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Judaïsme / Judaisme 123 back  Retour
Joseph et Juda : deux forces complémentairesUne reflexion sur le pouvoir et la nécessité d'une opposition constructive.

Deux personnages, en dehors de Jacob, dominent respectivement les parachas de Miqets, Vayigach et Vayéhi, Joseph et Juda.

Si Joseph par beaucoup d’aspects intellectuels et spirituels ressemble à son père et à ses ancêtres Abraham et Isaac, Juda inaugure dans ces trois sections, une nouvelle personnalité, l’homme politique. Jusqu’à la paracha de Miqets, les rivalités que nous décrit la Torah sont manichéennes ; il y a toujours le bon et le mauvais : Abel et Caïn, Noé et son environnement, Abraham et le Pharaon ou Abimelekh, Isaac et Ismaël, Jacob et Esaü. Ici, on constate en fait une complémentarité qui, certes par moment, est une controverse, mais qui ne se traduit jamais par une animosité ou par une quelconque violence.

Rappelons brièvement les données concernant Joseph et Juda qui vont nous aider à étayer notre proposition.

Joseph a fait preuve d’un certain orgueil auprès de ses frères, D.ieu le met à l’épreuve en prolongeant son séjour en prison de deux années après l’épisode des rêves de l’échanson et du panetier. Joseph a espéré sa libération de l’échanson qui a oublié sa promesse. Il a ainsi porté ses espérances sur un orgueilleux plutôt que sur D.ieu Lui-même et de ce fait, il a été puni.

Joseph est un conseiller d’exception : brillant planificateur, économiste, homme d’idées. Mais son pouvoir n’est pas hégémonique.

Appelé par le Pharaon à interpréter ses deux rêves, grâce tout de même à l’échanson, il apporte une explication et un mode d’action qui a séduit le souverain d’Egypte. Bien sûr, ce dernier comme ses conseillers avaient vu qu’il y avait dans ces rêves, des périodes de sept ans, de prospérité et de famine, mais ce qu’ils n’avaient pas compris, c’était l’imminence de ces évènements. En effet, les deux rêves apparaissaient comme une redondance incompréhensible. Contrairement à d’autres écrits, une redondance dans la Torah est toujours porteuse d’informations.

De fait, Joseph indique par là au Pharaon qu’il faut faire vite et agir en conséquence. Il démontre ainsi ses dons d’économiste et de planificateur, peut-être le premier dans l’Histoire des hommes. De plus, il met en place un système de prélèvement dont la modernité est saisissante : un cinquième de la récolte doit être engrangé et répondre à toutes les conditions de conservation. Pourquoi un cinquième ? Un septième aurait peut-être suffi. Non, Joseph a tenu compte, et on le verra plus tard, des imprévoyances de la population, d’une partie de celle-ci (les prêtres) non assujettie et des aléas qui pourraient survenir. Rappelons, qu’en moyenne, sur l’ensemble des pays démocratiques développés, la moyenne (il ne s’agit pas de la tranche marginale pour ceux d’entre nous qui ont de hauts revenus) des prélèvements directs sur les revenus sont d’environ 20%. Il fait montre, là aussi, de compétences fiscales incontestables.

Allons plus loin, une fois que ses frères sont installés à Goshen avec leur père, il instaure, mais uniquement au sein du peuple d’Israël, une sorte de redistribution des revenus (à chaque famille selon ses besoins). Pourquoi seulement au sein d’Israël? Probablement, parce que Joseph considérait que l’aristocratie égyptienne n’était pas mûre, spirituellement et politiquement, à accepter cela. Si Joseph est un homme d’idées, il prouve par là qu’il n’est pas un idéologue.

Par ailleurs, Joseph est aussi un homme de Torah qui, dans un environnement difficile, a respecté les mitsvoth. Au moment où son père lui demande d’aller voir ses frères à Sichem pour s’assurer que tout allait bien, ils étaient tous deux en train d’étudier la Torah.

Or quand ses frères reviennent en Canaan pour annoncer à Jacob que Joseph vit et est prince d’Egypte, il ne les croit pas, ils lui ont déjà menti. Il ne comprend que quand il voit les chariots dont la racine en hébreu est commune au mot génisse qui apparaît dans la paracha de Choftim qui était celle que précisément, ils étudiaient.

