Il y a quelques années, un dessin animé très connu mettait
en scène la scène suivante : deux hommes assis dans un bar en
train de boire de la bière. Sous le regard attentif de son compagnon,
l’un d’eux confie : « Si j’avais su ce qu’était
le mariage, dès le lycée, j’aurais rejoint les partisans
de la controverse. »
Heureusement, pour la plupart, nous ne considérons pas le mariage comme
un débat ininterrompu. Même s’il existe dans chaque couple
des moments où la communication n’est pas optimale
La preuve la plus flagrante d’une mauvaise communication, est la fréquence
des querelles. Une autre preuve, moins évidente, est lorsque l’un
des époux ne se sent pas apprécié, considéré,
respecté, lorsqu’il a le sentiment d’être incompris.
Pour remédier à cela et permettre aux conjoints de satisfaire
leurs besoins élémentaires au sein du couple, j’essaie
de leur enseigner certains des quatre outils de communication suivants, qui
sont, il me semble, essentiels au succès d’un mariage.
Si l’un des outils vient à manquer, cela limite sérieusement
la qualité de la relation. Mais s’il en manque plusieurs, cela
peut mettre n’importe quel mariage en péril.
1. EXPRIMER DES SENTIMENTS NEGATIFS DE MANIERE CONSTRUCTIVE
Par « sentiments négatifs », il faut comprendre tous les
sentiments qui nous déplaisent habituellement chez les autres, tels
que : l’amertume, la rancune, la déception et le mécontentement.
De la même manière que le chaud ne peut exister sans le froid,
il ne peut y avoir de positif sans négatif. Afin de réussir dans
son couple, il est nécessaire de savoir exprimer ses sentiments négatifs.
Car si vous exprimez vos sentiments négatifs de manière incontrôlée
et violente, les conséquences pour le reste de votre famille peuvent être
désastreuses. Et même si vous les exprimez de manière plus
mesurée - sous forme de sarcasmes, de moqueries ou d’attaques
verbales - votre communication peut en souffrir.
Un mari et une femme doivent exprimer leurs sentiments négatifs pour
pouvoir s’adapter et s’ajuster l’un à l’autre.
Se retenir ne fait qu’empirer les choses, c’est comme la pression
qui monte à l’intérieur d’une cocotte-minute.
Alain est l’exemple type du mari qui n’a jamais appris à exprimer
ses sentiments négatifs posément. Chaque fois que Sylvie dit
ou fait quelque chose qui lui déplaît, il s’emporte avec
tellement de rage qu’elle en est pétrifiée. Le jour suivant,
submergé de honte, il promet de ne plus recommencer.
Un jour, Alain encaissa en silence chaque remarque désobligeante que
Sylvie lui fit. Puis, alors qu’ils se tenaient dans la cuisine, Sylvie
le critiqua une fois de plus, d’une manière qui lui sembla injuste.
Ne pouvant se retenir plus longtemps, Alain saisit calmement la bouteille de
liquide vaisselle pour en verser dans une marmite de spaghettis qui se trouvait
sur le feu et quitta la maison.
Alain pensait à tort qu’il pouvait maintenir la paix chez lui
en réprimant tout sentiment négatif. De longs mois après
cet incident, Alain s’efforce toujours de réparer la rupture de
confiance qui s’est introduite entre eux.
Qu’a-t-il fait de mal ? Quelle erreur a-t-il commise ? Comment aurait-il
dû dire à Sylvie ce qui le dérangeait ?
- Règle n°1 : Ne pas exagérer.
Alain avait l’habitude d’utiliser des mots tels que « toujours » et « jamais ».
Si ces exagérations permettaient à Alain de se défouler,
elles ne faisaient que rendre Sylvie insensible à ses paroles.
«
Je ne le fais pas toujours », pensait ou disait parfois Sylvie, prouvant
qu’elle l’écoutait quand même.
- Règle n°2 : Ne lisez pas dans ses pensées.
Rien n’est plus horripilant que de s’entendre dire : « Je
sais mieux que toi ce que tu penses ». Malgré tous vos efforts,
l’autre est convaincu de votre mauvaise foi et de vos mauvaises intentions.
- Règle n°3 : Parlez à la 1ère
personne et non à la
2e.
Une critique qui commence par « Tu » est généralement
perçue comme une attaque.
Par exemple : « Tu n’apprécies pas suffisamment
mes efforts. »
Sylvie trouvait qu’elle ne recevait pas suffisamment de considération
de la part d’Alain. Et elle avait raison. Mais en commençant sa
remarque par « Tu », elle suscitait de sa part une réaction
défensive et non sa sympathie. Il aurait mieux valu dire :
«
J’aimerais que tu réalises quel mal je me donne pour prendre soin
de toi et des enfants. »
- Règle n°4 : Ne généralisez
pas. Soyez précis
et donnez des exemples.
