Le mot hébreu yira signifie à la fois " craindre "
et " voir ". Le choix essentiel dans la vie est d'ouvrir nos yeux
sur les occasions disponibles, et de craindre les conséquences d'avoir
fui cette réalité.
La crainte est comme toutes les autres émotions - elle comporte à
la fois des aspects positifs et négatifs. La crainte négative
est débilitante. La crainte positive est stimulante. L'adrénaline
fait courir le sang dans nos veines. Elle nous donne le pouvoir d'accomplir
ce que nous voulons faire. Si nous rencontrons un serpent au cours d'une promenade,
la peur nous donne la force de courir aussi vite qu'un lièvre et de franchir
tous les obstacles comme un champion olympique. La peur nous éloigne
du monde du rêve et nous ramène aux sombres réalités.
Savoir faire le bon choix est une lutte humaine permanente. Nous avons tendance
à préférer la solution la plus facile et à en ignorer
les conséquences lointaines. La crainte de celles-ci est parfois la meilleure
motivation pour accomplir le travail rapidement et efficacement. " Voir
ou ne pas voir ? " - voilà la question que se pose le Juif.
Une entière liberté
Imaginons des caméras cachées contrôlant nos progrès
dans la vie. Le monde entier nous observe. Les gens nous encouragent quand nous
réussissons et nous conspuent lorsque nous échouons.
Avec tous ces gens qui nous guettent, est-ce que nous ne ferions pas attention
à chacun de nos gestes ? Est-ce que notre motivation pour réussir
n'augmenterait pas considérablement ?
Nous devons avancer en ayant conscience en permanence de l'existence de D.ieu.
Tout est enregistré sur une cassette vidéo. Exploitons-nous au
mieux les occasions que nous offre la vie, ou bien les gaspillons-nous ? Un
jour viendra où nous devrons rendre compte de nos actes.
Cette crainte peut nous motiver à atteindre la grandeur.
Malheureusement, la nature humaine est prompte à se laisser distraire.
Chacun de nous a tendance à douter de lui-même. Cette tendance
s'appelle le yètsèr hara'. Il est comme un chien méchant,
toujours en train de nous menacer : " Tu es trop exigeant envers toi-même
! Tu vas t'effondrer dans une crise nerveuse ! " Nous hésitons à
agir parce que nous sommes effrayés par ses menaces.
La crainte de D.ieu est le moyen d'acquérir toutes les autres mitswoth, et la clé qui nous ouvre tout ce que nous voulons accomplir dans ce monde-ci.
La crainte de D.ieu nous
donne une entière liberté. Rien ne se dressera sur notre chemin.
Le chien est insignifiant comparé à la crainte de D.ieu. Il nous
oblige simplement à nous détourner. Nous sommes libres de toutes
les autres peurs. Nous nous sommes transformés en un instrument pour
la volonté de D.ieu.
La crainte de D.ieu est
le moyen d'acquérir toutes les autres mitsvot, et la clé qui
nous ouvre tout ce que nous voulons accomplir dans ce monde-ci. Alors, qu'est-ce
qui nous retient ?
Considérons les
quatre mythes suivants :
Mythe
N° 1 : La peur est douloureuse
D'un côté, les gens disent que la peur est inconfortable et menaçante,
et nous organisons notre vie pour l'éviter. D'un autre côté,
les gens montent sur des montagnes russes et vont voir des films d'horreur.
Ils dépensent pour cela beaucoup d'argent rien que pour se procurer des
émotions fortes !
Comment comprendre cette contradiction ?
C'est une erreur de penser que la peur fait mal. Qu'elle soit inconfortable,
soit, mais elle procure un très vif plaisir. Quand on nous pousse hors
de l'avion avant que s'ouvre le parachute, nous oublions toute l'absurdité
de ce monde. Frayer avec la mort nous fait apprécier comme il fait bon
vivre. Nous sommes branchés sur la réalité. Et soudain
la vie devient un frisson !
A l'inconfort de la peur, opposons son côté positif : Chaque moment
est vécu en connaissance de cause et avec exaltation. Bandons nos forces
! Faisons appel à notre potentiel ! Soyons motivés par la peur
! Il est si enivrant d'avoir peur.
