Jeune garçon, Rabbi Chimon fit ses études
à l'Académie de Yavneh fondée par Rabbi Yo'hanan ben Zackaï, dont la mort
coïncide à peu près avec la naissance de Rabbi Chimon. Le maître principal de
Rabbi Chimon fut le célèbre Rabbi Akiba dont l'Académie était à Bnei Brak.
Rabbi Chimon s'était tellement attaché à lui, que ce dernier l'appelait " mon
fils ".
Pendant les persécutions atroces faites
sur l'ordre de l'empereur romain Hadrien, lorsque les académies talmudiques
furent fermées, et l'étude du Talmud interdite sous peine de mort, Rabbi Akiba
continua à enseigner publiquement le Talmud, et son disciple dévoué, Rabbi
Chimon, resta à son côté, jusqu'à ce que Rabbi Akiba fut arrêté. Rabbi Chimon
rendit visite à son maître dans la prison, et celui-ci lui donna des
instructions. Mais la mort les sépara, car Rabbi Akiba fut condamné à mourir en
martyr, pour la sanctification du Nom de Dieu.
Ce furent des temps difficiles pour les
Juifs en Israël qui devaient subir les persécutions atroces de l'Empereur
romain Hadrien. Les savants avaient des difficultés énormes pour étudier le
Talmud et diriger les écoles. L'enseignement était interdit sous peine de mort,
car s'ils étaient pris, professeur et étudiant étaient mis à mort. Toute la vie
religieuses juive était en danger, jusqu'à ce que le grand Rabbi Yéhoudah ben
Bava, publiquement, nomma cinq grands savants, défiant ainsi la loi cruelle de
Hadrien. Parmi ces cinq savants, se trouvait Rabbi Chimon ben Yo'hai (et aussi
Rabbi Meir).Les autorités
romains étaient sur les dents et cherchaient ces héros juifs. Les savants
désignés réussirent à se sauver, mais Rabbi Yehoudah ben Bava fut arrêté et
exécuté.
Enfin, le cruel Hadrien mourut à la suite
d'une maladie très douloureuse, et ses décrets ne furent plus suivis avec la
même sauvagerie que pendant sa vie. Ce fut alors que les chefs spirituels de
cette époque se réunirent pour délibérer sur les moyens à prendre afin de
restaurer la vie religieuse des Juifs. Parmi les chefs assemblés à Oucha, nous
trouvons aussi Rabbi Chimon. Pour raison de sécurité, les savants se rendirent
à Yavneh où ils conférèrent dans un vignoble. Parmi eux se trouvaient Rabbi
Judah, Rabbi José le Galilite et Rabbi Chimon bar Yo'haï.
CONDAMNE A MORT
Discutant sur l'attitude à prendre
vis-à-vis du gouvernement romain, Rabbi Judah proposa des méthodes amicales,
tandis que Rabbi José n'émit aucune opinion. Mais Rabbi Chimon parla avec
beaucoup d'amertume de la tyrannie romaine et conseilla de résister aux ordres
des Romains par tous les moyens. Les hommes ne se rendaient pas compte que leur
conversation était surprise par un jeune homme du nom de Judah ben Guérime.
Celui-ci avait été l'élève de Rabbi Chimon, mais plus tard il s'était engagé
comme espion au service des Romains. Ce traître apporta aux autorités romaines
les délibérations des Sages, de sorte que l'administration romaine combla
d'honneur Rabbi Judah qui avait parlé en sa faveur, ordonna d'exiler Rabbi José
pour ne pas avoir suivi l'exemple de Rabbi Judah, mais choisit la mort pour
Rabbi Chimon qui avait osé défier l'autorité de l'Etat.
Rabbi Chimon prit la fuite avec son fils
Elazar. Pendant quelques temps ils se chachèrent dans une Maison d'Etudes, où
l'épouse de Rabbi Chimon leur apportait tous les jours du pain et de l'eau.
Mais lorsque les recherches furent intensifiées, ils décidèrent de chercher une
meilleure cachette. Ignorés de tout le monde, ils vécurent retirés dans une
caverne. A l'entrée de celle-ci, Dieu fit pousser un caroubier et fit jaillir
également une source d'eau fraîche. Pendant douze ans Rabbi Chimon bar Yo'haï
et son fils restèrent dans la grotte, se nourrissant de caroubes et d'eau. Ils
profitèrent de ce séjour pour étudier et prier, si bien qu'ils devinrent les
hommes les plus saints et les plus sages de leur temps.
Douze ans s'étaient écoulées lorsque le
prophète Elijah leur apporta la bonne nouvelle d'un changement dans le
gouvernement, ainsi que de leur amnistie. Le père et le fils quittèrent leur
cachette et en traversant un champ où un fermier juif labourait le sol, ils
firent la remarque suivante : " Voilà les hommes qui abandonnent l'étude sacrée
de la Torah pour des choses matérielles ". A peine eurent-ils prononcé ces
mots, que tout le champ fut enveloppé d'un nuage de fumée et une voix céleste
se fit entendre : " Etes-vous venus pour détruire ma terre ? Retournez à votre
caverne ". Ils retournèrent donc à la grotte et y restèrent encore douze mois.
Ils ne la quittèrent que lorsqu'ils entendirent à nouveau la même voix céleste
leur ordonnant de s'en aller.
