Les livres de la série
" Harry Potter " ne sont pas de simples romans.Ce sont des contes
de fée modernes, sur des thèmes essentiellement spirituels. Ils
décrivent la lutte entre le bien et le mal, à travers le courage
et l'ingénuité de l'esprit humain et le pouvoir de l'amour humain.
La survie de l'enfant Harry
à l'attaque du méchant Lord Voldemort, attaque qui coûta
la vie aux parents de Harry, est continuellement attribuée au pouvoir
de l'amour de sa mère et à sa volonté de sacrifier sa propre
vie sur l'autel de cet amour. (Ne vous inquiétez pas je suis parfaitement
incapable de vous révéler des secrets concernant " Harry
Potter et la Coupe de Feu ", puisque je n'ai pas encore réussi à
mettre la main sur cet ouvrage !)
Dans chacune de ses histoires,
le triomphe de Harry Potter et de ses amis sur le méchant Lord Voldemort,
est dû au pouvoir spirituel de bonté qui habite Harry, à
la force du puissant lien de l'amitié entre Harry et le fidèle
Ron, à l'ingénuité et la capacité de résoudre
les problèmes de la studieuse Hermione, et à leur courage à
eux tous ensemble.
Le génie de l'auteur J.K. Rowling est d'avoir su faire descendre sur terre des thèmes aussi difficiles.
Le génie de l'auteur
J. K. Rowling tient au fait qu'elle a été capable d'aborder des
thèmes si difficiles de manière terre à terre, d'une manière
fascinante pour les enfants et pour les adultes.
Le thème qui a particulièrement
captivé mon intérêt est celui de la lutte entre le bien
et le mal. Ce thème cerne l'attitude qui prévaut dans notre culture.
En tant que Juif, je ne puis m'empêcher de réfléchir aux
attitudes tellement contrastées dans le domaine de ce problème
épique, entre le Judaïsme et le monde de Harry Potter.
Ce qui m'a frappé
d'abord, c'est que cette lutte entre bien et mal est totalement absente du monde
des Moldus. En effet, dans le monde des Moldus, le méchant Voldemort
se métamorphose en la stupidité, la vénalité et
la médiocrité de la famille de Harry, les Dursleys. Ce sont là
des défauts que même les qualités de courage et d'ingénuité
de Harry Potter ne peuvent pas surmonter. La seule solution à ce problème
réside dans la fuite.
Les gens du monde des Moldus
le monde du réel, vis à vis du monde de la magie - est soit
intéressant, soit banal. Ce qui est banal, ce sont les gens étroits
d'esprit et égoïstes ; on ne peut rien faire pour les sauver. Ils
ne peuvent pas changer ; ils ne peuvent pas non plus être changés.
Ceux qui sont intéressants recevront vraisemblablement une invitation
à entrer dans la maison des Sorciers. Quant à ceux qui ne le sont
pas, il ne leur reste qu'à garder leurs distances. Dans le monde des
Moldus, tout est appelé à rester embrouillé.
Ainsi, les Dursley restent-ils
inchangés. Leur relation avec Harry - bien qu'ils manifestent une très
grande gentillesse en recueillant un orphelin mais cela ne leur inspire rien.
Ce sont seulement leurs traits négatifs qui s'intensifient d'un livre
à l'autre. Devant nous, le cousin Dudley se développe en un monstre
égoïste, égocentriste et étroit d'esprit, recevant
pour cela tous les encouragements de ses parents.
Pourtant, les Dursley sont
présentés avec leur banalité, sans qu'on parle de ce qu'ils
ont de mesquin, de négatif..
LA REPONSE
AU MAL
Le Judaïsme, au contraire,
professe que le but essentiel de la vie dans ce monde de Muggle est que chacun
change et se corrige de ses traits négatifs. La lutte contre la vénalité
et la mesquinerie est en même temps une lutte contre le mal. Pour surmonter
les écueils de la mesquinerie et de la stupidité, il ne s'agit
nullement de s'enfuir vers le monde de la magie, mais au contraire de contribuer
dans la réalité à changer le monde dans lequel on se trouve.
Une de mes tâches
principales en tant que parent juif, est d'enseigner à mes enfants ce
qu'il y a d'héroïque à façonner son propre caractère.
De même qu'ils doivent livrer le combat contre leurs propres défauts,
ainsi ont-ils besoin d'apprendre que les autres luttent contre leur vénalité
et leurs défauts. C'est ainsi qu'ils intégreront dans leur caractère
le trait de toujours juger autrui favorablement, accordant ainsi aux autres
le bénéfice du doute.
Dans le monde des Sorciers,
là où il y a un conflit entre le bien et le mal, le portrait des
gens n'est pas non plus bien différent. En faisant tout au plus une exception
pour le Professeur Snape, nous ne rencontrons pas de caractères ambigüs,
ni de gens travaillant à développer leur caractère moral.
