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Les 13 articles de foi - article 7

C’est le caractère unique de l’expérience du Sinaï qui différencie la religion juive de toutes les autres.

D’après une série de conférences prononcées par le Rabbin Ya‘aqov Weinberg, de mémoire bénie.

" Nous croyons que [Moché rabbènou] a été le père de tous les prophètes, d’avant et d’après lui, tous étant au-dessous de lui quant à leur stature. Il a été choisi parmi toute l’humanité, et a réalisé une plus grande connaissance du Tout-puissant que quiconque l’ayant précédé ou lui ayant succédé. Moché rabbènou a atteint un niveau qui surpasse ce que peut réaliser l’être humain et se rapproche de celui des anges. Il n’y avait pas de barrière qu’il ne pût franchir, pas de limitation physique qui pût le gêner, et pas d’imperfection grande ou petite [qui fût apte à l’entraver]. Dans la réalisation de ce [niveau], il a perdu ses facultés sensuelles et imaginatives ; ses pulsions et ses désirs ont cessé, laissant seulement son pur intellect. On a pu en dire que Moïse communiquait avec D.ieu sans aucun intermédiaire angélique. "

Les 13 articles de foi de Maïmonide

 

LA TORAH EST IMMUABLE

 

Ce principe, dans son essence, établit le fait que la Torah ne peut pas être changée. Pour que l’homme puisse servir D.ieu, il est nécessaire de connaître Sa Volonté en des termes absolus et immuables, et de la reconnaître comme telle. Toute possibilité de modification créera pour l’homme la tentation d’injecter ses propres valeurs. Quand existe une telle possibilité, ce sont les priorités de l’homme et ses convenances qui dominent, faisant de lui son propre serviteur et non plus celui de son Créateur.

Fort heureusement, l’autorité de la Torah elle-même empêche l’homme de la falsifier. Les circonstances inégalées et le contenu de la prophétie de Moché rabbènou, Moïse notre Maître, en même temps que la révélation historiquement unique de la Torah sur le Sinaï, fournissent une base à cette autorité. Une des lois que Moïse y a révélées déclare que rien ne pourra jamais être ajouté ou soustrait de la Torah donnée par D.ieu, mot pour mot, à Moché rabbènou (Deutéronome 13, 1). Même un prophète ne peut revendiquer le droit d’innover en quoi que ce soit par rapport à la Torah. Il ne pourra jamais transmettre un message authentique de D.ieu proposant la modification d’aucun détail contenu dans celle-ci.

 

LE PÈRE DES PROPHÈTES

 

Pour mieux comprendre les limitations auxquelles ont été soumis les autres prophètes, nous devons apprécier la différence entre leurs révélations et celles de Moché rabbènou. Le Rambam commence l’énoncé de ce principe en affirmant que « Moché rabbènou a été le père de tous les prophètes, d’avant et d’après lui ». Que veut-il dire ? Comment Moïse peut-il être le « père » d’Abraham, qui a pourtant vécu des centaines d’années avant lui ?

Moïse est la source de l’autorité pour toute prophétie.

Bien que le Rambam donne des détails sur les diverses différences qui séparent les prophéties de Moché rabbènou de celles des autres prophètes, ces différences ne sont pas l’essentiel du principe. Ce que chaque Juif doit retenir, c’est que Moché rabbènou est « le père de tous les prophètes », ce qui signifie qu’il est la source de l’autorité contenue dans toute prophétie.

 

UNE REVELATION A TOUT UN PEUPLE

 

On ne peut comprendre le Rambam qu’à la lumière du caractère unique de l’expérience du Sinaï, qui différencie la religion juive de toutes les autres. Toutes les religions du monde, à l’exception du judaïsme, ont ceci en commun qu’elles exigent que l’on fasse abandon de toute indépendance d’esprit et que l’on se précipite pour adhérer à leurs croyances. Si l’on raisonne en faisant appel à son esprit critique, on risque d’en venir à les rejeter. Car toutes les religions inventées par les hommes sont dépendantes du témoignage de quelques individus tout au plus. En termes de recherche de la vérité, une telle preuve est loin d’être satisfaisante. La littérature de ces religions décrit fréquemment un saut dans la foi, une façon courtoise de soutenir que l’on ne peut progresser qu’en faisant abstraction de ses facultés critiques et intellectuelles.

