Notre esprit est frappé
d'incrédulité à l'annonce de l'explosion de la navette
spatiale Columbia.
Nous autres, en Israël,
nous sommes accoutumés aux nouvelles d'attaques terroristes. Nous nous
sommes même habitués à discerner les nuances de sérieux
dans la voix du journaliste qui présente les informations à la
radio, pour nous blinder contre les inévitables nouvelles tragiques.
Tout cela est encore plus tangible le samedi soir, lorsque, après avoir
passé tout un Chabbat déconnecté du monde extérieur,
les premiers instants des informations post-chabbatiques sont abordés
avec une certaine appréhension.
Pourtant, rien ne nous avait
préparés à cela.
C'était tout simplement
impossible.
Il était notre héros, à un moment où nous en avions douloureusement besoin.
Depuis 16 jours, avec une
couverture médiatique quasiment ininterrompue du voyage de Ilan Ramon,
le premier astronaute israélien, dans l'espace, nous avions tous l'impression
de le connaître. Il faisait partie de notre famille. Il nous représentait
tous - notre pays, notre peuple, notre passé et notre futur. Il était
notre héros, à un moment où nous en avions douloureusement
besoin.
Fils de survivants de la
Shoah, il réunissait toutes les qualités d'un juif israélien,
et fier de l'être. Il était un héros de guerre ; en tant
que pilote de l'Armée de l'Air israélienne, il avait participé
au bombardement de la centrale nucléaire en Iraq en 1981 et combattu
dans les guerres de Kippour et du Liban.
Bien qu'il ne soit pas religieux,
Ilan Ramon avait tenu à observer certains commandements religieux emblématiques
dans l'enceinte de la navette spatiale, pour réaliser son rêve
d'unir tout le peuple juif et de le représenter. Il avait emmené
à bord un livre de Psaumes et un dessin réalisé par un
jeune juif de 14 ans assassiné à Auschwitz. Il n'a mangé
que de la nourriture Cacher, a fait le Kiddouch le vendredi soir, et récité
le Shéma Israël alors qu'il survolait Jérusalem.
Il disait qu'il voulait
" souligner l'unité du peuple d'Israël et des communautés
juives à travers le monde ".
Avec mes amis, nous parlions
du " Kiddouch Hachem " (sanctification du nom de D.ieu) qu'il
avait fait par son comportement exceptionnel.
Comment se pourrait-il qu'il soit parti?
Comment se pourrait-il que
tous nos espoirs et nos rêves se soient désintégrés
dans la fine couche d'atmosphère qui protège la Terre ?
Nous attendions impatiemment
son retour sur terre, pour célébrer le triomphe de notre nouvel
héros national. Nous étions loin de nous attendre à une
telle tragédie.
" Il est plus dangereux
de conduire une voiture dans ce pays que de voyager dans l'espace ", a
déclaré son frère Gadi. " Même dans nos pires
cauchemars, nous ne pouvions imaginer qu'il y ait un problème quelconque
".
Samedi, tôt dans la
matinée, alors qu'il attendait impatiemment l'arrivée de son fils,
son père déclarait : " Notre seul souci, c'est le temps qu'il
fera ; cela pourrait reporter l'atterrissage d'un jour ou deux ".
Encore une fois, la tragédie
nous a ramené à la fragilité de l'effort humain. Nous sommes
bouleversés lorsque les frontières de la science et de la technologie,
dans lesquelles nous plaçons toute notre confiance, se révèlent
si précaires et limitées.
Pour lui, ce rouleau symbolisait avec force son rêve d'unifier le peuple juif sous D.ieu.
Le Colonel Ramon s'était
fait un grand plaisir d'emporter une " surprise "- un rouleau de la
Torah qui avait échappé à l'enfer de la Shoah. Pour lui,
ce rouleau symbolisait avec force son rêve d'unifier le peuple juif sous
D.ieu.
Ce rouleau de la Torah a
explosé avec Ramon et ses amis astronautes (...).
Nos curs et nos prières
vont vers ses parents, son épouse, Rona, et ses quatre enfants. Notre
nation pleure l'homme, le père, les espoirs, la vision, et l'héritage.
Malheureusement, c'est dans la peine que nous avons réalisé le
rêve d'unité d'Ilan Ramon.
Jeudi dernier, Ilan décrivait
le monde tel qu'il lui apparaissait depuis l'espace. " Le monde a l'air
merveilleux, de là-haut, si paisible, si magnifique, et si fragile ".
Nous pouvons désormais
reprendre cette phrase et dire à Ilan Ramon z'l, " Tu semblais
si merveilleux d'ici-bas, si paisible, si magnifique
et si fragile ".
Traduction de Sarah Weizman