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Rashbi et l'Arc-en-ciel

Après le déluge, Noa'h sort de son arche. Le monde a été puni par la colère de D.ieu, et D.ieu dit alors :


D.ieu dit à Noa'h et à ses fils avec lui, en ces termes, "Et moi, voici que j’établis une alliance avec vous, et avec votre descendance après vous. Et avec chaque âme vivante qui est avec vous, parmi les oiseaux, parmi le bétail, et parmi tout animal sur terre avec vous, de tous ceux qui sortent de l'arche, tous les animaux de la terre. J’établirai mon alliance avec vous; nulle chair ne sera plus jamais exterminée par les eaux du déluge, et il n'y aura plus de déluge pour détruire la terre”. D.ieu dit, "c'est le signe de l'alliance que je donne entre Moi et vous, et entre chaque créature vivante qui est avec vous, pour les générations à venir. Mon arc, je l’ai placé dans le nuage, et ce sera un signe d’alliance entre Moi et la terre. Et ce sera quand j’amoncellerai des nuages sur la terre, et l’arc sera visible dans le nuage. Je me souviendrai de Mon alliance qui [est] entre Moi et entre vous et entre tous les êtres vivants, dans toute chair, et il n’y aura plus les eaux comme déluge pour détruire toute chair. Et l’arc sera dans le nuage; et Je le regarderai pour Me rappeler l'alliance éternelle entre D.ieu et entre tout être vivant de toute chair qui [est] sur la terre”. D.ieu dit à Noa'h, "Ceci est le signe de l'alliance, que j'ai établie entre Moi et entre toute chair qui [est] sur la terre”. (Genèse 9:8-17)

L’arc-en-ciel, époustouflante manifestation de la nature, est désormais le signe que D.ieu ne ravagera plus jamais la Terre par l’eau pour punir l’Homme pour ses fautes.

EXCEPTIONNEL

Le Midrash note que le mot ‘dorot’ "générations", est écrit de façon défective, à
savoir sans 'vav'. Les deux ‘vav’ manquants correspondent aux deux générations qui n'ont
pas eu besoin d'arc-en-ciel. Ces générations dites ‘supérieures’, comptent parmi elles des
personnes vertueuses, rendant superflu le symbole de D.ieu maîtrisant sa colère. Ces deux
générations sont celles de 'Hizkiyahou et Rashbi (acronyme de Rabbi Shimone Bar
Yo'haï) : deux hommes dont la présence suffisait à elle seule à empêcher la destruction du
monde. Ce même Midrash poursuit en évoquant la grandeur de Rashbi en personne.


Eliyahou de mémoire bénie et Rabbi Yéhoshoua Ben Lévi étaient assis et étudiaient ensemble ; quand ils sont arrivés à un enseignement de Rabbi Shimone bar Yo'haï. L’un dit : "voici l'auteur de cet enseignement, allons et interrogeons-le". Ainsi, Eliyahou de mémoire bénie est allé chez Rashbi. "Qui est avec toi?" lui a-t-il demandé. "Le plus grand de la génération, Rabbi Yéhoshoua Ben Lévi," a-t-il répondu. "L'arc-en-ciel est-t-il apparu durant sa vie?" demanda-t-il. "Si c’est le cas, il n'est pas digne d’être reçu par moi".

Rabbi 'Hizkiah a rapporté au nom de Rabbi Yirmiah: "Ainsi a dit Rabbi Shimone bar Yo'haï : 'O champ, O champ, sois rempli de dinars d'or', et le champ se remplit de dinars d’or". Rabbi 'Hizkiah a rapporté au nom de Rabbi Yirmiah : "Ainsi a dit Rabbi Shimone bar Yo'haï : 'si Avraham le désire, il peut efficacement intercéder pour toutes les générations, de sa génération jusqu’à ce jour, alors que je peux intercéder pour toutes les générations, de ma génération jusqu'à la venue du Messie. Mais s’il ne le souhaite pas, laissez Ahiyah le Shilonite s'unir avec moi et nous intercéderons pour toutes les générations, de Avraham jusqu'à la venue du Messie". Rabbi 'Hizkiah a dit au nom de Rabbi Yirmiah "Ainsi a dit Rabbi Shimone Bar Yo'haï : 'le monde ne peut tenir s’il y a moins de 30 justes comme Avraham. S'il y en a trente, moi et mon fils sommes parmi eux;... s’il y en a dix, moi et mon fils sommes parmi eux; s’il y en a cinq, moi et mon fils sommes parmi eux; s’il n’y en a que deux, alors c’est moi et mon fils; s'il n’y en a qu’un, alors c’est moi".(Midrash Rabba - Genèse 35:2)

En dépit de la grandeur, sans précédent peut-être, de Rashbi, nous sommes quelques peu interloqués par ces auto-proclamations de piété et de grandeur. Cette affirmation n’est pas un ‘dérapage linguistique’ isolé. Nous trouvons de nombreuses déclarations dans le Talmud où Rashbi fait de telles affirmations.