La différence entre les révélations et les principaux prophètes de ces religions et ceux du judaïsme peut être illustrée par une histoire que les Juifs se sont racontée pendant des centaines d’années :

Un grand rebbe était mort, laissant ses deux fils comme héritiers, mais sans avoir désigné celui qui lui succéderait à la tête de la communauté. Celle-ci était elle-même divisée quant au choix à opérer. Certains de ses membres marquaient leur préférence pour l’un, tandis que d’autres étaient sûrs que l’autre fils serait le meilleur rebbe. Après des semaines, le conflit est arrivé à un point mort, les anciens de la communauté ne parvenant pas à se décider quant au choix de leur nouveau rebbe.

C’est alors que l’un des fils se présenta un jour devant le Conseil des Anciens, auquel il raconta une histoire étonnante : Son père, le rebbe, lui était apparu la nuit précédente dans un rêve lui demandant de transmettre aux Anciens son ordre de faire de lui leur nouveau rebbe.

En entendant ce récit, un profond silence s’est abattu sur le Conseil. Ce nouveau développement allait-il permettre de mettre un terme au débat qui occupait depuis si longtemps les esprits de la communauté ? Allait-il satisfaire enfin leur attente ?

Alors que l’incertitude grandissait, un petit vieillard qui était assis dans un coin, amusé par ce qu’il avait entendu, proposa calmement une solution au problème : " Jeune homme, si votre père, le rebbe, avait voulu que vous soyez le nouveau chef de notre communauté, il serait apparu dans nos rêves à nous, pas dans les vôtres ! "

Si D.ieu avait voulu nommer un prophète pour communiquer Sa Volonté à un peuple, Il aurait révélé directement à ce peuple Son désir que cet individu soit Son prophète.

De la même manière, il est logique que si D.ieu avait voulu nommer un prophète pour communiquer Sa Volonté à un peuple, Il ne l’aurait pas révélé à ce prophète seul, en lui demandant de dire à ce peuple qu’il avait été choisi par D.ieu comme leur prophète. Il aurait révélé directement à ce peuple Son désir que cet individu soit Son prophète.

De toutes les religions qui se sont succédé à travers l’histoire, il n’en existe qu’une où cette situation est arrivée.

Quand Il a donné la Torah sur le mont Sinaï, c’est à tout un peuple que D.ieu est apparu. La révélation au Sinaï n’a été transmise ni à un individu, ni à un groupe choisi d’individus, mais à toute une nation – hommes, femmes et enfants. Le Tout-puissant, en quelque sorte, s’est adressé à l’homme :

" Car interroge donc les premiers jours, qui ont été avant toi, depuis le jour où Dieu a créé l’homme sur la terre, et d’une extrémité du ciel et jusqu’à l’extrémité du ciel : y a-t-il eu comme cette grande chose-là, ou a-t-on entendu comme elle ? Un peuple a-t-il entendu la voix de Dieu… ? " (Deutéronome 4, 32 et 33).

Si l’on parcourt les étapes de l’histoire, on constate que l’épisode du Sinaï a été unique et ne s’est jamais répété. Et non seulement il ne s’est pas renouvelé, mais personne n’a jamais essayé de recomposer un tel récit. On ne l’a jamais tenté parce qu’il est impossible de reconstituer une histoire de cette nature. Si nous examinons la littérature du monde, nous nous apercevons que chaque épisode historique comporte des analogies dans les diverses cultures. Il est évident qu’une telle épopée, dont le souvenir a marqué les esprits et les imaginations de tant de personnes, qui a marqué si profondément les trois grandes religions, aurait été imitée si cela avait été possible. Mais de même que le fils de rebbe n’a pas pu dire aux Anciens que c’est à eux que son père était apparu dans un rêve, l’humanité n’a jamais osé dire que D.ieu S’était révélé à d’autres qu’aux enfants d’Israël. S’il avait été possible d’inventer une telle histoire, elle aurait nécessairement été imitée à de multiples reprises.

