l'ancre et quitta le port. Les dirigeants juifs se sentent très coupables ; la nuit venue, Mar Yakoub ne peut pas fermer l'œil. Tard dans la nuit on frappe à sa porte, il ouvre et... c'est 'Hakam Nissim, déguisé, qui entre. II raconte à Mar Yakoub comment, malgré ses supplications, Dinah lui a été arrachée et emmenée par les serviteurs de l'homme qu'il a entendu appeler AI Kissei ou" Conseiller du Calife".

 

" Tandis que l'attention des matelots et de tous les présents était concentrée sur le visiteur et le maître du bateau, je me glissai hors de mon groupe, montai sur le pont et courus décidé à reprendre ma fille ou à mourir. Mais c'était un geste de désespoir qui n'avait aucune chance de réussir. J'étais seul contre beaucoup d'hommes. Je luttai quand même quelques instants, mais je me rendis compte que je céderais inévitablement sous le nombre. Alors, comme un éclair, l'idée me vint que j'avais avantage à me sauver ; si je réussissais à quitter le bateau, au moins serais-je plus près de ma fille. Je fis une brève prière, puis, abandonnant soudain l'inégal combat, je courus jusqu'au parapet, l'enjambai et sautai résolument dans l'eau profonde. Dieu me témoigna beaucoup de bonté. Je suis un bon nageur ; je nageai sous l'eau dans la direction opposée à celle qu'avait fait supposer mon plongeon.

Cela me permit de faire perdre ma trace aux matelots qui s'étaient mis à ma recherche. Je trouvai un vieux bateau amarré non loin de là ; je me cachai au-dessous, sortant de temps en temps la tête hors de l'eau pour respirer. Je pus voir les hommes qui entraînaient ma fille, mais ne quittai ma cachette que lorsque la nuit fut tombée. Je grimpai alors à l'intérieur de l'embarcation qui m'avait masqué aux regards de mes poursuivants. Dans un petit placard, je trouvai ces guenilles qui m'ont été très utiles. Je pus gagner sans encombre la terre ferme, et me voilà ! Le reste est entre les mains de Dieu; je compte sur Lui aussi bien que sur vos bons conseils et votre aide ".

Des heures durant, le vieux Rabbin de Samarra et le jeune 'Hakham d'Alexandrie supputèrent, discutèrent des meilleurs moyens à mettre en ceuvre pour sauver Dinah des griffes d'AI Kissei. L'aube n'était pas loin quand les deux hommes décidèrent d'aller prendre quelque repos. Pour plus de sûreté, 'Hakham Nissim ne demeura pas dans la maison de Mar Yakoub ; il s'installa dans le hangar, derrière une énorme rangée de bûches de bois de cèdre.

Dinah, on peut l'imaginer, était encore plus bouleversée que son père. Depuis son enfance, elle ne s'était jamais séparée de lui. Et maintenant, à treize ans - une enfant -, voilà quelle lui était brutalement arrachée. Elle avait perdu connaissance alors que ses ravisseurs l'entraînaient, et ne pouvait savoir que son père avait quitté le bateau dans le même temps qu'elle, dans une tentative désespérée de lui venir en aide d'une façon ou d'une autre.

Revenue à elle, elle se trouva allongée sur un divan. A ses côtés, une vieille femme, dont les traits ne semblaient pas dépourvus de bonté, lui prodiguait des soins. Fort heureusement, 'Hakham Nissim avait veillé à donner à sa fille une solide instruction. En dépit de son jeune âge, elle parlait, et même écrivait, couramment l'arabe. Ce n'était guère fréquent à une époque où la plupart des femmes ne savaient ni lire ni écrire, même leur langue maternelle. La vieille tâchait de la tranquilliser.

- Ne t'inquiète pas, ma petite, lui disait-elle; mon mari t'a achetée pour que tu prennes la place de notre fille unique que nous avons perdue récemment. Tant que tu seras sous mon toit, tu n'auras rien à craindre; nul n'osera te faire le moindre mal.

- Mais je suis juive, sanglota Dinah ; et je ne peux prier ni manger, ni vivre comme vous.

Le visage de la vieille femme devint grave.

- Pour ce qui me concerne, dit elle après un moment de réflexion, je n'y attache aucune importance. Tu feras comme bon te semble; et dans ta chambre, tu pourras même prier ton propre Dieu. Quant à mon mari, c'est différent; je crains qu'il ne veuille pas te permettre de vivre en juive dans cette maison. C'est un pratiquant convaincu de notre religion, et il ne manque aucune occasion pour inciter le Calife d'user avec rigueur envers les juifs. Il est persuadé que ces derniers sont devenus trop puissants grâce au libéralisme et à la tolérance du souverain. Je te conseillerai de ne pas lui faire savoir que tu es juive, et moins encore que tu tiens à le demeurer. Feins plutôt d'agir en bonne, fidèle et même ignorante musulmane, pendant le peu de temps qu'Al Kissei passe avec nous dans le Harem. Je t'enseignerai tout ce que tu dois savoir pour ne pas éveiller ses soupçons.

