Un dialogue
mystérieux entre D.ieu et Moïse nous donne des indications sur les “Voies
divines”. Une connaissance mystique profonde qui enrichit notre compréhension
de la Torah, nous est ainsi révélée.
Avant d’étudier le reste des dix Séfirot, je voudrais
dans cet article et dans le prochain approfondir les sources de la Kabbale,
la manière dont elle s’est développée au cours du
temps et les raisons de son “mystère”.
Une des causes pour laquelle
la tradition mystique du Judaïsme est appelée Kabbale (c’est-à-dire “reçu”) est afin de souligner
que cette compréhension mystique de la Torah doit être reçue.
Les éléments de la Kabbale furent révélés par D.ieu en même temps que le reste de la Torah et puis transmis d’initié a initié, à l’encontre des autres aspects de la Tradition Orale qui nécessite une interprétation.
Si l’on explique un certain aspect de la Torah ou de la Loi juive d’un point de vue rationnel (opposé à une perspective mystique), il n’est pas besoin de se référer à une source directe. Il suffit que l’interprétation soit conforme à l’esprit de la Torah et ait un sens dans le contexte donné. Elle doit également être confirmée dans d’autres endroits du texte.
En ce qui concerne la Kabbale,
la possibilité de proposer une telle interprétation qui soit “nouvelle” ou “originale” est
des plus limitées. Car on a affaire à une discipline dont les rincipes ont été dévoilés par D.ieu à l’homme, à la
manière dont toute la Torah fut révélée et puis
transmise de personne en personne tout au long de sa route.
Examinons certaines des étapes qui ont jalonné jusqu’à nos
jours la révélation de la Kabbale.
Dialogue mystérieux
C’est dans la Torah elle-même qu’on trouve le premier jalon.
Dans le Livre de l’Exode (33, 18-23), figure un très mystérieux
dialogue entre D.ieu et Moïse.
Moïse reprit: “Découvre-moi
donc Ta gloire.”
Il (D.ieu) répondit: “C’est ma bonté tout entière
que Je veux dérouler à ta vue et Je proclamerai le nom de l’Eternel
devant toi; alors Je ferai grâce à qui Je ferai grâce, et
Je serai miséricordieux pour qui Je devrai l’être.” Il
(D.ieu) ajouta: “Tu ne saurais voir Ma face; car nul homme ne peut me
voir et vivre.” Le Seigneur ajouta: “Il est une place près
de Moi: tu te tiendras sur le rocher ; puis quand passera Ma gloire, Je te
cacherai dans la cavité du roc, et Je t’abriterai de Ma main jusqu’à ce
que Je sois passé. Alors Je retirerai Ma main , et tu Me verras par
derrière; mais Ma face ne peut être vue.”
Aussi ésotérique et peu clair que soit ce dialogue, on peut
en déduire quelques points très importants.
Il faut tout d’abord tenir compte du fait que cet entretien a eu lieu
très peu de temps après le don de la Torah. Moïse l’a
reçue dans son intégralité, et rien n’y manquait.
(Voir Maimonide, “Les bases de la Torah” 9,1) Aussi, que réclamait
Moïse de plus de la part de D.ieu?
En fait, il ne demandait
pas d’avoir une nouvelle Torah mais suppliait
que sa compréhension de la révélation qui lui avait déjà été faite,
acquière de la profondeur. Sa demande nous montre qu’il nous a été retiré une
partie de notre faculté d’appréhender la Torah et que de
l’avoir telle qu’elle a été transmise à Moïse
sur le mont Sinaï, ne garantit pas qu’on puisse la saisir dans toute
sa profondeur.
La réponse que lui fait D.ieu nous indique que la nature de cette profonde compréhension ne concerne pas D.ieu à proprement parler mais
Son interaction avec notre monde.
Selon l’explication de nos Sages, Moïse désirait comprendre
la raison ultime de “Pourquoi le juste souffre et le méchant prospère.” La
réponse de D.ieu, “Je serai miséricordieux pour qui Je
devrai l’être”, montre que c’est justement le sens
de la question de Moïse. La manière dont D.ieu dirige le monde - Ses
desseins et Ses mœurs - constitue la substance de cette connaissance
profonde recherchée par Moïse.
D.ieu a limité le niveau de compréhension de l’homme.
Certains (habitués aux effets spéciaux du cinéma hollywoodien)
s’imaginent que “nul homme ne peut voir D.ieu et vivre” à cause
de la lumière aveuglante et du son retentissant! Ce verset n’a
rien à voir avec une conscience physique de D.ieu. D’après
nos Sages, son interprétation correcte est la suivante: “Nul homme
ne peut comprendre totalement D.ieu et vivre.” L’homme - aussi
raffiné soit-il - demeure un être physique ainsi que, pratiquement,
la majeure partie de son entendement. Cela l’empêche de saisir
les choses qui sont, à un certain degré, intégralement
métaphysiques.
Et c’est ce que veut
dire : “et tu Me verras par derrière”.
De même que quand on fait face à une personne, on saisit pleinement
ce qu’elle dit et ce qu’elle fait, de même le fait de se
trouver devant D.ieu “face à face”, signifie qu’on
peut comprendre parfaitement les voies divines. L’homme ne peut pas le
faire. On ne peut voir D.ieu que par derrière - c’est-à-dire
avoir une idée de ce qu’Il fait mais sans clarté absolue.
“Le nom de l’Eternel” donne
accès à cette
compréhension. C’est pourquoi, pour D.ieu, cette révélation
se fait au moyen de “la proclamation du nom de l’Eternel devant
Lui”.
En fait, les différents noms de D.ieu qui constituent le cœur
de la Kabbale ne sont pas des mots imprononçables et gutturaux, capables
de bouleverser l’univers mais plutôt décrivent certains
aspects de l’interaction de D.ieu avec l’homme.
Ainsi, quand Moïse demande de percer plus profondément les mystérieux
desseins divins, c’est la révélation de Son nom qui en
est le chemin primordial.
Bien que située au-delà de notre capacité de compréhension,
la bonté est la connaissance de D.ieu la plus explicite qui ait pu être
atteinte à ce moment précis.
Considérons cela dans le contexte des événements qui
ont accompagné ce dialogue énigmatique.
En raison du grave péché du Veau d’Or qu’ils ont
commis, le châtiment que les enfants d’Israël méritent,
est d’être complètement anéantis. Moïse n’arrive
pas à énoncer la prière qui pourrait améliorer
la situation. Par conséquent, il demande à D.ieu de lui révéler
Sa bonté extrême qui permettrait d’ajourner et de réviser
le décret. Car la gravité de leur faute était si grande
qu’elle exigeait un niveau extraordinaire de miséricorde. Ce niveau
n’était pas encore dévoilé jusqu’ici, aussi
personne ne pouvait revendiquer sa mise en application.
D.ieu a donc révélé “Sa bonté toute entière” devant
lui. De la sorte, cela donna à Moïse (et à nous aujourd’hui)
la possibilité d’implorer D.ieu - de faire appel aux treize
attributs de Sa prodigieuse bienveillance.
Ces “Treize Attributs” (mentionnés dans les versets 34,
6-7 du Livre de l’Exode) forment la base de nos prières le Jour
du Grand Pardon (Kippour), les jours de jeûne et à l’occasion
de prières solennelles spéciales.
Les comprendre est un autre
aspect important de la connaissance cabalistique et de son enseignement ainsi
que nous l’expliquerons dans les futurs
articles de cette série.
Traduction et Adaptation
de Claude Krasetzki