Etant née en 1948, je n’ai jamais été confrontée à une catastrophe aussi impressionnante et soudaine que les tremblements de terre, ou Tsunamis, qui selon les dernières estimations, ont causé la mort de plus de 140.000 personnes. Ayant habité Israël pendant le conflit terroriste des dernières années, j’ai malheureusement pris l’habitude de pleurer à des enterrements d’enfants. Cependant, entendre parler d’enterrements en masse de centaines d’enfants m’émeut et me bouleverse très fortement. Comment devons-nous et comment pouvons-nous réagir face à une tragédie de cette ampleur ?
Un jeune Israélien qui travaillait en Thaïlande lorsque la région fut frappée par le Tsunami, rapporta à sa famille qu’il ne constatait aucune panique parmi les locaux. Ils sont Bouddhistes, expliqua-t-il, et croient en la Loi du Karma. Ils acceptent leur destin.
La Loi du Karma dit que rien de ce qui touche l’être humain n’arrive par hasard. C’est plutôt une loi précise, concernant le principe de causes et effets, actions et réactions, qui régit tout. Les Américains diraient : «Tout se paie». Les actes des êtres humains entraînent des conséquences qui, tôt ou tard, comme le Tsunami qui se construit au cours du temps et sur la distance, frappent avec une force redoublée.
Certains éléments de ce système de pensée sont compatibles avec le Judaïsme. Il n’y a certainement pas de hasard dans l’univers. La conduite de l’homme met en marche des forces spirituelles qui se manifestent finalement à travers des évènements physiques, et se retournent contre les hommes eux-mêmes.
Le Judaïsme en revanche, se démarque de la Loi du Karma de manière significative. Tout d’abord, la Loi du Karma concerne exclusivement l’individu. Un individu qui vole subira le même sort, sous cette incarnation ou sous la suivante. La malhonnêteté d’un individu se retournera contre lui-même.
Elle ne peut causer la souffrance d’autres personnes. Il existe cependant un concept de Karma de groupe ; où l’effet boomerang est effectif et touche les coupables. C’est ainsi que les coupables deviennent victimes.
Le Judaïsme, pour ça part, attribue aux actions un effet plus étendu. Un homme qui vole 100 dollars à Tel-Aviv détériore la fibre morale de Mexico, et peut provoquer des déprédations massives à Melbourne. De la même façon, quelqu’un qui fait une Mitzva (bonne action) à Haïfa peut empêcher un accident de voiture à Londres, ou qu’une opération chirurgicale ne se complique à Los Angeles. Les canaux spirituels «de causes et d’effets» n’agissent pas de manière évidente. S’ils ne peuvent être pistés, ils sont tout du moins très puissants.
Les vagues spirituelles, comme les vagues océaniques, ne perdent aucunement de leur force au cours du temps.
LA CAPACITE DE CHANGER
La deuxième différence, est que le Karma est inexorable. Une fois commise, la mauvaise action est, selon ce qui se dit en Inde, assimilée aux défenses d’un éléphant. Elle ne se rétracte jamais. Le Judaïsme, au contraire, enseigne le concept de Techouva. La Techouva signifie qu’on peut avoir des remords et modifier sa conduite, ce qui a pour effet d’effacer les actions passées, spirituellement parlant. En fait, si quelqu’un fait Techouva par pur amour pour D.ieu, le canal souterrain, la rivière de feu, se transforme en une force positive, en une rivière d’eau douce.
Voilà précisément ce que le Judaïsme préconise en matière de réaction aux désastres. Le Talmud dit que lorsque l’on souffre, on doit examiner ses propres actes, ce qui implique que la Techouva après une mauvaise action peut changer notre sort. Qu’en est-il lorsque nous ne sommes pas directement touchés mais qu’on entend parler d’une catastrophe qui s’est produite en un lieu éloigné? Le Talmud dit que si l’on entend parler d’une catastrophe telle qu’un tremblement de terre, on doit faire le lien avec la tragédie en examinant ses propres actes.
Il est approprié de réagir à la catastrophe actuelle, qui avoisine l’échelle d’Hiroshima, en contribuant financièrement à l’effort pour soulager les victimes. Cependant l’acte physique n’exclut pas une réponse spirituelle. Dans le cas où on se demanderait «que faire?» voici quelques réactions spirituelles possibles :
1. Permettez-vous de pleurer la perte tragique de vies humaines. Ne vous autorisez pas de distance émotionnelle en vous perdant sous la masse d’information médiatique. Ressentez la douleur de l’évènement.
2. Reconnaissez la fragilité - donc le caractère précieux - de la vie. Les gens qui se trouvaient sur les plages du sud-est asiatique ce jour-là, n’ont pas été prévenus de l’arrivée de leur dernière heure. Nous ne le serons pas non plus. Appréciez la valeur de chaque instant.
3. Reconnaissez l’effet spirituel de chacune de vos actions, non seulement sur vous-même, mais aussi sur le monde entier. Mentir de façon mesquine, voler, tromper, cancaner, pratiquer la promiscuité ou l’exploitation, provoque des vagues de négativité. Quand plusieurs personnes s’engagent dans de tels comportements, ces vagues peuvent devenir cycliques.
4. Changez une de vos actions. Entreprenez l’accomplissement d’une nouvelle Mitzva, ou évitez un type de comportement négatif. C’est une mesure de défense plus efficace que n’importe quel système préventif.
Maïmonide affirme que celui qui refuse de réagir à la souffrance en faisant Techouva, est cruel. Cela implique que nous détenons le pouvoir de mettre fin à la souffrance humaine. Comment peut-on regarder les photos de corps humains sur les plages - chacun étant l’être cher de quelqu’un - et ne pas entreprendre tout ce qu’on peut pour repousser la prochaine catastrophe ?
Lorsque la catastrophe est survenue, CNN.com a incité ses lecteurs à spéculer sur la possibilité énoncée par un sismologue reconnu, que l’éruption d’un volcan dans les îles Canaries pourraient causer des glissements de terrain ; le Tsunami ainsi créé traverserait l’océan Atlantique avec assez de force pour détruire New York. Le Judaïsme ajouterait qu’un tel scénario ne serait pas causé par le destin, ni par des phénomènes géologiques, ni même encore par des forces frappant au hasard. Il est en notre pouvoir d’éviter le prochain désastre par les choix moraux.