" JE NE ME SOUVIENS DE RIEN "

Dinah rendit grâces à Dieu de tout son cœur pour l'avoir envoyée, dans la situation infortunée où elle se trouvait, vers cette femme qui était si bonne, et qui lui permettait de vivre selon les principes inculqués par l'homme tout de sagesse et de mansuétude qu'était son père.

Ainsi, la jeune fille fut-elle, les semaines, puis les mois qui suivirent, une aide très efficace pour la femme d'Al Kissei. Cette dernière était émerveillée par l'intelligence et la maturité d'esprit dont, en toute occasion, faisait preuve la jeune fille. Celle-ci était en effet d'un niveau intellectuel supérieur à celui d'une femme ayant le double de son âge. Sa maîtresse ne l'obligeait pas à manger la nourriture qu'elle refusait et la laissait agir à sa guise dans sa chambre.

Le maître, lui, n'était pas moins admiratif que sa femme. II se plaisait à converser avec la jeune esclave et il prit l'habitude de passer plus de temps à la maison qu'il n'avait coutume de le faire. On le voyait souvent quitter la pièce où il venait de parler à la jeune fille en hochant la tête d'étonnement devant la vive intelligence qu'elle manifestait. Nul doute qu'elle a reçu une éducation de tout premier ordre, pensait-il nonobstant le fait qu'il l'avait découverte parmi un groupe d'esclaves. Mais il avait beau l'engager à lui parler de son passé. " Je ne me souviens plus de rien ", lui répondait-elle invariablement.

Si bien qu'il finit par croire que cela pouvait, en fin de compte, être vrai. Du reste, que lui importait le passé de la jeune fille, du moment qu'elle s'avérait une compagnie parfaite pour sa femme ? Celle-ci n'avait jamais été heureuse depuis la mort de leur fille. Et maintenant, avec la jeune juive à ses côtés, elle l'était.

" MA PETITE SECRÉTAIRE"

Peu à peu, il en vint à se fier si totalement au jugement de Dinah pour tout ce qui concernait la bonne marche de la maison, qu'il était prêt même à lui laisser la responsabilité de tâches mineures, telles que les réponses à des lettres de peu d'importance, et qu'il avait l'habitude d'assumer en sa qualité de bras droit du Calife. " Ma petite secrétaire ", disait-il d'elle affectueusement. Dinah se montra à la hauteur de sa tâche. A sa maturité d'esprit, elle alliait un style clair et plein de naturel ; elle avait de surcroît une belle écriture. " Réponds à tout cela ", lui disait-il en lui tendant une liasse de documents. Il savait que le lendemain à midi, son serviteur trouverait les réponses prêtes.

Et 'Hakham Nissim, que devenait il ? Eh bien, lui non plus ne perdait pas son temps. Le lendemain de son arrivée à la maison de Mar Yakoub, il sortit sous un déguisement, décidé à avoir coûte que coûte des nouvelles de sa fille. Il était facile de se faire indiquer la résidence d'Al Kissei. Arrivé là, il demeura du matin jusqu'au soir assis en face du mur d'enceinte qui masquait le palais, observant les allées et venues. Vêtu de haillons, parlant le dialecte de la classe la plus déshéritée aussi parfaitement que s'il avait grandi dans les quartiers les plus misérables de la capitale, il n'eut pas de peine à gagner la confiance des serviteurs et des esclaves de l'aristocratique demeure. L'un de ceux-ci, affecté aux travaux de la cuisine, était un Egyptien. 'Hakham Nissim engagea la conversation aussi avec lui; et de fil en aiguille, il apprit combien Dinah était année de tous, surtout de la femme d'Al Kissei, et même de ce dernier.

UN MENDIANT

Le malheureux père avait une confiance totale en sa fille. Il avait fait d'elle une juive aussi parfaite que possible. Mais tout de même, ce n'était qu'une enfant, et de surcroît une esclave. Sans doute ne lui permettait-on que de vivre à la manière de ses maîtres. Cela ne fit que renforcer sa détermination de l'arracher à ce qui n'était à ses yeux qu'une prison.

Mais les difficultés semblaient insurmontables. Aucun étranger n'était admis à pénétrer dans la résidence s'il n'exhibait une autorisation signée de la main même du maître. Et à supposer qu'il pût traverser l'obstacle, il n'avait aucune chance d'accéder au Harem où justement se trouvait sa fille. Ce lieu réservé aux femmes était interdit même aux esclaves mâles, à l'exception des eunuques dont faisait partie l'esclave égyptien affecté à la cuisine.

(A suivre)



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