Tout cela prouve donc que Joseph était un homme d’études de la Torah. Mais pas seulement ; il étudiait aussi les sciences profanes, économiques et sociales. Il était un conseiller remarquable, on dirait aujourd’hui un brillant haut fonctionnaire. Toutefois, et malgré ses titres de prince et de vice-roi, ainsi que la confiance qu’il avait auprès du Pharaon, il n’exerçait pas le pouvoir politique suprême. N’oublions pas qu’il a dû demander l’autorisation à ce dernier d’aller en Egypte pour enterrer son père Jacob.

QU’EN EST-IL DE JUDA ?

Juda s’est interposé face à ses frères, en l’absence de Ruben, pour sauver Joseph une deuxième fois et accepter le compromis qui consistait à ce qu’il fût vendu aux marchands madianites. De cet épisode, son « leadership » s’est progressivement imposé à ses frères.

D’abord dans la mêlée, lorsque Joseph les accuse d’espionnage, laissant l’aîné Ruben leur reprocher la faute commise envers Joseph. Puis argumentant auprès de Jacob pour lui faire accepter que Benjamin les accompagne en Egypte et ainsi répondre à la demande de « l’homme d’Egypte », prenant le risque de perdre sa vie dans le « Olam Aba » (le monde à venir). Puis face à Joseph dans la rencontre cruciale où ce dernier cherche à garder Benjamin accusé d’avoir volé la coupe qui a été mise dans son sac.

Dans un premier temps, Juda accepte, par avance, la sentence de Joseph. Dans un deuxième temps, il se fait l’avocat de Benjamin, évoquant les épreuves subies par leur père. Le récit de la Torah décrit une atmosphère apparemment modérée, par contre, le récit du Midrach montre une discussion violente : « les yeux de Juda sont trempés de sang, les frères derrière lui piétinent le sol de leurs pieds » face à ce qui leur semble être de la part de Joseph, des finasseries. Juda démonte un à un les arguments de Joseph, et prouve par là même, la sincérité de tous les frères, dans leur amour envers Benjamin. Cela compense plus qu’il n’en faut, aux yeux de Joseph, la haine passée. Il cède sous l’émotion et se dévoile.

Alors que Joseph est le gardien de la Torah écrite, Jacob fait de Juda le promoteur de la Torah orale dans le futur d’Israël.

Juda a donc acquis dans cette controverse les titres de noblesse que va lui accorder son père Jacob en l’envoyant en quelque sorte en éclaireur pour bâtir la première yechiva (maison d’études) dans le pays de Goshen. Alors que Joseph, à la suite de son père, est le gardien de la Torah écrite, Jacob fait de Juda le promoteur de la Torah orale dans le futur d’Israël.

L’HOMME D’ETUDES ET LE POLITIQUE

Ces trois parachas sont édifiantes par le fait qu’elles mettent en avant un des principes fondamentaux de la démocratie : la séparation du prophète et du roi, de l’intellectuel et du politique, donc de la nécessité d’une opposition face au pouvoir.

De fait, Jacob dans son héritage, à la fin de ses jours, dit de Juda « rouges seront les yeux de vin et blanches les dents de lait », ce qui met en relief sa convivialité, le partage du vin et le sourire aux lèvres propres aux hommes politiques modernes. Enfin, le troisième patriarche donne à Juda, l’onction de la royauté d’Israël. De lui, descendront les rois et le messie.

Quant à Joseph, Jacob dit de lui « fils fertile sur l’œil. Des filles marchent sur la muraille. ». Sa vision est lointaine, il convainc par son charisme. « Rocher d’Israël », il est le garant de la liberté, du spirituel et de la morale.

Le fonctionnement des sociétés a montré tout au long de l’Histoire que toute dérogation au principe de séparation conduit à la dictature et au régime totalitaire. Le XXème siècle l’a amplement illustré.

Malheureusement, ce début de XXIème siècle voit resurgir à nouveau un ancien totalitarisme où le religieux se confond avec le pouvoir. L’espoir réside dans l’implosion de ce type de régime par la résistance et le soulèvement final des croyants sincères, des démocrates et des intellectuels qui subissent ce mode de gouvernement.



A PROPOS DE L'AUTEUR
Victor Sitbon
Victor Sitbon est ingénieur de l'Ecole Centrale de Paris, Docteur en sciences physiques, licencié en sciences économiques et diplômé du CPA (centre de perfectionnement dans l'administration des affaires). Il a été, pendant 40 ans, dirigeant d'entreprise. Il est professeur au CNAM depuis 20 ans et continue à conseiller des dirigeants.
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