 

NUL BESOIN DE FAIRE UN SAUT DANS LA FOI

 

Les enfants d’Israël ont non seulement cru en D.ieu, mais ils L’ont également connu et en on fait l’expérience. C’est pourquoi, en présence d’une telle évidence objective – le témoignage de trois millions de témoins oculaires – le judaïsme n’a pas besoin d’exiger un « saut dans la foi ». De même que le Tout-puissant nous a donné des cœurs et des émotions à utiliser à Son service, Il nous a également donné des moyens de réfléchir. On n’attend pas de celui qui effectue un « saut dans la foi » qu’il se serve de son intellect pour servir D.ieu ; on lui demande seulement de " posséder la foi ".
De la même manière, Moché rabbènou est, à travers l’histoire, le seul prophète dont l’authenticité a été certifiée publiquement par D.ieu Lui-même. Il est le seul prophète à avoir été désigné en présence d’un peuple entier. Il est le seul prophète à avoir été connu comme tel par ses disciples, et non accepté d’une « foi aveugle ». La crédibilité des autres prophètes, après lui, ne leur a été acquise que par son autorité. La validité de leurs prophéties est basée sur la définition que Moïse a fournie aux enfants d’Israël, au nom de D.ieu, des conditions exigées pour leur acceptation comme tels.

C’est parce que la crédibilité d’un prophète est basée sur les critères révélés par Moché rabbènou, que Rambam parle de lui comme du " père de tous les prophètes ". Le monde entier ne sait, par exemple, qu’Isaïe était un prophète que parce qu’il a rempli toutes les conditions que Moché rabbènou avait communiquées aux enfants d’Israël, au nom de D.ieu, fixant le statut d’un prophète.

On peut donc dire de tous les prophètes qu’ils ne le sont que par le témoignage de Moché rabbènou, leur père à tous. Il serait absurde de prendre en considération les paroles de quelqu’un qui prétendrait être un prophète tout en contredisant quoi que ce soit dans la Torah, car il couperait la branche sur laquelle s’appuierait sa propre crédibilité supposée.

Disons pour conclure que l’essence de ce principe est que la conscience de l’unicité de la révélation par Moché rabbènou traduit dans la loi et dans son exécution que la Torah ne peut pas être modifiée et qu’elle ne le sera jamais.

 

LES DIFFERENTES SORTES DE PROPHETIE

 

Le sixième article de foi déclare que la Torah est, mot pour mot, la parole du Tout-puissant. Les autres prophéties, en revanche, sont transmises à leur interprète par une image mentale, dont il est autorisé à donner une interprétation précise et qu’il est chargé de transmettre. La Torah déclare explicitement qu’il existe des différences spécifiques entre les prophéties de Moché rabbènou et celles de tous les autres prophètes. Ce sont ces différences qui distinguent la Torah des livres des Prophètes.

Pour comprendre ces différences, il est important de noter que la Torah inclut non seulement la prophétie de Moché rabbènou, mais celle transmise au Mont Sinaï au peuple juif tout entier. Au moment où a eu lieu la Révélation, le peuple juif a atteint un niveau de prophétie comparable à celui de Moché rabbènou.

C’est tout le peuple qui a entendu :

" Je suis D.ieu, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison d’esclaves " (Exode 20, 3).

Chacun des membres de la nation d’Israël a entendu ces paroles et a participé au début de la prophétie qui allait s’adresser à Moché rabbènou. Aucun des autres prophètes n’a connu pareille expérience. Aucun autre prophète que Moché rabbènou n’a entendu, mot pour mot, directement du Tout-puissant, la prophétie qu’il a transmise. Chaque mot, depuis : « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre » (Genèse 1, 1), jusqu’à : " … et pour toute la main forte, et pour toute la grande terreur, qu’a réalisées Moïse aux yeux de tout Israël " (Deutéronome 34, 12), est parole de D.ieu. Moché rabbènou n’en a été que le transcripteur, l’instrument par lequel ces paroles nous sont parvenues.