Cette fois leur attitude envers le monde
fut toute autre. Apercevant un juif qui portait deux bottes de myrte et se
dépêcher de rentrer chez lui, car c'était un vendredi après midi, ils lui
demandèrent de ce qu'il voulait faire avec le myrte. L'homme répondit: " C'est
pour décorer ma maison en l'honneur du Chabbath ". Ils lui posèrent alors une
autre question : " une botte de myrte ne serait-elle pas suffisante pour
parfumer votre maison ? " Et l'étranger de répondre : " Je prends deux bottes
l'une pour me souvenir du Chabbath et l'autre pour le sanctifier". Alors Rabbi
Chimon s'adressant à son fils lui dit: " Regarde comme précieux sont les
préceptes de Dieu pour nos frères ". Ayant acquis la conviction que les. Juifs
respectaient toujours les commandements de la Torah et observaient toujours le
Chabbath, malgré les lois et les persécutions des cruels chefs romains, Rabbi
Chimon et son fils en furent fortement encouragés.
UNE MISSION REUSSIE
En continuant leur chemin ils
rencontrèrent Rabbi Pin'hass ben Yaïr, un autre célèbre savant dont le Talmud
nous rapporte tant des choses merveilleuses. Rabbi Pin'hass ben Yaïr était le
beau-père de Rabbi Chimon bar Yo'haï et allait à leur rencontre. En
s'apercevant combien la santé de son gendre était altérée par suite de son
séjour prolongé dans la grotte, Rabbi Pin'hass ben Yaïr fondit en larmes, mais
Rabbi Chimon le consola en lui assurant qu'il n'aurait jamais atteint un tel
degré d'érudition et de sagesse Divine s'il n'avait pas passé de nombreuses
années dans la caverne.
Rabbi Chimon s'établit dans la ville de
Tékoa où il fonda une grande Académie. Les plus illustres savants de l'époque
s'y rendaient pour
recevoir ses instructions. Parmi eux se trouvait Rabbi Yehoudah le Prince, le
compilateur de la Michnah.
Un jour Rabbi Chimon rencontra Judah ben
Guérime, le perfide espion qui lui avait causé tant d'ennuis. Rabbi Chimon
s'exclama " Et cet comme vit encore ? ". Quelque temps après, Judah ben Guérime
mourut.
Les persécutions religieuses
recommencèrent. Les Romains interdisaient l'observance du Chabbath et d'autres
importantes lois juives. Les Sages décidèrent alors d'envoyer une délégation à
Rome et choisirent Rabbi Chimon bar Yo'hai pour la conduire. En arrivant à
Rome, ils apprirent que la fille de l'Empereur romain était atteinte d'une
aliénation mentale et que personne ne pouvait la guérir. Rabbi Chimon se rendit
au palais et demanda la permission de traiter la malade. Après quelques jours
de traitement, la princesse était guérie. L'Empereur désirant se montrer
reconnaissant, proposa alors à Rabbi Chimon de choisir la chose la plus
précieuse du trésor romain. Rabbi Chimon y trouva les décrets relatifs aux
persécutions ordonnées contre les Juifs. Il les demanda en récompense de ses
services. C'est ainsi qu'il réussi à écarter le danger qui planait sur les
Juifs à cette époque.
Rabbi Chimon était un des plus grands
docteurs de la Loi et de l'Éthique juives. Ses nombreux adages et préceptes
contenus dans le Talmud, font preuve de la sainteté de son caractère et de son
dévouement à la Torah. Un jour, il dit : " Si j'avais été présent au pied du
Mont Sinaï lors de la promulgation de la Torah, j'aurais demandé deux bouches,
une pour l'étude continuelle des paroles de la Torah, et l'autre pour manger ".
Puis, il se ravisa et déclara que cette requête n'aurait pas était très
intelligente puisque l'homme, même avec une seule bouche émet déjà tant de
choses qui ne sont pas justes.
Bien qu'il eût vécu retiré du monde
pendant un bon nombre d'années, Rabbi Chimon n'ignorait pas l'importance des
bonnes relations humaines. Il dit : " L'homme devrait se jeter dans un four
brûlant plutôt que d'offusquer quelqu'un en public". - "Tromper quelqu'un par
la parole, est pire encore que d'extorquer frauduleusement de l'argent ". - "
Le prétentieux est comme le païen qui vénère les faux dieux". Dans les Maximes
de nos Pères, nous trouvons cet adage de Rabbi Chimon : " Il y a trois
couronnes, celle de la Torah, celle du sacerdoce et celle de la royauté, mais
la couronne d'une bonne renommée est supérieure à toutes les autres ".
Rabbi Chimon bar Yo'haï est l'auteur du
livre sacré Zohar (Éclat) qui contient beaucoup d'interprétations mystiques de
la Torah. Ce livre est la source principale de la Kabbalah. Pendant des
siècles, ce livre saint fut étudié par un petit nombre de savants choisis,
jusqu'à ce que le grand érudit Rabbi Moise ben Chem-Tov de Léon publiât le
Zohar, il y a environ sept cent ans de cela. Rabbi Chimon est aussi
l'auteur de Sifri et de la Mekhilta.
Rabbi Chimon bar Yo'haï mourut à Méron, un
petit village près de Safed, dans le pays d'Israël. Comme nous l'avons déjà
mentionné au début, beaucoup des Juifs se rendent chaque année à Lag Baomère
(le 18 Iyar), anniversaire de sa mort, en pèlerinage sur son tombeau, où ils
allument des bougies et récitent des prières.
Par égard pour Rabbi Chimon bar Yohaï
l'arc en ciel demeura invisible dans le ciel toute sa vie durant (l'arc en ciel
est le signe de l'alliance que Dieu a faite avec Noé, dans laquelle Il promet
de ne plus détruire le monde pour les fautes des hommes. La présence de l'arc
en ciel rappelle aux hommes que n'eut été cette alliance, Dieu aurait peut-être
détruit le monde à cause de leur mauvais comportement). C'est la raison pour
laquelle les enfants jouent avec arc et flèches le jour de Lag-Baomère , qui
est l'anniversaire du décès de ce grand Maître de la Michnah .