Dès lors qu'on pénètre chez les Sorciers tout est fixé
une fois pour toutes.
LeChoixpeau magique divise
ceux qui, venant à l'âge de onze ans, vers différentes maisons.
Dans les trois premiers livres, il n'y a rien de bon concernant Serpentard, ni
rien de mal chez Gryffondor. (Les deux autres maisons auront encore un rôle
important à jouer). Tous les Slytherings ont un regard méchant
et menaçant, avec les mêmes façons de parler, alors que
les Gryphindors sont de ceux auxquels nous pouvons nous identifier.
Dans les livres de Harry Potter, les bons combattent les mauvais, mais les combattants ne sont pas libres du choix de leur camp.
Le bon est purement bon
; le mauvais est purement mauvais. Aucun espace ne comporte d'ambigüité
ou de confusion. Alors même que les bons combattent contre les mauvais,
les combattants ne sont pas libres du choix de leur camp. Leurs caractères
les ont complètement gelés dans leurs camps respectifs.
Bien que Dumbledore dise
à Harry que ce sont les choix de la personne qui nous renseignent sur
la personne, le choix de Gryffondor par Harry peut difficilement être
appelé un choix. Il n'avait jamais été attiré par
Serpentard. Effectivement, que le Chapeau de Tri ait détecté chez
Harry certaines tendances de Serpentard est une source d'anxiété
pour Harry. Harry possède certains pouvoirs qui sont généralement
associés avec Serpentard, comme par exemple une langue de parsel, mais
il n'a aucun vrai défaut du genre de ceux des Malfoys, ou même
de Torn Riddle, censé être son homologue.
L'incapacité à
changer son caractère et à choisir librement de quel côté
on veut se situer, transforme le combat épique entre bien et mal, en
une lutte pour le pouvoir, sans implication morale. La victoire appartient à
celui qui sera le plus fort magicien. La guerre entre le bien et la mal n'est
pas une lutte qui porte sur les cœurs et les esprits de l'humanité.
De chaque côté, on se dispute pour la maîtrise du monde extérieur,
rien de plus.
Qui plus est, il n'y a aucune
tentative pour racheter le mauvais, ou l'améliorer. Celui qui est bon
se contente de maintenir un statu quo, et d'empêcher le mauvais, sous
l'apparence de Lord Voldemort, de gagner la moindre emprise sur lui. Le mauvais
veut dominer parce qu'il est précisément mauvais, et il a la haine
du bon ; et vice-versa. Ils ne combattent pas en vue de remporter un prix, matériel
ou spirituel qui serait décerné au gagnant. Le seul but est de
détruire l'autre.
Il ne se manifeste aucune
volonté libre, et donc aucune responsabilité morale. Toute la
lutte est une sorte de jeu de Quidditch couvert de gloire. C'est très
drôle tant qu'on est dans l'équipe qui gagne.
LE COMBAT
DU COEUR
Bien au contraire, l'essence
même de toute la pensée juive est que le combat entre le bien et
le mal est un combat moral. Il se situe dans le cœur, pas dans le monde
extérieur. Les parties en présence sont la conscience humaine
luttant contre les pulsions humaines ; la spiritualité humaine luttant
contre les forces de la vie physique.
Selon la perspective juive,
le mal n'est pas répugnant. Bien au contraire, pour lui garantir une
chance égale à l'intérieur de notre libre-arbitre, Hachem
a rendu le mal attractif, en lui conférant l'extraordinaire force de
séduction de la sexualité. Ce n'est que cette attirance qui définit
le niveau du champ de bataille où se déroule le libre-arbitre.
L'attrait du bien tient à sa vérité et à sa pureté
; tout le monde s'accorde à reconnaître que ces qualités
sont merveilleuses ; toutefois, ce ne sont évidemment pas des amusements,
ni de la sexualité.
Le mal dresille avec le plaisir sensuel alors que le chemin du bien conduit a la joie spirituelle.
Le mal est le compagnon
du plaisir sensuel, alors que le chemin du bien conduit vers la joie spirituelle,
en même temps qu'il met en relation avec Hachem. Il y a une guerre pour
l'âme humaine, entre ce qui est pur et droit, d'une part, et d'autre part
ce qui charme et séduit, certes, mais qui est mensonge.
La croyance juive ne situe
pas l'essentiel de la lutte entre le bien et le mal dans une perspective d'hégémonie,
dans l'ambition à une suprématie dans le monde, mais tend à
la conquête par l'individu de son âme humaine et du pouvoir qu'elle
possède potentiellement.