La généralisation vous permet de tout prendre en compte sans
rien laisser de côté et d’exprimer votre colère de
manière satisfaisante. Mais sachez qu’elle empêche votre
conjoint de vous comprendre.
2. ECOUTER DES SENTIMENTS NEGATIFS SANS ETRE SUR LA DEFENSIVE
Vous avez fini par comprendre que vous n’êtes pas le seul à avoir
des sentiments négatifs. Tout comme votre femme, vous faîtes aussi
des choses qui la rendent folle. (Oups, je viens juste de transgresser la règle
n°1 ci-dessus. D’un autre côté, dans votre cas particulier,
ce n’est peut-être pas une exagération !)
Afin de compléter le réseau de communication qui doit permettre
une bonne émission et une bonne réception des messages, il faut
que les époux apprennent à écouter les sentiments négatifs
de l’autre sans se sentir agressés. C’est bien plus difficile
que d’apprendre à exprimer vos sentiments négatifs convenablement,
mais c’est un élément essentiel à la réussite
de votre mariage.
« Je voulais simplement dire … », « Tu sais pourquoi
j’ai dis ça ! » et « Tu as fait la même chose
des centaines de fois », sont des phrases de défense classiques.
Quel mal y a-t-il à être sur la défensive
? Ne faut-il pas justifier ses actions et redresser les torts ?
Non, ce n’est pas une bonne chose. En détaillant le motif de
vos actions, vous montrez à votre conjoint que seul votre bon droit
vous importe, et non ses sentiments.
Imaginez que votre femme vous ait demandé de surveiller un poulet dans
le four et que vous ayez été négligent et l’ayez
laissé brûler.
Elle entre dans la cuisine en reniflant et dit :
«
Je sens une odeur de brûlé. Est-ce qu’il y a quelque chose
sur le feu ? »
Vous répondez calmement : « Non, non. Le poulet
est juste un peu trop cuit. »
« Trop cuit ? » fulmine votre femme, en voyant le poulet carbonisé dans
le four. « Tu appelles cela trop cuit ? Il est brûlé. »
« Allez ! Ne sois pas difficile », dîtes-vous en essayant
de minimiser votre erreur. « Les épices sur le dessus ont juste
un peu bruni. Le poulet est très bien, je l’aime comme ça. »
« Mais je t’ai demandé exprès de surveiller le poulet
pour qu’il ne brûle pas. Comment as-tu pu faire une chose pareille
? »
Vous avez fait une erreur, mais ce n’est pas la fin du monde. Si votre
femme est déçue du résultat, en essayant de vous défendre,
vous ne faîtes qu’empirer les choses. Elle aura l’impression
que vous lui faîtes la sourde oreille et que ses sentiments ne comptent
pas, sont sans importance.
En résumé, en vous mettant sur la défensive, vous ne
faîtes qu’ajouter de l’huile au feu de son courroux et donnez
l’impression de l’ignorer.
Oui, oui, je sais ce que vous êtes en train de penser
:
«
Si ma femme est fâchée après moi, elle doit absolument
connaître les raisons de ma conduite. »
Faux. Pour évaluer la situation et vous attribuer un blâme, votre
femme n’a pas besoin de savoir tous les détails. Si elle ressent
le besoin d’exprimer son sentiment de frustration ou de déception,
ces détails n’ont d’ailleurs pas grande importance.
3. EXPRIMER DES SENTIMENTS POSITIFS SANS RETENUE
Le terme « sentiments positifs » désigne des émotions
telles que l’affection, la chaleur, l’appréciation, l’approbation,
l’admiration et le respect.
Ces sentiments sont positifs, parce qu’ils génèrent généralement
des réactions positives chez les personnes qui les ressentent et chez
celles qui les reçoivent. Il n’est pas étonnant que la
plupart de ces mots commencent par la lettre « A ».
Malheureusement, dans notre société occidentale, nous faisons
plus souvent l’expérience de sentiments négatifs que de
sentiments positifs. A l’école, nous sommes plus souvent critiqués
que loués. A la maison, nous sommes plus souvent punis ou grondés,
que récompensés. Et en grandissant, nous sommes plus souvent
le témoin de scènes de colère et de frustration que d’affection
et d’admiration.