Et 'Hizkiah a rapporté que Rabbi Yirmiah a dit au nom de Rabbi Shimone bar Yo'haï : "je suis capable d'exempter le monde entier du jugement, à partir du jour où je suis né jusqu'à aujourd’hui et si Eliézer, mon fils, était avec moi, [nous pourrions l'exempter] du jour de la création du monde jusqu’à ce jour, et si Yotam ben Ouziah était avec nous, [nous pourrions l'exempter] de la création du monde jusqu’à la fin des temps". Et 'Hizkiah a dit que Rabbi Yirmiah a dit au nom de Rabbi Shimone bar Yo'haï : "j'ai vu les hommes de grande valeur (Rashi précise : capables de recevoir la magnificence divine) et ils sont peu nombreux. S'ils sont mille, moi et mon fils sommes parmi eux; s’ils sont cent, moi et mon fils sommes parmi eux; et s’ils sont seulement deux, c’est moi et mon fils”. (Soucca 45b)

De nouveau, nous trouvons cette suprême confiance en soi, qui frôle (hasse véshalom) l’arrogance. Il semble étrange que le mérite d’un tel homme puisse rendre inutile l’apparition de l’arc-en-ciel dans sa génération.

ANTI-ROMAIN

La clef qui va nous permettre de comprendre, à la fois ce comportement en apparence peu modeste et la symbolique de l’arc-en-ciel, se trouve dans l'un des passages talmudiques les plus connus concernant Rashbi.


Rabbi Yehouda, Rabbi Yossi et Rabbi Shimone étaient assis, et Yehouda, un fils de prosélytes, était assis près d’eux. Rabbi Yehouda commença [la discussion] en faisant remarquer : "Comme sont agréables les œuvres de ce peuple (les Romains)! Ils ont construit des rues, ils ont construit des ponts, ils ont érigé des bains". Rabbi Yossi est resté silencieux. Rabbi Shimone bar Yo'haï répondit et dit: "Tout ce qu’ils ont fait, ils l’ont fait pour eux-mêmes; ils ont construit des marchés, pour y installer des prostituées; des bains, pour leurs plaisirs; des ponts, pour prélever des taxes". Alors, Yehouda le fils de prosélytes alla et rapporta leurs propos, qui arrivèrent aux oreilles du gouvernement. Celui-ci décréta : "Yehouda, qui [nous] a fait des louanges, sera loué, Yossi, qui est resté silencieux, sera exilé à Sepphoris, Shimone, qui nous a censurés, qu’il soit exécuté”. (Shabbat 33b)

Le passage commence par la description de la profonde hostilité que Rashbi avait envers les Romains. Compte tenu des persécutions meurtrières de Hadrien, ceci est certainement compréhensible. Il n’en reste pas moins que la réponse de Rashbi transcende les sentiments personnels, et se veut être une mise en garde contre les séductions de Rome. Le Talmud raconte comment les autres sages ont "accepté" l’occupation romaine, et sont même parvenus à apprécier la contribution romaine à l’infrastructure de la Judée. Rashbi, par contre, refusa d’être séduit par la beauté des édifices romains.

C'est la suite du texte qui va nous intéresser :


Lui et son fils allèrent se cacher dans le Beth HaMidrash, chaque jour sa femme leur apporta du pain et une carafe d’eau, et ils dînèrent. [Mais] quand le décret devint plus sévère, il dit à son fils, "la Femme est fragile : elle peut être torturée et nous dénoncer”. Alors, ils allèrent se cacher dans une grotte. Un miracle se produisit : un caroubier et un puits furent créés pour eux. Ils se sont dévêtus et s’installèrent dans le sable jusqu’au cou. Toute la journée, ils étudiaient; quand le temps de la prière arrivait, ils s’habillaient, priaient, puis se dévêtissaient à nouveau pour ne pas user leurs vêtements. Ainsi, ils résidèrent douze ans dans la grotte. (Shabbat 33b)


Maintenant, face à la menace romaine, Rashbi se replie dans une grotte, avec son fils Rabbi Eliézer. Les deux étudièrent jour et nuit pendant douze ans, dans un contexte qui nous rappelle le Jardin d’Eden : l’arbre, le ruisseau, la nudité, tous des symboles de la pureté et de la beauté de l’homme à son apogée, juste avant La faute. Les deux étudiaient et s’élevaient de niveau en niveau dans la connaissance et la crainte de D.ieu.