Quand on parcourt un parc d'attractions et que l'on observe les gens qui descendent
des montagnes russes, ceux qui y sont montés pour la première
fois en gloussent d'enthousiasme : " Comme c'est beau d'être restés
en vie ! " La deuxième fois, ils sont devenus plus sérieux
car ils commencent à se souvenir de leurs problèmes. Et la troisième
fois, ils sont redevenus ce qu'ils étaient avant, de retour à
leurs préoccupations dépressives…
La vie serait ennuyeuse sans la peur. Voyons comme les gens qui ont " réussi
" sont toujours en quête de nouvelles aventures hasardeuses, que
ce soit des investissements financiers à haut risque, ou des leçons
d'aile volante.
Comment profiter au mieux de la vie ? Se sentir comme si l'on redescendait sans
cesse des montagnes russes.
Mythe
N° 2 : La peur paralyse
Les gens pensent que la peur paralyse et réduit leur potentiel.
En fait, c'est le contraire qui est vrai. La peur peut générer
des exploits surhumains. Nous avons tous entendu parler de mères qui
avaient soulevé des voitures pour sauver leur enfant coincé en
dessous. Affronter la peur donne des forces, des forces que nous ne soupçonnions
même pas.
La peur ne cause des dommages que lorsque nous la fuyons et ne l'affrontons
pas.
Supposons que nous assistions passivement à une rixe où des fiers-à-bras
rouent de coups une faible victime. Rien que d'y penser ensuite nous fera faire
la grimace. Si l'on ne dompte pas sa peur et que l'on ne prend pas la défense
de ce qui est juste, on se rappellera douloureusement cet incident toute sa
vie.
Mais si l'on a affronté les voyous et qu'on les a mis en fuite - même
au prix de quelques injures entendues et de quelques coups reçus - on
se souviendra de ce moment avec fierté jusqu'à la fin de ses jours.
On a eu peur, mais on l'a surmontée. On a fait ce qu'il fallait faire.
Cela restera un véritable plaisir.
Mieux vaut essayer et échouer qu'avoir eu peur d'essayer.
" Le choc " débilite, la " peur " motive. Imaginons
un cowboy monté sur un fougueux mustang. La peur d'être jeté
à bas le rend plus attentif à chacun des mouvements de la bête,
de sorte que ses réactions n'en sont que plus adaptées et plus
rapides.
Essayons la même chose dans la vie.
Fuir
le défi
Il nous arrive trop souvent de manquer une occasion de briller parce que nous
nous disons : " Je ne peux pas. Cela exige trop d'efforts ! " Imaginons,
par exemple, qu'on nous demande de mémoriser en 24 heures toute une page
de l'annuaire téléphonique. " Impossible ! " dira-t-on.
Mais qu'en est-il de celui que l'on retient comme otage et à qui l'on
dit : " Si vous ne mémorisez pas une page de l'annuaire d'ici demain
soir, vous serez mis mort. " Il ne fait aucun doute qu'il le fera.
Tirons parti du pouvoir de la peur comme d'un outil permettant d'empoigner tous
nos " je ne puis ". Dressons une liste de ces " je ne puis "
et fixons sur chacun une étiquette de prix. Quel en est la récompense,
et quelle en est la conséquence ? Avoir cette clarté fera de nous
un être humain très efficace.
Mythe
N° 3 : La peur signifie la perte de la liberté
Les gens évitent la peur afin de préserver leur indépendance,
persuadés que s'il existe une force extérieure qui leur dit ce
qu'ils doivent faire, ils seront transformés en robots. Ils préfèrent
agir de par leur volonté propre.
La peur du Tout-Puissant est différente. Quand nous craignons de transgresser
la parole de D.ieu, cela libère nos potentialités. Pourquoi ?
Parce que D.ieu ne veut pas nous épier, Il veut seulement ce qui est
bon pour nous. C'est pourquoi la crainte de D.ieu devient un moyen de nous
libérer de l'absurdité, des peurs stupides, de la mesquinerie.
Avec la crainte de D.ieu, nous sommes libérés de toutes les autres
peurs du monde.
Avec la crainte de D.ieu, nous sommes libérés de toutes les autres peurs du monde.
La peur asservit seulement
quand quelqu'un d'autre essaie délibérément d'inspirer
de la crainte. Mais la peur de la réalité - de la possibilité
d'occasions manquées - est une motivation pour nous faire aller là
où nous voulons être. Nous disons tous : " Je veux être
bon, mais je ne veux pas faire l'effort. " La peur nous incite à
faire le travail.
Dans notre activité professionnelle, nous savons que nous risquons d'être
renvoyés en cas d'absence injustifiée. Aussi faut-il que nous
nous levions de bonne heure. La peur d'échouer à un examen nous
incite à étudier plus intensément. En fin de compte, cette
peur nous aide à réussir et entretient notre dignité.