Le choix humain possède
la magie de donner du pouvoir à ce qui est négatif. La Torah nous
dit que Hachem a créé l'homme à Son image. C'est dire que
Hachem nous a doté de quelque chose qui ressemble à Son pouvoir
immense. Ceci fait de nous des détenteurs de liberté comme Hachem,
des êtres doués du libre-arbitre.
LE MAL INTERNE
EST REFLETE A L'EXTERIEUR.
Le monde extérieur
est globalement conforme au niveau moral de l'esprit humain. Le mal dans l'homme
est reflété par le mal dans le monde. Le mal tel qu'il est décrit
par les livres de Harry Potter - ce mal dont l'ambition est de détruire
le bien dans le but d'établir sa propre hégémonie - n'existe
pas de manière innée dans l'univers. En réalité,
le mal n'intervient que par la corruption du bien.
Au départ, la volonté
de Hachem lors de la création ne donnait à la force négative
que le pouvoir d'attirer l'homme hors du bon chemin ; le pouvoir de le tenter,
c'est tout. Le mal recevait le pouvoir d'attirer vers lui, mais pas de détruire.
Le pouvoir de détruire provient d'une corruption de l'esprit humain,
qui est la force la plus importante à l'intérieur de l'univers
créé. Lorsque la force négative créée par
Hachem pour tenter l'homme subit la poussée de l'extraordinaire énergie
de sa force vitale, elle acquiert le pouvoir de redessiner le monde à
sa propre image.
Aussi n'est-ce qu'après
que l'homme eut effectué son choix immoral que la force négative
- qui jusque-là ne faisait que le tenter - a acquis son pouvoir destructeur.
Cette force que Hachem a investie en l'homme est capable de façonner
tout dans l'univers, depuis le soleil, la lune et les étoiles jusqu'aux
êtres humains. Lorsque l'homme oriente cette force vers le mal, le côté
sombre de la création, alors le mal devient capable de reformer le monde
à son image.
Ce n'est qu'une fois que les forces du mal auront épuisé toutes leurs ressources que l'univers pourra se débarrasser de leur influence nuisible.
Pour avoir
créé en premier lieu cette force destructive, en ayant dépensé
pour le mal, et par son propre choix libre, l'énergie divine qui lui
fut confiée, l'homme est maintenant condamné à en souffrir
les effets, comme dans l'exemple de Hitler et de la machine de guerre des nazis
; et ainsi dans les autres cas de monstres dans l'histoire de l'homme. Ce n'est
qu'une fois que les forces du mal auront épuisé toutes leurs ressources
et dépensé toute la vitalité qui a été investie
en elles dans des actes de pure destruction, que l'univers pourra enfin se débarrasser
de leur influence nuisible. Alors seulement, les forces négatives retrouveront
comme seule vocation de tenter au mal, sans plus.
RACHETER
VOLDEMORT
L'ultime divergence importante
entre le Judaïsme et les sagas Harry Potter réside
dans la capacité à se repentir et à retrouver l'âme
juive perdue.
Aussi bien qu'un homme peut
investir la force de sa vie dans la mauvaise direction par sa volonté
libre, ainsi peut-il corriger cet investissement, en le retirant, et lutter
pour racheter son âme humaine. Dans un conte de fée juif, le héros
se battrait pour l'âme de Lord Voldemort et essaierait de le corriger
vers le bien. Aucun être humain doté du libre-arbitre n'est dans
l'impossibilité d'être racheté.
Les Juifs récitent
deux fois par jour le verset : " Tu aimeras l'Eternel, ton Dieu de tout
ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir ".(Devarim
6 - 5) Le Talmud interprète la phrase " de tout ton cœur "
en la rapportant au bon et au mauvais penchant qui se trouve en l'homme. (Guemara
Berachot 9 - 5). Nous avons l'obligation de servir Hachem avec nos tendances
au mal autant qu'avec nos tendances au bien.
Aucune pulsion humaine n'est
irréparable, rien dans l'être humain n'est destiné à
la destruction. La mission de l'homme est de rectifier les aspects négatifs
de sa propre personnalité. Le but du héros juif est de transformer
le mal en bien, et de ramener tout à Hachem.
Dans les livres de Harry
Potter, en l'absence d'un combat moral entre le bien et le mal, il n'y a aucune
magie dans le monde. Toutes les choses sont condamnées à être
ce qu'elles sont, rien de plus ; le monde entier devient alors un endroit ennuyeux
et sans couleurs. Vous avez besoin de vous enfuir vers le royaume de la magie
pour rendre les choses intéressantes et pour découvrir les possibilités
de transformer l'existence.
Dans le monde juif, là
où le mal peut être canalisé vers le bien, et où
le bien risque d'être conduit vers le mal, ce monde ordinaire de Moldus
est plein de magie. La vie ordinaire devient une saga héroïque.
Sans ennui.