QUITTANT LA GROTTE


Après quelques temps, Eliyahou se mit debout à la porte de la grotte et les invita à la quitter.


Et Eliyahou vint et se mit debout à la porte de la grotte et s’exclama : "Qui informera le fils de Yo'haï que l’empereur est mort et son décret annulé?" Ainsi, ils sortirent. Voyant un homme labourant et ensemençant son champ, ils s’exclamèrent, "Ils abandonnent la vie éternelle, et s’engagent dans la vie temporaire!" Tout endroit sur lequel ils [Rashbi et son fils] posaient leurs yeux, était immédiatement brûlé. (Shabbat 33b)


Quitter leur grotte, était une chose éprouvante et difficile pour Rashbi et Rabbi Eliézer. De toute évidence, voir des personnes partiellement vertueuses, et non totalement immergées dans la Torah, était un traumatisme pour Rashbi et par conséquent, pour le monde tout entier.

Sur ce, une voix céleste proclama tout fort, "êtes-vous sortis pour détruire mon monde : retournez dans votre grotte!" (Shabbat 33b)

D.ieu voulait protéger le monde de ce Grand Homme. Après réflexion, la décision de les renvoyer à la grotte semble étrange : toutes ces années passées dans la grotte avaient déformé leur vision du monde. Il aurait été sans doute plus indiqué de les envoyer n’importe où ailleurs, mais pas dans la grotte!

Toutefois, en quittant la grotte une seconde fois, une année plus tard, quelque chose d’intéressant se produit : Rashbi est en fait guéri, alors que son fils Rabbi Eliézer continue à lancer du feu. Ce n’est que plus tard que ce dernier se calme également.


Ainsi, ils retournèrent et résidèrent dans la grotte douze mois, et ils dirent : "la punition du méchant dans le Guéhinam, (enfer) est de douze mois”. Une voix céleste s’éleva et dit : "Sortez de votre grotte!" Ils sortirent : là où Rabbi Eliézer était blessé, Rabbi Shimone était guéri. Il lui dit alors : "Mon fils! Toi et moi sommes suffisants pour le monde”. La veille de Shabbat, avant le coucher du soleil, ils virent un vieil homme, tenant deux grappes de myrte, et courant au crépuscule. "C’est pourquoi faire, celles-là?" lui demandèrent-ils. "Elles sont en l’honneur du Shabbat", répondit-il. "Mais une seule devrait te suffire”. [Il répondit :] "Une pour Zakhor (souviens-toi), et une pour Shamor (observe)". Rashbi dit à son fils, regarde combien sont précieux les commandements pour Israël”. Son esprit était tranquillisé. (Shabbat 33b)


De toute évidence, le retour dans la grotte a eu un effet apaisant et a servi d’élan à la réhabilitation de Rashbi. Rétrospectivement, le problème n’était pas qu’ils avaient passé trop de temps dans la grotte, mais en fait, pas assez.

LES ELEVES DE HILLEL

Afin de comprendre cette idée, nous avons besoin d'étudier un autre passage, qui nous parle d’autres grands Rabbins, les élèves de Hillel.

Nos sages ont enseigné : "Hillel Hazaken (l’Ancien) avait 80 disciples, 30 méritaient de voir reposer sur eux l’Esprit Divin, comme [c’était le cas] pour Moshé notre Maître, 30 méritaient de voir le soleil se figer pour eux comme ce fut le cas pour Yéhoshoua Bin Noun, 20 étaient moyens. Le plus grand parmi eux était Yonatan ben Ouziel, le plus ‘petit’ parmi eux, était Yo'hanan ben Zakkaï.