Les Sages nous enseignent : " Deux prophètes n’ont jamais le même style " (Sanhédrin 89a). On peut parler du " style " des prophètes parce qu’ils ont eux-mêmes couché par écrit les pensées qui leur avaient été communiquées lors de leurs visions. Bien que ces visions aient inclus une interprétation, ce qui a été écrit l’a été par les prophètes, sous la garantie du Tout-puissant que cette interprétation était authentique.

Une prophétie qui se transmet mot pour mot ne peut se comparer à une prophétie qui communique des concepts et des pensées. C’est cette différence que la Torah elle-même met en évidence quand elle atteste de l’unicité de Moïse en tant que prophète :

" Et il ne s’est plus levé de prophète en Israël comme Moïse, que D.ieu a connu face à face " (Deutéronome 34, 10).

 

QUELQUES DIFFERENCES

 

Le Rambam énumère dans l’énoncé de cet article de foi quelques-unes des caractéristiques essentielles qui créent la spécificité de la prophétie de Moché rabbènou :

(1) Tous les prophètes [autres que Moïse] n’ont reçu la prophétie que pendant leur sommeil, comme il est écrit à plusieurs reprises : « dans un rêve de nuit » (Genèse 31, 24), ou : " dans un songe, dans une vision de nuit " (Job 33, 15), et dans beaucoup d’autres endroits. Parfois aussi, [l’expérience de la prophétie avait lieu] pendant le jour, après [que le prophète] était tombé dans une transe profonde, de sorte tous ses sens étaient paralysés et ses pensées demeuraient libres, comme dans un rêve. C’est ce qui est appelé une " vision " ou une " révélation ", comme il est écrit : " dans les révélations de D.ieu " (Ezéchiel 8, 3).
[En revanche, s’agissant de] Moïse, la parole du Tout-puissant lui a été communiquée pendant le jour, alors qu’il se tenait debout entre les deux chérubins, ainsi que D.ieu en a attesté :

" Je te rencontrerai là, et te parlerai de sur le propitiatoire, d’entre les deux chérubins qui sont sur l’arche du témoignage… " (Exode 25, 22),

et comme il est écrit :

" … S’il est votre prophète, Moi, D.ieu, Je me ferai connaître à lui dans une vision, dans un rêve Je parlerai avec lui. Mon serviteur Moïse n’est pas ainsi, il est fidèle dans toute Ma maison. De bouche à bouche je lui parle… " (Nombres 12, 6-8).

(2) Quand un prophète reçoit une prophétie, bien que ce soit par une vision et un intermédiaire, ses forces viennent à lui manquer, son corps se brise et une terreur accablante s’abat sur lui, de sorte que son âme l’abandonne presque... [mais concernant] Moïse, ce n’est pas ainsi : La parole de D.ieu lui est parvenue sans qu’il soit écrasé par la confusion ou quelque crainte que ce soit...

(3) Chez tous les prophètes, la révélation leur est apparue, non pas chaque fois qu’ils l’ont voulu, mais selon la volonté du Tout-puissant. Le prophète pouvait [donc] attendre longtemps sans recevoir de prophétie. Il pouvait demander au Tout-puissant de lui communiquer par la prophétie un message spécifique et attendre des jours et des mois jusqu’à ce qu’il le reçoive, comme il pouvait ne jamais le recevoir du tout. Beaucoup parmi les prophètes se sont préparés et ont épuré leurs pensées, comme l’a fait Elisée, comme il est écrit : " Et maintenant amenez-moi un joueur de harpe ! " (II Rois 3, 15), et ce n’est qu’ensuite que la prophétie leur est parvenue. Mais ils ne recevaient pas nécessairement de prophétie chaque fois qu’ils s’y préparaient. Bien au contraire, toutes les fois que Moché rabbènou a désiré communiquer avec D.ieu, il a dit [aux enfants d’Israël] :

" Attendez et j’écouterai ce que D.ieu vous ordonnera " (Nombres 9, 8).