Nous tous voulons la grandeur. Nous voulons être résistants, disciplinés,
organisés. La peur nous laisse libres.
Mythe
N° 4 : La peur est déshonorante
Les gens pensent que si un acte est juste, nous devons le faire parce qu'il
est juste, et non par peur des conséquences. Il semble déshonorant
de réagir sous l'effet de la peur.
Idéalement, nous devrions tous faire ce qui est juste simplement parce
que c'est juste, et éviter ce qui est mauvais, sans tenir compte des
conséquences. De fait, les Sages enseignent que celui qui sert D.ieu
uniquement pour être récompensé, ou pour éviter d'être
puni, se situe à un niveau inférieur. Il ne sert que lui-même.
Si les forces néfastes offraient davantage, c'est à elles qu'il
serait fidèle !
Par conséquent, pourquoi existe-t-il une mitsva spécifique d'acquérir
la crainte ? Est-ce que nous ne devrions pas ne nous motiver que par l'amour
de D.ieu ?
Oui, quelqu'un qui sert D.ieu par amour se situe à un niveau beaucoup
plus élevé. Et nous devrions nous efforcer de faire ce qui est
juste parce que c'est juste, et non parce que cela " nous fera atteindre
le ciel ". Mais nous devons être également réalistes.
L'amour est souvent une motivation insuffisante pour faire le bien. Dès
lors que nous faisons ce qui est juste moyennant paiement, mieux vaut prendre
l'argent et faire ce qui est juste !
Supposons que l'on organise une campagne pour conduire les S.D.F. jusqu'à
un lieu d'hébergement. Idéalement, nous les transporterions pour
rien. Mais si on nous offre 100 euros pour chaque sans-abri, est-ce que la récompense
va nous " corrompre " ? Non ! Elle ne fera que nous motiver plus fortement
pour faire ce que nous savions déjà être juste.
Encore un point important : On peut espérer que ce que l'on fait sous
l'emprise de la crainte finira par nous faire faire la même chose par
amour.
Le réflexe
de douleur
Tout le monde est né avec l'aptitude à sentir la douleur. Si nous
sommes piqués par une épingle ou brûlés par du feu,
nos mains sautent instinctivement en arrière. Mais certaines personnes
naissent sans pouvoir manifester de réaction à la douleur. Elles
ne sentent rien si leur main entre en contact avec un liquide bouillant.
Il est certes très agréable de ne pas sentir de douleur. Mais
quelqu'un qui n'en éprouve aucune court sans arrêt des dangers.
Il est noir et bleu tout le temps. Il met sa main au feu et dit : " Vous
sentez brûler quelque chose ? Eh bien ! C'est ma main ! " Mais sa
main vient de disparaître…
La douleur est essentielle à notre survie. Et c'est pour cela que nous
devons craindre D.ieu, garder clairement à l'esprit les conséquences
ultimes. Ce n'est pas le but dans la vie, mais un moyen vers une fin. Cela nous
aide à réfléchir à deux fois avant d'insulter quelqu'un
ou invectiver nos parents.
Imaginons que nous parlions à quelqu'un et qu'il commence à débiter
des médisances pleines de fiel. Come nous savons que c'est mal d'écouter,
nous nous disons : " Je vais rester quelques minutes par politesse…
" Mais si quelqu'un s'apprête à nous frapper à la tête
avec une batte de base-ball pour avoir tenu de tels bavardages, nous nous dirons
aussitôt : " Filons d'ici immédiatement ! " Dans ce cas,
nous ne ferons pas de calculs. Nous ferons seulement ce qu'il faut faire.
La peur de la punition est comme un réflexe de douleur. Elle nous empêche
de faire des choses qui nous causeront plus tard du tort. Elle nous fait aller
là où nous voulons être.
Voici cinq étapes qui aideront à réaliser ce but crucial.
Etape N° 1 : Développons
notre monde
Asseyons-nous et réfléchissons à tous les plaisirs que
le monde peut nous offrir. Les plaisirs des yeux, les joies des enfants, les
merveilles de la nature. Pensons aux effets apaisants de la nage, du ski, des
arts, de la musique, de la littérature.
Considérons à présent le plaisir obtenu par quelqu'un qui
vit chaque instant de la manière la plus intense, toute sa vie durant.
Puis comparons-le aux nôtres. Tant de plaisirs disponibles dans ce monde…
et nous en sommes à n'en grignoter qu'une minuscule fraction.