On dit de rabbi Yo'hanan Ben Zakkaï qu'il n'a jamais laissé (non étudié) l’Ecriture, la Mishna, la Guemara, la Halakha, la Agada, les précisions de la Torah, les détails des Scribes, les déductions, les analogies, l’étude du calendrier et les calculs numériques, les discussions des Anges, les discussions des démons, et le langage des palmiers (Rashi mentionne, je ne sais pas de quoi il s’agit!), les paraboles des teinturiers (les expressions des corps de métiers!), et les paraboles de renard, les grandes questions ou les petites questions... pour accomplir ce qui est dit, (Mishlé.8) 'Pour faire hériter ceux qui m’aiment, et remplir leurs coffres-forts'. Et si le plus petit d'entre eux était si grand, combien donc était le plus grand? Ils ont dit de Yonatan Ben Ouziel que quand il s’asseyait et étudiait la Torah, tout oiseau qui volait au-dessus de sa tête, était immédiatement brûlé. "(Soucca 28a)

Le "moins bon" élève de Hillel possédait un champ de connaissance éblouissant, dont l’étendue est difficile à imaginer. Après avoir décrit la connaissance et la prouesse intellectuelle de Rabbi Yo'hanan ben Zakkaï, on ne peut que s’émerveiller du niveau du meilleur élève, Rabbi Yonatan ben Ouziel, qui dégageait une telle intensité en Torah, qu’un oiseau qui le survolait était immédiatement brûlé.

CONTE HASSIDIQUE

Ce passage a un intéressant post-scriptum qu’on raconte dans les cercles Hassidiques :

Une fois, un Rébbé Hassidique enseignait le passage ci-dessus à son fils. Le fils posa une question : si le plus petit des élèves possédait une telle connaissance, et que le meilleur élève avait la capacité de brûler, quel pouvait être le niveau du maître? Le fils contemplait son père, essayant de discerner la quintessence d'un Rébbé. Le Rébbé lui répondit que Hillel Hazaken était à un niveau tellement haut que lorsqu’un oiseau le survolait, rien ne se passait; il restait indemne. C'est le secret suprême d'un enseignant. Les étudiants sont souvent animés de passion. Le secret d'un maître, c’est la capacité de maîtriser la passion, de contrôler le feu.

Quand Rashbi quitte la grotte la première fois, il est encore un étudiant - plein de passion, mais toujours un étudiant. Le monde est noir et blanc à ses yeux : ou l’Homme est complètement et constamment impliqué dans la Torah, ou il gaspille sa vie et est incapable de justifier son existence. Alors, la voix céleste déclare que Rashbi doit apprendre davantage. Il doit subir la métamorphose de l'étudiant en enseignant, du mystique isolé en Tsadik du monde, et prêt à tout faire pour le sauver. Il doit apprendre comment contrôler son pouvoir, sa puissance. Il doit devenir comme Hillel - quand les oiseaux le survolent, ils restent indemnes.

QUERELLE AVEC UN ANGE

Cette métamorphose est perceptible dans un passage étonnant du zohar :


Une fois sorti, Rabbi Shimone bar Yo'haï a vu que le monde était sombre et nuageux et que toutes les lumières étaient éteintes, il dit à son fils Rabbi Eliézer : "Allons voir ce que D.ieu a prévu pour le monde”. Ils sont allés et ont vu un ange qui ressemblait à une grande montagne, avec trente grandes torches de feu dans sa bouche. Rabbi Shimone dit : "que projettes-tu de faire?" Il répondit: "je suis venu pour détruire le monde, parce qu'il n'y a pas trente Justes dans cette génération, comme D.ieu l’avait (ainsi) décrété à Avraham”. Rabbi Shimone lui dit : "je t’ordonne d’aller devant D.ieu et de Lui dire : "Bar Yo'haï est dans le monde".
L'ange alla devant D.ieu et dit : "Maître de l'univers, Tu sais ce que Bar Yo'haï m'a dit". D.ieu dit alors, "Va détruire le monde et ignore Bar Yo'haï". Quand il (l'ange) retourna, Rabbi Shimone vit l’ange et dit, "si tu ne pars pas, je décréterai sur toi que tu ne puisses plus retourner au ciel, mieux encore, tu seras à la place de Aza et Azael (l'Enfer). Va vers D.ieu et dis-lui : 's'il n'y a pas trente justes, alors vingt devrait suffire... si vingt ne suffisent pas, alors dix devraient suffire... si dix ne suffisent pas, alors deux devraient suffire, et il y a mon fils et moi... et si deux ne suffisent pas, alors, un devrait suffire, et c'est moi (!), comme il est dit : 'un homme juste est la fondation du monde'. "À ce moment, une voix s’éleva du ciel et dit, "Chanceuse est ta part Rabbi Shimone, car D.ieu décrète en haut, et tu annules en bas. Certainement c’est à propos de toi qu’est écrit le verset, ‘la volonté de ceux qui le craignent est exaucée”. (zohar Addenda page 205 - la place appropriée doit être 105b)