Le Rambam indique ici des différences significatives entre les prophéties de Moché rabbènou et celles de tous les autres prophètes. Sa supériorité prophétique comporte deux implications :

En premier lieu, l’homme lui-même a été vraiment plus grand que tous les autres prophètes, et tous lui sont secondaires. Moïse se contrôlait physiquement et émotionnellement pendant ses prophéties, tandis que les autres prophètes perdaient tous leur contrôle en présence de D.ieu. Leur fonctionnement physique était suspendu tant que durait leur transe prophétique. Ils devaient " abandonner leurs corps " pour permettre à leurs esprits et à leurs âmes de recevoir le message de D.ieu. Moché rabbènou, en revanche, était capable de fonctionner normalement et lucidement tout en se trouvant en présence du Tout-puissant. Il était capable d’entendre des paroles directement de D.ieu, tandis que tous les autres prophètes ne pouvaient recevoir Ses messages que dans une métaphore ou une énigme. Ils recevaient aussi, il est vrai, une interprétation de la métaphore, mais pas dans les paroles réelles de D.ieu. La supériorité prophétique de Moïse est, en soi, la raison pour laquelle ce qu’il a dit ne peut pas être contredit par aucun autre prophète.

C’est par l’étude de la Torah que l’homme peut le mieux acquérir une connaissance intime de D.ieu.

Deuxièmement, la prophétie de Moché rabbènou – qui a été authentifiée pendant un événement unique dans l’histoire : la révélation à tous les enfants d’Israël – cette prophétie est la Torah. La Torah contient les vérités absolues du Tout-puissant directement communiquées à l’homme. C’est donc par l’étude de la Torah que l’homme peut le mieux acquérir une connaissance intime de D.ieu.

La prophétie de tous les autres prophètes, au contraire, n’est pas la Torah. Elle n’est en effet authentifiée que par les critères établis par celle-ci. Cependant, puisque la révélation au Sinaï ne sera jamais répétée (voir le neuvième article de foi), une prophétie de ce type, pour toute l’humanité autre que la génération qui a été témoin du Sinaï, représente l’expérience religieuse suprême.

Une prophétie est le point culminant de toute une vie d’efforts pour se rapprocher de D.ieu. Dans la plupart des situations, ce fut un cadeau du Tout-puissant, accordé à un homme vertueux qui avait consacré toute son existence à s’y préparer et à en devenir digne. Dans certains cas, le don de prophétie a été accordé pour assurer la transmission d’un message à une partie ou à l’ensemble du peuple. Ces messages ont servi de source d’interprétation ou d’inspiration quant aux enseignements de la Torah, ils ont aussi projeté de la lumière sur les événements dominants de l’actualité, ou encore ont averti d’événements futurs. Ils n’ont cependant jamais apporté la moindre innovation à un quelconque commandement de la Torah.

 

DES CHANGEMENTS DANS LES COMMANDEMENTS ?

 

Un prophète n’a pas le droit d’innover ou de changer une loi de la Torah. C’est pourquoi le moyen le plus facile de découvrir un faux prophète consiste à examiner si le contenu de son message contredit ou non la Torah. Comment pourrait-on accepter une prophétie qui infirmerait la Torah, alors que, nous venons de le voir, celle du " père de tous les prophètes " a été unique, et n’a exigé aucun " saut dans la foi " ni aucune confiance dans un individu ?

La différence entre la prophétie de Moïse, la Torah, et les autres prophéties est basée sur ce septième article de foi, qui stipule que la Torah ne peut pas être changée. Comme dit plus haut, s’il était possible d’amender la Torah, il y aurait des " prophètes " cherchant à chaque instant à remplacer les révélations précédentes par les leurs propres. Par conséquent, il n’y aurait aucune façon de maintenir la Torah. Elle ne serait pas absolue.

On peut apprécier l’importance de ce principe en se demandant quel serait le premier commandement à être abrogé si une prophétie postérieure pouvait changer la Torah ? Serait-ce le Chabbath ou la cacherouth ? Les Sages, qui possédaient une compréhension profonde de la nature humaine, ont suggéré que ce sont les plus évidemment nécessaires pour maintenir les structures de la société qui seraient les premiers à être révisés. Non pas le Chabbath ni la cacherouth, mais le meurtre, le vol et l’adultère. Comment les Sages ont-ils subodoré que ce sont ces lois fondamentales-là qui seraient les plus vulnérables ?