La première étape pour apprécier les récompenses
et les conséquences ? Sortir de notre conception étriquée
de ce que la vie peut offrir. Projetons-nous dans nos rêves les plus élevés
et formons des plans pour les réaliser. Essayons d'imaginer ce que l'humanité
aurait pu accomplir si tout le monde depuis le début des temps avait
vécu au plus intense. Nous n'en sommes même pas à en effleurer
l'idée.
Nous marchons dans la vie comme des somnambules.
Etape N° 2 : Eviter
les douleurs inutiles
Prenons conscience de ce que les risques de douleur dans ce monde surpassent
les potentialités pour le plaisir. Nous traversons des guerres, des maladies,
des tragédies. Rappelons-nous ceux qui ont traversé la Shoah et
qui, assistant au règne du mal sur le monde, se sont sentis impuissants
à y mettre fin.
Veuille D.ieu nous préserver de la perte d'un enfant ! Le chagrin est
inimaginable. Aucun plaisir ne pourra jamais plus compenser cette douleur.
Cela paraît déprimant ? L'important est de devenir motivé.
Quand nous sommes conscients de toute la douleur possible, nous devenons d'autant
plus désireux de savoir comment l'éviter.
Etape N° 3 : Eviter
la douleur éternelle
Le deux premières étapes ont trait au plaisir et à la douleur
dont le corps fait l'expérience dans ce monde-ci.
La troisième est de se rendre compte que la douleur de l'âme est
de loin la plus dévastatrice. Un instant passé au Gueihinnom,
le processus purificateur de l'au-delà, est plus douloureux que toutes
les douleurs réunies de ce monde-ci. Parce qu'il n'est pas provisoire
comme le corps ; il est éternel.
La honte que l'âme ressent pour avoir commis une transgression est pire que toute la douleur de ce monde-ci.
La honte et regret que l'âme
ressent pour avoir commis une transgression est bien pire que toute la douleur
de ce monde-ci. Un seul acte de colère, ou une attitude blessante envers
autrui, ou un moment de dépression ou du temps gaspillé…
voilà une inflexible éternité de douleur.
Si nous extrapolons maintenant cela aux grandes transgressions, comme le meurtre,
ou la profanation du Nom de D.ieu, la douleur que peut nous causer un tel Gueihinnom
est inimaginable.
Etape
N° 4 : La récompense d'une seule mitsva
Après les mauvaises nouvelles, les bonnes ! La douleur du Gueihinnom
n'est rien comparée à la récompense pour une seule mitsva.
Autrement dit, si nous avions éprouvé la douleur imposée
par le Gueihinnom à chacun de ceux qu'il a accueillis depuis la nuit
des temps, il vaudrait encore la peine de jouir de la récompense pour
une seule mitsva.
Il existe des milliers de mitsvot possibles. Est-ce que nous avons dit "
Bonjour ! " avec le sourire, ou eu un moment de prière sincère
? La récompense échappe à l'imagination. Nous serons éternellement
associés au plaisir ultime de D.ieu.
Au-delà se situent
les " grandes " mitsvot, comme l'étude de la Tora,
ou la sanctification du Nom de D.ieu. Ou bien la " très grande "
mitsva de mezaké eth harabim - " apporter du mérite
aux masses " - où nous exerçons une influence sur d'autres
et partageons la récompense de leur mitsvot.
Etape N° 5 : Faire la volonté de D.ieu
La récompense ultime consiste à employer notre libre arbitre à
faire la volonté de D.ieu.
Imaginons que nous tentions de sauver la vie d'un de nos enfants. Toute autre
valeur nous paraîtra bien dérisoire en comparaison. Si quelqu'un
demandait : " Combien m'en coûtera-t-il pour sauver mon enfant ? "
nous pressentirions qu'il y a chez lui quelque chose de dérangé.
De même, n'avoir pour seul motif de se relier à D.ieu que la
perspective d'une récompense ou d'une punition démontre un manque
de compréhension. La valeur consistant à faire la volonté
de D.ieu est, en définitive, la seule vraie valeur dans l'existence.
Parce qu'elle est un raccordement total à D.ieu.
Toute la récompense du monde à venir, tout ce qui appartient à
tous les gens justes qui ont jamais vécu, n'est rien en comparaison de
l'accomplissement de la volonté de notre Créateur, de l'exécution
d'un choix difficile, uniquement parce que c'est ce que D.ieu veut que nous
fassions.
Voilà la signification ultime. Voilà ce que veut dire : vivre
dans la réalité.
