Les effets de la Shoah,
comme événement historique dramatique, sont considérables.
II est impossible d'imaginer toutes les conséquences sur l'individu,
sur la société et sur l'humanité en général.
Les hommes, les femmes
et les enfants qui ont vécu la Shoah ont vécu un traumatisme difficilement
concevable.
Le psychisme arrive difficilement à se distancier d'un vécu aussi traumatique, il devient obsédant et accapare la vie du sujet, sans espoir de solution.
L'individu qui subit un
traumatisme violent éprouve une sidération psychique avec une
amnésie du vécu, amnésie de la pensée, des émotions
et des souvenirs. Il y a comme une rupture entre l'avant et l'après traumatisme.
Le travail de destruction
des nazis sur les juifs consistait au-delà de la mort physique, de supprimer
toute trace de leur existence, de les plonger dans un monde de chaos et d'incohérence
où plus rien n'avait de sens.
Les rescapés des
camps se retrouvaient sans histoire, sans famille ils avaient perdu tout lien
avec leur passé, ils n'existaient plus psychiquement.
Le silence sur leurs
vécus pendant de longues années après leur retour, tenait
en partie à cela. II leur fallait d'abord tout reconstruire, intégrant
le traumatisme si cela leur était encore possible. Certains
n'ont pu faire cette reconstruction même plusieurs années après,
malgré leurs écritures, leurs paroles ou leurs révoltes.
Le psychisme arrive difficilement
à se distancier d'un vécu aussi traumatique, il devient obsédant
et accapare la vie du sujet, sans espoir de solution.
Cette désorganisation
individuelle et communautaire a laissé des traces conscientes et inconscientes
sur l'ensemble des Juifs : ceux qui ont subi la Shoah et même ceux qui
ne l'ont pas vécue, l'histoire inconsciente collective se chargeant de
cette transmission. La société environnante après une longue
période de refus de se confronter à la terrible réalité
de la Shoah, du génocide et de l'antisémitisme généralisé,
a reconnu l'ampleur de la catastrophe. Elle l'a célébrée
par des manifestations, des monuments, des procès, des journées
de commémoration afin d'inscrire dans leur mémoire collective
la gravité de tels événements, espérant que cela
ne se reproduise plus.
Malgré tout, le processus
antisémite se poursuit par la négation du génocide, ou
sa banalisation en le comparant à d'autres drames qui n'ont aucune commune
mesure avec la Shoah, on fait l'amalgame des mots, on utilise le terme de "nazi"
pour n'importe quelle violence.
Quand on pense que la Shoah
n'est que la résultante de 2000 ans d'histoire antisémite véhiculée
par le Christianisme, que des peuples entiers ont participé à
cette destruction en Allemagne, en Pologne, en Autriche, en France etc,... on
imagine que le processus est loin d'être achevé.
Le peuple allemand était
un peuple d'élite culturel, artistique et scientifique. Ce n'était
pas un peuple de sauvages, ni de barbares et pourtant, ils ont arraché
les barbes, les "payotes" de personnes âgées,
ils les ont déshabillés pour jouer avec eux. Des documents montrent
qu'ils n'étaient pas toujours en service commandé et que c'était
pour satisfaire leur haine antisémite.
On ne peut terminer cette
brève réflexion sur la Shoah sans parler de la pire des ignominies
qui consiste à remettre en cause l'authenticité des génocides.
Ce processus me semble lié avec celui qui consiste depuis plus de 3000
ans à nier toute l'influence du monde juif sur la société
environnante. Le juif témoin de sa société, est trop gênant
car il remet en cause toutes les certitudes des autres peuples. Cette attitude
de nettoyage culturel a précédé pendant des millénaires
son expression la plus horrible : celle du "nettoyage" éthnique
de la Shoah.
Cet effacement culturel
n'a pas empêché aux différentes civilisations de s'en approprier
ses valeurs en les déformant ou en les détournant de leur objectif.
II faudra respecter les âges des enfants, leur maturation, choisir le thème abordé avec précaution.
Pour toutes ces raisons,
il me semble indispensable de parler aux enfants de la Shoah comme élément
incontournable de notre histoire. II s'agit de faire le lien entre l'histoire
ancienne et l'histoire récente. II
faudra respecter les âges des enfants, leur maturation, choisir le thème
abordé avec précaution pour ne pas choquer la sensibilité
d'enfants de 5 à 10 ans. Les
éducateurs devront être bien formés pour pouvoir répondre
aux sollicitations des enfants, à leurs interrogations et leurs inquiétudes.
II est nécessaire
de prévoir des temps d'échanges libres après les interventions.
Il me semble également important d'éviter un discours pouvant
susciter de la culpabilité chez les enfants... Cette culpabilité,
qui aurait du mal à s'exprimer, risquerait d'entraîner des troubles
pathologiques réactionnels.
Par le récit de la
Shoah et de ses conséquences, les enfants sauront tirer l'énergie
nécessaire pour l'intérioriser et se renforcer aussi bien psychologiquement
que spirituellement.