La réponse de Rashbi semble être la déclaration la plus arrogante qui soit : "je t’ordonne d’aller devant D.ieu et de Lui dire 'Bar Yo'haï est dans le monde'“. Cependant, en tenant compte du passage précédent du Talmud, nous pouvons comprendre cette déclaration et commencer à mesurer la grandeur de Rashbi : quand il a quitté la grotte la première fois, il voulait détruire tout mal. L'incohérence ne peut être tolérée. Après avoir passé douze ans dans une grotte, tout ce qu'il savait, c’était l’étude, la perfection. Tout celui qui n’étudie pas, devrait périr. Le pouvoir de Torah s’est développé dans son être et s’est ensuite transformé en ne force incontrôlable pouvant même devenir dévastatrice. Il y avait un seul problème : D.ieu n'approuvait pas les actions de Rashbi.

D.ieu ne permettrait pas que l’on détruise le monde. "Retourne dans la grotte," lui dit D.ieu. "Apprends encore une leçon”. Quand lui et son fils ont quitté la grotte la deuxième fois, la réaction face à un vieil homme tenant du myrte prouve qu'une leçon supplémentaire avait été acquise.

COMME UN ARC-EN-CIEL

Le monde n'est pas "noir et blanc", il est plutôt composé de nuances, comme l'arc-en-ciel. D.ieu a enseigné cette leçon phénoménale à Rashbi : le monde attend la rédemption. D.ieu ne veut pas d’un Tsadik qui se situe au-dessus des autres, qui juge catégoriquement et qui condamne à mort le fauteur sans appel. Il veut plutôt un Tsadik qui prend la responsabilité de sa génération, et en fait, du monde entier.

Quand Rashbi affronte l'ange de destruction, il dit à l'ange "je t'ordonne d’aller devant D.ieu et de Lui dire : Bar Yo'haï est dans le monde", le même Bar Yo'haï à qui D.ieu n’avait pas permis de détruire le monde, même une petite partie de ce monde (lorsqu'il avait quitté la grotte). D.ieu ne désire pas voir le monde détruit. D.ieu désire voir les justes prendre la responsabilité de leurs semblables et aider l'Homme et le monde à atteindre leur potentiel.

Dans ce deuxième passage, Rabbi Shimone prend la responsabilité du monde. L'existence d’un seul Tsadik peut sauver le monde, pourvu que le Tsadik sache comment influencer le monde sans le brûler. Manifestement, Rashbi a senti qu’au jour du jugement, il serait capable d'employer cette logique pour disculper le monde de toute culpabilité. Lorsqu’il affirme à plusieurs reprises : “s’il n'y a qu'un juste alors c’est moi”, il ne met pas en avant ses qualités, mais son rôle. Ce n'est pas de l'arrogance, c'est une plaidoirie pour le maintien du monde. Il dit à D.ieu, “s’il n'y a qu'un avocat alors c’est moi”. Je suis celui que Tu as renvoyé dans la grotte pour que ton monde ne soit pas détruit, malgré ses imperfections. Alors pardonne leur, ne détruis pas ce monde.

Quand le pouvoir de sa Torah est maîtrisé, le vrai Tsadik ne brûle pas la chose; mieux encore, il trouve une parfaite harmonie avec toute la nature. Toutes ces nuances de gris peuvent et deviennent plus atténuées par le travail du Tsadik. Le monde n'est pas mauvais, il doit simplement être élevé. Le Tsadik peut être ce catalyseur et aider le monde à réaliser son potentiel. Un tel monde sera pardonné.

Rashbi n'a pas eu besoin d'un arc-en-ciel là haut dans les cieux, pour se rappeler la promesse de D.ieu et sa propre mission; il a vu un arc-en-ciel ici bas, sur Terre. Noa'h a eu besoin d'un arc-en-ciel. Mais certaines générations possèdent de grandes âmes ayant le pouvoir de racheter le monde, rendant l'apparition de l'arc-en-ciel totalement inutile. Rashbi était un tel Homme.



A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Ari KAHN
Le rabbin Ari Kahn, un disciple de Rav Yossef Dov Soloveitchik, est diplômé de la Yeshiva University. Il se consacre actuellement à l’enseignement à Aish HaTora ainsi qu’à l’Université Bar Ilan, où il est Directeur des programmes pour étudiants étrangers. Il donne fréquemment des conférences aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Afrique du Sud pour le compte de cette université et d’Aish HaTora.
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