Avant que la Torah ait été donnée aux enfants d’Israël, rapportent-ils (Sifri sur Deutéronome 33, 2), elle a été proposée à toutes les autres nations du monde. Chacune a voulu savoir exactement ce qui s’y trouvait. Quand elles ont entendu la réponse, donnée sous la forme d’un exemple de ce à quoi elles devaient s’attendre, elles ont refusé de l’accepter. En réalité, le seul fait de demander ce qui est écrit dans la Torah était déjà, en soi, un rejet de l’offre de D.ieu. Car lorsque ces nations se sont posé des questions sur le contenu de la Torah, elles ont stipulé déjà implicitement qu’elles ne l’accepteraient que si elle leur convenait. Elles n’avaient aucun amour pour D.ieu, aucun désir d’accomplir Sa Volonté. Leur mentalité était marquée exclusivement par l’égocentrisme et l’égoïsme. En tout cas, la Torah leur était incompatible, car diamétralement opposée à leur style de vie.

Mais quels commandements D.ieu leur a-t-il révélé ? Qu’est-ce qui leur a fait peur ? Il n’a parlé ni des lois du Chabbath ni de celles de la cacherouth, mais de celles qui interdisent le meurtre, le vol et l’adultère. Ce sont ces commandements-là, fondamentaux et essentiels pour l’humanité, que les nations ont rejetés. C’est sur ces commandements-là que l’attention de l’homme se porterait en premier s’il pouvait amender la Torah. Etant donné qu’ils sont la base de la société et qu’ils touchent la vie de l’homme de façon beaucoup plus sensible et essentielle, ce sont eux qu’il est le plus difficile de tenir pour absolus.

Et pourtant, ces lois ne sont-elles pas communes à tous les pays civilisés ? Existe-t-il une nation qui permette le meurtre, le vol ou l’adultère ? Pourquoi les nations du monde ont-elles rejeté l’offre de D.ieu, alors que ces lois faisaient déjà partie de leurs propres systèmes législatifs ?

 

CE QUI EST DONNE PAR D.IEU, ET CE QUI EST DONNE PAR L’HOMME

 

La réponse réside dans le fait qu’il existe une immense différence entre une loi donnée par D.ieu et une loi que l’homme s’impose à lui-même. Une loi donnée par D.ieu est absolue ; l’homme n’a pas le droit de l’interpréter selon sa convenance ni l’autorité pour le faire. En revanche, une loi d’origine humaine sert les besoins de la société. Les individus qui composent une société décident de s’abstenir de certains comportements afin de recevoir la protection que leur offre la loi. Par exemple, bien qu’un individu puisse être tenté de voler, il désire maîtriser cette pulsion en échange de la sécurité consistant à savoir que les autres ne pourront pas le dépouiller lui-même. Les lois humaines donnent à ceux qui les ont promulguées la liberté de décider quand n’importe laquelle devra s’appliquer ou non. Ces lois impliquent aussi une liberté potentiellement illimitée : Si l’on devient si fort et si puissant que l’on ne craint plus les autres, on peut décider d’en rejeter le fardeau. Même si l’homme n’atteindra jamais véritablement ce sentiment de sécurité, la simple conscience d’une telle liberté sert son intérêt personnel.

Une loi absolue, en revanche, ne peut pas être remodelée pour servir les besoins d’une société. On ne peut pas prétendre, par exemple, qu’une telle loi ne s’appliquera pas aux Juifs ou aux Noirs. Puisque ce n’est pas l’homme qui l’a créée, il n’en possède pas la maîtrise. Elle s’applique dans toutes les situations, dans toutes les sociétés et à tout moment. C’est ce caractère absolu de la Torah, quand elle a été offerte aux nations, qui a précipité leur refus. Elles ont compris que la Torah exigeaient qu’elles se soumettent à leur Créateur et, bien qu’elles devinassent qu’une vie guidée par la Torah de D.ieu leur offrît le meilleur mode de vie qui soit, elles n’ont pas pu renoncer à la liberté et à la commodité que leur procuraient une éthique relative.

