Nous espérons tous avoir des parents qui nous aiment, nous choient et nous comprennent, et qui soient patients. Mais la malheureuse réalité est que certains parents sont irrationnels, ils abusent de leur autorité; manipulent et intimident leurs enfants. Ils laissent de profondes et ineffaçables cicatrices sur la sensibilité de leurs enfants.

En présence d'une situation abusive, la loi " Honore ton père et ta mère " doit-elle encore toujours être appliquée ?

Pour accéder à la réponse, allons à la source.

La première fois que le commandement " Honore ton père et ta mère " a été donné, il s'adressait à la génération qui venait de vivre la Sortie d'Egypte. En plein désert, D.ieu leur procurait tout ce dont les Enfants d'Israël avaient besoin. Leur nourriture, la manne tombait du ciel. L'eau leur était servie par une source intarissable, les colonnes de nuée et de feu assurait leur protection; leurs vêtements ne s'usaient pas. Rien que des cadeaux de D.ieu. Les parents biologiques n'y contribuaient pratiquement en rien !

De plus, les parents de cette génération ont même affligé leurs enfants de graves souffrances. Ils ont fait le Veau d'Or. Puis, ils ont écouté les explorateurs dans leurs critiques sur Eretz Israël, s'opposant à y entrer. A la suite de cela, tout le peuple fut condamné à errer dans le désert pendant quarante ans !

Pourtant, ce fut cette génération qui se trouva au pied du Mont Sinaï, et qui, la première, entendit le commandement : " Honore ton père et ta mère ".

Ceci nous enseigne une chose stupéfiante : Alors que pour avoir changé vos couches, payé votre scolarité, et s'être occupés de vous avec soin et égards, vos parents ont déjà droit à votre gratitude envers eux, en l'absence de tout cela, il reste un facteur essentiel : c'est que vos parents vous ont offert la vie, s'ils ne vous ont rien donné d'autre !

Imaginez que vous êtes en train de vous noyer. Arrive un inconnu qui vous sauve de la noyade. Ne lui seriez-vous pas éternellement reconnaissant ? A plus forte raison, êtes-vous redevable de gratitude envers vos parents qui, même s'ils ne vous avaient rien donné d'autre, vous ont donné toute l'existence, dès le départ.

Evidemment, ceci n'excuse pas des parents pour un comportement abusif envers leurs enfants. Il va sans dire que le Judaïsme proscrit toute forme d'abus parental. Les enfants sont des pierres précieuses que D.ieu confie à leurs parents, pour que ceux-ci les polissent et les parachèvent. Les parents abusifs, au contraire, abîment ces précieux bijoux, et ils devront un jour payer pour leurs actes et leurs négligences.

De manière pratique, en quoi consiste la Mitsva d'honorer ses parents ?

Et si des parents sont abusifs, que doit faire leur enfant ?

La meilleure solution consiste à garder des distances qui évitent les contacts le plus possible. Lorsque les parents ne sont pas présents, les souffrances de la confrontation s'en trouvent largement réduits.

Si toutefois un problème surgit, l'enfant devra bien faire la différence entre le parent en tant que donneur de sa vie et le parent abusif. Car honorer les parents ne signifie pas honorer leurs défauts.

En profondeur, l'honneur aux parents est un modèle qui conduit vers l'honneur à D.ieu. Les Dix Commandements ont été gravés sur deux tables de pierre. Une première table contient les commandements concernant notre relation avec D.ieu. Par exemple, l'interdiction de l'idolâtrie, et celle d'évoquer en vain le Nom de D.ieu. La deuxième table comporte les commandements qui régissent nos relations avec nos semblables. Par exemple, les interdictions d'homicide et de vol.

On peut être surpris de découvrir que l'honneur aux parents figure sur la première table. Celles des lois de notre relation avec D.ieu. Ceci se justifie précisément par le fait que le respect aux parents nous initie au respect envers D.ieu. En effet, si nous vouons gratitude et respect à nos parents pour leur don de la vie, à plus forte raison serons-nous animés de respect et de gratitude envers D.ieu, Créateur du monde, qui fait exister le monde, nous donnant de l'air pour respirer, des fleurs pour leurs parfums, et le sol pour y marcher. C'est Lui aussi qui nous donne notre conscience, notre intelligence et notre âme spirituelle.

Le Midrach nous enseigne que ce ne fut qu'après la mort de son père que Abraham reçut de D.ieu l'ordre d'émigrer en Eretz Israël. Ainsi les gens ne pourraient pas accuser Abraham d'avoir abandonné et laissé seul son vieux père. Or, le père d'Abraham non seulement était idolâtre, mais il était même un fabricant d'idoles !

Le père d'Abraham était foncièrement mauvais. Malgré cela, Abraham d'abord l'honora ; et ensuite seulement, pour ainsi dire, fut amené à se mettre exclusivement au service de D.ieu.

C'est précisément parce que servir D.ieu et honorer ses parents sont deux choses inextricablement liées, que les parents portent une très lourde responsabilité. Car si l'enfant grandit dans l'idée que ses parents sont injustes et qu'on ne peut pas leur faire confiance, alors l'enfant risque d'être confronté avec le même genre de problème envers D.ieu, le jour où Il le mettra dans des situations difficiles.

Or là, il y a une vraie tragédie; car D.ieu est en vérité équitable, bon, plein d'amour et d'une justice parfaite.

D.ieu nous envoie des défis, non pas parce qu'Il tente de nous faire trébucher ou bien de nous rendre la vie difficile, mais parce qu'Il veut que nous réussissions dans ces défis. Or, Il sait parfaitement ce dont nous sommes capables. Les défis - que ce soit sous la forme de parents abusifs ou tout autre défi - visent à nous développer et à nous affiner pour la vie.

La guemara parle de ce sage dont la mère a déchiré les habits et a craché à son visage ; il n'a pas du tout réagi, mais a gardé tout son sang-froid. Est-ce qu'il était capable d'une telle maîtrise de soi parce qu'il était un grand sage, ou bien est-il devenu un grand sage parce qu'il a été capable d'un comportement aussi digne ?

Parmi tous les défis de l'existence, avoir des parents abusifs est sûrement l'un des plus difficiles. Mais il est important de savoir que plus difficile est l'épreuve, plus grande est la récompense.