La puissance
des Tefilines
Pour bien nous pénétrer de cette réalité, nous avons
besoin de pratiquer ces étapes - non pas une ou deux, mais des milliers
de fois.
Maïmonide écrit (Lois sur les Tefilines 4, 25) que toutes les fois
qu'un Juif porte des Tefilines sur sa tête et à son bras, la force
de sainteté est si grande qu'elle le transporte à un état
de " crainte de D.ieu ".
Voilà pourquoi le meilleur moment pour passer en revue nos cinq étapes
est celui où nous mettons des Tefilines :
1. Il y a tellement de plaisirs auxquels nous n'avons pas goûté
dans ce monde-ci. Comment faire pour les obtenir ?
2. Les tragédies de ce monde-ci éclipsent tous les plaisirs.
3. Les regrets et la honte éternels pour la transgression la plus légère,
sont beaucoup plus douloureux que toutes les tragédies réunies
de ce monde-ci.
4. Tout le Gueihinnom mérité par tous ceux qui ont vécu
depuis le début de la Création n'est rien en comparaison de la
récompense pour avoir fait une mitsva.
5. Tout le Ciel mérité par tous ceux qui ont jamais vécu
n'est rien en comparaison de l'accomplissement de la volonté de D.ieu.
Parcourons ces étapes quand nous mettons les Tefilines, et de nouveau
avant de les enlever. Nous vivrons dans une stratosphère différente…
celle qui s'appelle la " réalité ".
Si nous voulons la crainte
de D.ieu, nous l'aurons
Le Talmud enseigne : " Tout est dans les mains de D.ieu, à l'exception
de la crainte de D.ieu ". La crainte de D.ieu dépend entièrement
de nous. Si nous la voulons, nous l'aurons.
Mais ce point présente
une difficulté. Nous disons dans nos prières : wetitèn
lanou 'hayim chéyèch bahem yirath chamayim weyirath 'hett,
demandant ainsi au Tout-Puissant de nous donner " la crainte de D.ieu ".
Mais si la " crainte de D.ieu " est dans nos mains, pourquoi demandons-nous
qu'Il nous la donne ?
La réponse est que tout, bien évidemment, dépend du Tout-Puissant.
Nous ne pouvons pas soulever le petit doigt sans D.ieu. Il existe beaucoup
de choses que nous désirons ardemment sans jamais les obtenir. Chez certains,
l'ambition de devenir millionnaire est si forte qu'ils travaillent toute leur
vie 80 heures par semaine… et meurent dans l'indigence.
Mais la crainte de D.ieu est différente. Elle est la seule chose que
l'on finit par obtenir si on la veut vraiment. Avec toute autre vertu, D.ieu
peut estimer que notre requête n'est pas bonne pour nous. Tandis que la
crainte de D.ieu représente quelque chose qu'Il ne retiendra pas si
nous la désirons sincèrement, parce qu'elle présente cette
particularité unique de nous ramener toujours à la réalité.
C'est toujours bon pour nous.
Si nous la voulons réellement, elle est à nous.
Sans
la crainte de D.ieu, nous aurons des problèmes
Le Talmud cite les propos
tenus par le Sage Rava à ses disciples : " N'acquérez pas
deux parts de Gueihinnom ! ".
Rachi explique ce que voulait dire Rava : Si nous faisons de l'étude
de la Tora une activité purement théorique, sans observer en même
temps les mitsvot, nous nous acquérrons deux fois le Gueihinnom. C'est
comme quelqu'un qui
apprendrait le Talmud pendant Chabbath tout en fumant un cigare. Sans la crainte
de D.ieu, il n'existe pour lui aucun moyen de relier la Tora à la réalité.
Et non seulement est-il privé des plaisirs de ce monde-ci parce qu'il
s'est acharné à étudier, mais lorsque tout sera terminé
il perdra aussi le monde à venir.
Quant à celui qui observe les mitsvot, sa situation n'est pas simple
non plus. Quand une personne meurt, on la convoque devant le tribunal céleste
et on lui pose les questions suivantes :
- As-tu été honnête en affaires ?
- As-tu consacré chaque jour du temps à l'étude ?
- As-tu essayé d'avoir des enfants ?
- As-tu espéré la rédemption ?
- As-tu recherché la sagesse et la compréhension ?
Supposons qu'elle ait répondu " Oui ! " à toutes ces
questions. On lui en posera une dernière :
- As-tu eu la crainte de D.ieu ?
