Fin d’année civile, début d’un nouvel agenda où le chiffre de l’année n’est plus le même, et dans le brouhaha des différentes fêtes et autres soirées organisées à cette « occasion », peuvent surgir des mots comme, projets, réalisations, etc.…
Nous avons tendance de manière générale à nous imaginer que la dimension de réalisation de l’être passe avant tout par ce qu’il va faire, produire, voire exhiber devant le public de son entourage, de sa famille amis et connaissance.
Chacun se pose la question de ce qu’il va devoir construire et réaliser.
Cela passera généralement par une dimension quantifiable, visible, tels qu’une réussite professionnelle, un projet réalisé, de nouvelles acquisitions, de nouvelles conquêtes.
Ce sont généralement ce type de choses qui vous identifient un personnage et c’est à travers cela que nous avoir l’impression d’être devenus plus grands.
Dans sa célèbre épitre à son fils, que beaucoup de personnes ont l’habitude de lire régulièrement, le Ramban (Nahmanide) développe une idée légèrement différente.
« Prend cette habitude ô mon fils de parler de manière calme et tranquille avec tout un chacun et ce dans toutes les circonstances, afin que tu puisses être sauvé de cet immense défaut qu’est la colère. »
Dans toute la suite de cette missive, à aucun moment, le père ne donne de conseils pour atteindre la réussite ; mais il abonde en recommandations qui visent à lui donner les moyens d’apprendre à maitriser cette colère et de développer en parallèle les chemins qui amènent à la véritable humilité.
Les sages du talmud vont aller plus loin en commentant le verset. " Tolé Erets Al Belima » "D.ieu suspend le monde sur Belima » (Job, 26, 7) et ils traduisent ce dernier mot de la manière suivante : Belima, c’est celui qui est capable de souder littéralement sa bouche au moment d’une dispute !
Le monde tient par le mérite de ceux qui savent garder leur calme, et ne pas réagir lors d’un conflit avec une autre personne. Qui savent se taire et ne pas exploser face à celui qui a une attitude méprisante à leur égard.
L’expression réelle de la grandeur ne passe donc pas par des réalisations visibles mais par la capacité que nous avons d’être dans la maîtrise réelle de nous même et surtout de notre colère.
Bien plus que cela, les maitres du Talmud nous enseignent. « Ceux qui sont méprisé et ne méprisent pas en retour, ceux qui entendent des moqueries et autres méchantes paroles à leur égards, et ne répondent pas, c’est à leur sujet que le verset dit : et ses aimés (de D.ieu) sont comme le soleil dans l’expression de toute sa puissance »
Nous avons ici la définition de la Thora de ce qu’est la veritable grandeur, accomplissement réel de l’être. Non point des réalisations immenses, mais avant tout capacité d’être dans la veritable maitrise de soi, de ces colères provoquées par le comportement injuste ou non de l’autre.
Savoir supporter, ne veux point dire ne pas réagir et ne pas dire, mais avant tout être capable de prendre sur soi afin d’être sûr que les mots que nous aimerions jeter à la figure de cette personne qui a pu nous faire souffrir sont vraiment nécessaires.
C’est être capable de réfléchir aussi si cette réaction que nous voudrions avoir ne risque pas de générer des conséquences encore plus néfastes.
Cela peut nous sembler fou et inimaginable dans un univers où c’est dans la force de sa réaction que l’homme s’impose. Au-delà de cela, nous pourrions même penser que dette démarche est vouée à l'echec. La Thora nous apprend que non, et que c’est à travers ce type d’attitude, que l’homme acquiert sa véritable stature.
Pour parvenir à cela, c’est avant tout un travail personnel sur ce que nous attendons de nous-même qui va commencer.
Savoir maîtriser c’est être capable d’être dans le contrôle réel de son existence, et faire en telle sorte que cela ne soient pas les passions et les tendances profondes de notre vie qui guident celles-ci mais avant tout notre pensée et notre réflexion sous tendue par les valeurs de la Thora.
Etre fier de soi-même non pas juste en regardant ce que nous avons produit et réalisé, mais en observant nos évolutions intérieures et en observant nos réactions nouvelles face aux épisodes de notre vie.
Changement que peu de personnes arriveront à discerner dans un premier temps, car faisant avant tout partie de ce chemin invisible mais ô combien nécessaire, qui nous amène à la veritable conquête. Celle de nous même !
Prendre le temps d’y réfléchir en cette période où les nuits sont plus longues et où l’on a tendance à se retrouver un peu plus chez soi ; mettre en place une démarche construite a travers une étude et une réflexion nouvelle, voilà de belles perspectives pour aborder pour cette période hivernale prémisse d’un printemps de joie.
Rav Elie Lemmel
elie@lamed.fr