Une Torah qui serait modifiable fournirait une éthique relative, et non absolue.

Une Torah qui serait modifiable fournirait une éthique relative, et non absolue. Avec une éthique relative, l’homme conserve le droit d’élaborer ses propres systèmes de valeurs. C’est ainsi que le meurtre d’un fœtus dans le ventre de sa mère, il n’y pas si longtemps, était considéré comme la chose la plus horrible qu’un médecin pût faire, et il lui valait la réprobation et la répulsion de ses confrères. La société le frappait d’ostracisme. Même si l’avortement était nécessaire pour préserver la santé de la mère, il valait mise à l’index de celui ou celle qui l’effectuait. Et pourtant, il n’a pas fallu plus d’un an pour que cette même intervention devienne aussi banale qu’une ablation des amygdales.
De tels changements dans les comportements se produisent avec une rapidité étonnante dans les sociétés établies sur une éthique relative. Il en serait de même si la Torah pouvait être modifiée. Une telle Torah n’aurait ni permanence, ni signification. En fait, elle ne serait pas une Torah du tout. Ce serait un simple rituel ou un jeu, mais pas un mode de vie. Une éthique absolue est en effet, par définition, immuable.

 

UNE ALLIANCE AVEC LES NATIONS

 

Une autre question se pose à propos de l’offre de la Torah aux nations du monde et de son rejet : Les commandements qui leur ont été présentés comme des exemples de la Torah, les lois relatives au meurtre, au vol et à l’adultère, font partie des sept lois noa‘hides. Or, ces nations avaient déjà l’obligation d’observer ces mitswoth. Pourquoi les ont-elles rejetées ?

La proposition faite aux nations d’accepter la Torah impliquait une berith, une alliance, destinée à établir un rapport plus fort avec le Tout-puissant. Une alliance présente la particularité, par définition, de pouvoir être acceptée ou rejetée. Les nations l’ont rejetée, comme ils auraient rejeté, si elles l’avaient pu, les sept lois noa‘hides dans leur ensemble. Cependant, comme ces lois ne font pas partie d’une alliance, il n’y a jamais eu de possibilité qu’elles puissent être rejetées. Le Tout-puissant exige que ces lois soient observées par toute l’humanité, et parce qu’Il est le Créateur et que nous sommes Ses créatures, nous n’avons pas d’autre choix que de les accepter. Par l’observance de ces sept lois, toute l’humanité peut se rapprocher de D.ieu et s’acquérir une part dans le monde à venir.

Cependant, même ces lois ne sont connues de l’humanité comme la volonté de D.ieu que parce qu’elles ont fait partie de la révélation au Sinaï, comme nous le verrons prochainement. Ce que cela implique est clairement exposé par le Rambam :

" Tout [païen] qui accepte les sept mitswoth et s’astreint à les accomplir est compté parmi les Justes non juifs du monde, et il possédera une part dans le monde à venir. [Mais] il n’en est ainsi que s’il les accepte et les accomplit parce que D.ieu les a prescrits dans Sa Torah et nous a fait savoir par Moché rabbènou que les descendants de Noé en avaient reçu l’ordre auparavant " (Rambam, Michné Torah, Hilkhoth melakhim 9, 11)

Autrement dit, si des païens n’observent ces sept mitswoth que parce qu’ils en apprécient la valeur et les considèrent comme une nécessité, ils n’ont aucune part dans le monde à venir. Celui-ci ne leur est assuré que s’ils les accomplissent comme des lois données par le Tout-puissant par l’intermédiaire de Moché rabbènou. C’est pourquoi les nations qui ont rejeté la Torah ont aussi repoussé ces lois.

Cet article est un extrait de : " Fundamentals and Faith : Insights into the Rambam’s 13 Principles, du Rabbin Mordekhaï Blumenfeld. "

Traduction et adaptation de Jacques KOHN

Série "Les 13 articles de Foi de Maimonide"
 
 
article 6 Prophétie
article 8 Caractère divin de la Torah

 

 



A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Mordechaï BLUMENFELD
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