Q. : La semaine dernière dans mon magasin, quelqu'un nous a remis en paiement d'un achat un faux billet de banque. Est-ce que nous devons passer ce billet par pertes et profits, ou pouvons-nous " refiler le bébé " plus loin ? Somme toute, ce n'est pas nous qui sommes les faux-monnayeurs ! Pourquoi devrions-nous subir la perte ? D'un autre côté, quelqu'un d'autre dans le cheminement du billet va être laissé sans recours.
R.
: Je comptais très sincèrement avec votre sentiment de frustration résultant de la réception d'un faux billet. Mais vous n'avez pas le droit de le transmettre à quelqu'un d'autre.
La transmission d'un faux billet de banque soulève deux problèmes distincts. Le premier est que vous trompez la personne qui le reçoit, puisque vous le lui présentez comme authentique. C'est un cas type d'activité commerciale trompeuse. La loi juive rejette sans aucune ambiguïté l'idée selon laquelle ce serait à l'acheteur de se méfier, et elle tient le vendeur tout autant que l'acheteur responsables de la manière dont ils présentent ce qu'ils ont à offrir. Le marché est comme un terrain de sports. C'est un endroit où il est normal de s'opposer, parfois même avec dureté, mais où l'on doit obligatoirement respecter les règles du jeu.
Le second problème réside dans le fait que l'utilisation de la fausse monnaie est un crime contre le souverain. Ce n'est pas seulement un manquement à la loi, comme le stationnement en double file. C'est porter atteinte à l'autorité de l'Etat.
Il est à la mode, aujourd'hui, de remettre cette autorité en question. La tradition juive, quant à elle, tout en affirmant que l'autorité ne doit pas se transformer en tyrannie, considère le respect dû au gouvernement et sa légitimité comme les plus importants facteurs de paix et de stabilité.
Aussi la fabrication d'une fausse monnaie est-elle considérée comme un crime d'une particulière gravité.
Si l'on peut identifier la personne qui a remis le faux billet, on peut lui demander de payer avec du bon argent. C'est un acte de civisme de dénoncer la contrefaçon, dans la mesure où une seule personne fait circuler de grandes quantités de coupures et où chacun de ceux à qui on les a remises considère souvent que leur montant est trop insignifiant pour justifier la perte de temps imposée par le dépôt d'une plainte. Il arrive ainsi que les autorités restent dans l'ignorance d'un crime majeur, alors que des milliers de citoyens en sont informés.
Sources : Choul'han 'aroukh, 'Hochèn michpat 228 ; Michna Avoth 3, 2 ; Choul'han 'aroukh, 'Hochèn michpat 425, 1 dans le Rema.
Traduction et adaptation de Jacques KOHN