Si elle répond " Non ! ", dit le Talmud, mieux vaudrait n'avoir
rien fait du tout. La crainte de D.ieu est un atout suprême.
Pourquoi cela ? La crainte de D.ieu est ce qui préserve la " fraîcheur
" de notre Tora. Acquérir la Tora sans la crainte de D.ieu, c'est
un peu comme si l'on emmagasinait sa récolte sans précautions
en vue de sa conservation : elle pourrirait.
L'ouvrage classique Or'hoth
tsaddiqim (" Les voies des vertueux ") enseigne que, quel que
soit le niveau de sagesse possédé par une personne, si elle n'a
pas la crainte de D.ieu, elle est fondamentalement dans l'erreur. Oui ! Elle
sait que la Tora doit être vécue. Elle sait qu'elle se situe à
un niveau plus élevé que celui qui n'a aucun rapport du tout avec
les mitsvot. Mais elle a adopté la facilité. On l'a fait
accéder à l'essence la plus élevée de la Tora -
l'amour de l'humanité, la prise de responsabilité pour le monde,
la possibilité de s'unir au Tout-Puissant, et elle dit : " Laissez-moi
seul ! Ce n'est pas pour les gens de ma génération. Je suis très
bien comme je suis. "
Comme elle fuit le combat qui la ferait s'élever, toute sa vision devient
obnubilée par son cynisme. Et elle commence à pourrir.
Voilà pourquoi la crainte de D.ieu est si importante. Elle nous pousse
à nous confronter à ces idéaux, et à lutter pour
les incorporer dans notre existence.
Tout
mettre ensemble
La seule chose qui compte dans la vie est d'évoluer dans la clarté,
de vivre dans la réalité.
Rappelons-nous l'époque où nous nous sommes demandé : "
A quoi tout cela mène-t-il ? " Nous avons ce moment de clarté,
et que faisons-nous alors ? Nous courons nous mettre la tête dans le sable
comme une autruche, nous commençons de jouer au tennis, nous mettons
de la musique, nous appelons un ami.
Ne pratiquons pas la politique de l'autruche ! Rappelons-nous que la réalité
existe objectivement - hors notre propre perception subjective. Attention à
ne pas nous réveiller un matin et nous dire : " Qu'ai-je fait de
ma vie ? "
Chacun sait qu'il mourra un jour. Mais ce serait se leurrer que de croire que
ceux qui meurent appartiennent à une classe séparée de
l'humanité. " Eux sont mortels ! Nous sommes immortels ! "
Et pourtant, tout au fond de nous-mêmes, nous entretenons cette illusion.
Est-ce que nous pensons réellement que nous allons être différents
? Soyons réalistes ! Nous ne sommes rien de plus que les autres !
Nous portons tous sur nous une montre dont les aiguilles tournent et nous ne
savons pas pendant encore combien de temps. Combien d'années pensons-nous
qu'il nous reste ? Ne nous imaginons pas que la vie n'a pas de limites. Un jour
viendra où nous n'en aurons plus que pour un an. Un autre jour où
il ne nous restera plus qu'une seule journée. Mieux vaut donc planifier
dès maintenant. Comme le disent nos Sages : " Faites votre examen
de conscience la veille de votre mort ! "
Certains Juifs ont l'habitude,
une fois par an, habituellement avant Roch hachana, de rendre visite
à leurs propres futurs tombeaux. Pourquoi ? Ce n'est pas de la morbidité
malsaine. Le sens est clair : " Je suis mortel, et c'est là que
je finirai. Quelle inscription est-ce que je souhaite sur ma tombe ? "
Il faut être réaliste
quant aux conséquences de la vie. Nous n'avons pas besoin de montagnes
russes. Tout ce dont nous devons faire, c'est nous souvenir que le Tout-Puissant
nous surveille, à chaque moment de chaque jour. Et quand une personne
meurt et va au ciel, le jugement n'est pas arbitraire ni imposé depuis
l'extérieur. Bien au contraire, chaque décision et chaque pensée,
chaque bonne action, de même que les choses embarrassantes que l'on a
faites dans le privé, tout cela est rejoué sans fioritures. Voilà
pourquoi le monde à venir est appelé 'olam haémeth,
" le Monde de Vérité ", parce que nous y voyons clairement
nos forces et nos défauts, et le véritable but de la vie.
Portons toujours sur nous cette crainte, et utilisons-la comme d'un puissant
motivateur pour la grandeur. Cela représente une lutte permanente, mais
la récompense sera éternelle.
Traduit de l'anglais
par Jacques KOHN