Q. Il arrive qu'un client commette une erreur et paie plus qu'il ne doit. Suis-je dans l'obligation de le lui signaler ? Qu'en est-il s'il me doit encore de l'argent pour des marchandises qu'il n'a jamais payées ?
R. Les joueurs de MONOPOLY savent que les règles de ce jeu n'interdisent pas de profiter des erreurs commises par un adversaire. Et la tradition juive, dans certains cas, considère qu'il appartient à celui qui paye de vérifier l'exactitude de son paiement, surtout quand les affaires sont menées dans un environnement ressemblant à celui d'une " jungle ".
Cependant, dans l'immense majorité des cas, l'éthique recommande de restituer les trop-perçus. Dans toutes nos transactions financières, nous devons nous efforcer à l'intégrité. Celui qui fait des affaires a droit à chaque sou qu'il gagne, mais il ne doit pas essayer d'en conserver plus qu'il n'en gagne. À la longue, il ne bernera peut-être pas ceux avec lesquels il traite, et certainement pas le Tout-puissant, qui fournit à toutes Ses créatures ce qui leur revient et qui attend d'elles qu'elles agissent conformément à Sa volonté. Voilà pourquoi une autorité éminente a pu écrire que les commerçants qui trompent leurs clients s'exposent à la ruine financière.
Si le payeur vous doit également de l'argent, rien ne s'oppose à ce que vous reteniez celui qu'il vous a remis. Dans ce cas, l'argent est réellement le vôtre ! Si cependant, vous entretenez avec cette personne des rapports de confiance, le procédé le plus recommandable est de l'informer qu'il a trop payé et que vous retenez l'argent comme paiement d'une autre dette.
Mais si vous traitez avec un client puissant qui pourrait tirer parti de votre aveu, vous n'avez pas à lui donner prise sur vous. Si, par exemple, vous avouez à votre compagnie d'électricité qu'elle vous a réclamé moins que ce que vous lui deviez, mais en ajoutant que vous gardez néanmoins la différence pour vous dédommager d'un accident causé par un de ses véhicules, elle ne vous traduira peut-être pas en justice, mais elle risque de vous couper le courant !
Même si vous n'êtes pas absolument sûr que l'argent vous est dû, vous pouvez le garder. Pourquoi devriez-vous assumer la charge de la preuve? Cependant, il est particulièrement important dans ce cas d'informer l'autre partie de votre action, afin qu'elle puisse présenter son point de vue.
Il peut vous arriver, dans certains cas, de vous attribuer le bénéfice du doute, en particulier s'il existe une bonne raison de penser que le client vous a offert réellement un prix plus élevé que celui auquel vous vous attendiez. Mieux vaut vérifier, même dans ce cas, qu'il ne s'agit pas d'une erreur due à quelque inattention. Rappelez simplement au client que vous lui vendez 800 articles au prix de quatre-vingts Euros pièce. Inutile de jeter le trouble dans les esprits en lui demandant s'il est effectivement d'accord avec ce prix, mais il faut que vous soyez certain qu'il a bien conscience de ce qu'il doit payer.
Quand les frères de Joseph sont revenus d'Egypte et ont découvert que leur argent leur avait été inexplicablement restitué, ils ne se sont pas réjouis de leur bonne fortune. Bien au contraire, sachant que cet argent ne leur appartenait pas, " ils ont tremblé dans la crainte, chacun disant à son frère : "Qu'est ceci, que D.ieu nous a fait ?" " (Genèse 42, 28). Ils n'ont trouvé le repos que lorsqu'ils ont rapporté cet argent et que le chambellan leur a assuré que c'est D.ieu qui l'avait remis dans leurs sacs (ibid. 43, 23).
Sources : Choul'hane 'aroukh - 'Hochèn michpat 348, 1, et Beèr hagola.
Traduction et adaptation de Jacques KOHN