Du fait de cette exposition disproportionnée aux sentiments négatifs,
nous acquérrons une certaine aisance dans leur expression. Il n’est
donc pas surprenant qu’une fois mariés, les adultes éprouvent
plus de facilité à critiquer leur conjoint qu’à le
complimenter. Il manque alors un ingrédient essentiel à leur
relation.
Comme je le dis souvent aux couples avec lesquels je travaille,
on peut comparer une relation à un compte en banque. Si vos dépôts sont
excédents par rapport à vos retraits, votre compte est bénéficiaire.
Si vos retraits excèdent vos dépôts, vos chèques
sont sans provision et votre compte doit être fermé.
De même, si vos compliments sont plus nombreux que vos critiques, votre époux
y prêtera attention. Mais si vos plaintes sont plus nombreuses que vos
compliments, elles tomberont dans l’oreille d’un sourd.
Afin de se sentir bien dans son couple, chaque époux doit pouvoir exprimer
l’éventail de ses sentiments en toute liberté.
4. ECOUTER DES SENTIMENTS POSITIFS SANS GENE
Certaines personnes ne parviennent jamais à accepter un compliment.
Si quelqu’un essaie de les complimenter, elles changent de sujet, détournent
la tête, rougissent, toussent ou tout à la fois.
Elles trouvent plus facile de complimenter les autres et le font souvent. Mais
quand elles sont l’objet de compliments, elles témoignent ouvertement
leur inconfort.
Danielle et Avi ont atteint un stade critique dans leur mariage.
A sa grande surprise, pour la première fois en vingt ans, Avi a prononcé le
mot « divorce ». Danielle en a été anéantie.
Au cours des mois qui suivirent, Danielle et Avi ont appris à parler
et à écouter. Et leurs conflits matrimoniaux ont pratiquement
disparu.
Lors d’une entrevue, je les ai encouragé à exprimer leurs
sentiments positifs, en les prévenant que cela pouvait demander un peu
d’entraînement et en leur conseillant de commencer dans mon bureau.
Alors que Danielle s’agitait sur son siège, Avi s’est montré d’emblée
très enthousiaste. Il a déclaré qu’il se sentait
frustré par l’inconfort systématique de Danielle à l’écoute
d’un compliment.
« J’admire vraiment la façon dont tu gères la maison
et dont tu t’occupes des enfants », a commencé Avi avec
entrain. « Quand ils sortent de la maison, ils ont toujours l’air
propres et bien habillés, alors que d’autres enfants semblent
négligés. Je suis toujours fier de l’apparence de mes enfants. »
Le visage de Danielle s’est coloré vivement, elle a ri nerveusement,
puis s’est tournée vers moi :
«
Il dit cela uniquement parce que vous le lui avez demandé. »
« Dr. Wikler me l’a peut-être demandé », répondit
Avi, « mais je suis sincère. »
Je dis à l’attention de Danielle :
«
Il semble qu’entendre un compliment vous mette mal à l’aise. »
Danielle nous confia alors qu’elle avait été élevée à l’européenne,
sans jamais être complimentée directement. Ses parents ne complimentaient
Danielle et leurs autres enfants qu’occasionnellement, au cours de leur
conversation avec des voisins ou des membres de la famille. Cela aurait été les
gâter que de leur offrir une approbation directe.
« Si nous n’étions ni grondés, ni punis »,
expliqua Danielle, « cela voulait dire que nous nous conduisions bien. »
Il fallut quelques semaines d’exercices de communication supplémentaires, à la
maison et à mon cabinet, pour que Danielle et Avi s’expriment
et s’écoutent l’un l’autre avec une relative aisance.
Quand nous nous sommes revus pour la session finale, Danielle a exprimé son
avis sur cet aspect de la thérapie.
« Quand vous nous avez demandé pour la première fois de
nous complimenter l’un l’autre, j’ai d’abord cru que
vous étiez tombé sur la tête, je me suis dit : ‘Je
ne vais jamais faire une chose pareille’. Et puis, j’ai réfléchi à ce
que vous avez dit – au sujet de ma gêne face aux compliments – et
j’ai décidé de vous faire confiance.
Après avoir exprimé nos sentiments positifs durant ces dernières
semaines, je vois à quel point c’est important. Et je vois à quel
point vous avez raison. Cette histoire de sentiments positifs a ajouté une
dimension à notre relation qui, je le croyais, n’existait pas.
Et, aujourd’hui, nous sommes plus proches. »
Un extrait de Ten Minutes a Day to a Better Marriage : Getting Your Spouse
to Understand You par Dr Meir Wikler ( aux Editions Artscroll/Mesorah, 2003)
Traduction et Adaptation
de Tsiporah trom