Première
  partie
 - Ils arrivent ! Ils arrivent
  ! crie Naomi tout en dévalant l’escalier.
    -	Ils arrivent ?! répondent Hillel et Yaïr en la suivant.
    - Oui ! J’ai vu la voiture de Papa par la fenêtre de ma chambre
      ! Maya ! Viens vite !
  Maman, plus excitée encore que ses petits, sort précipitamment à la
        rencontre des nouveaux venus !

  La camionnette stoppe. La portière s’ouvre et tout le monde se
          jette dans les bras les uns des autres.
  Il faut vous dire les enfants, que cela fait plus de trois ans que
            les deux familles ne se sont pas revues, car la première habite Israël et
            la deuxième vit encore en France.
  L’émotion est très grande, car dans un mois, Miriam, sœur
            aînée de Naomi, se marie.
  Tati Sandra pleure dans les bras de Maman, Oncle Ephraïm tape sur l’épaule
              de Papa, alors que Jérémie et Jordanna essaient de sortir d’une
              grosse valise les cadeaux préparés pour leurs cousins !
  -	Oh non, mes chéris ! s’exclame soudain Maman tout en séchant
                ses yeux. Pas au beau au milieu du jardin ! Entrez donc d’abord vous
                rafraîchir ! Vous avez tout le temps de défaire vos bagages ! 
 Les heures suivantes se
    passent dans un joyeux désordre. Le maître
  et la maîtresse de maison installent les parents dans le grenier, spécialement
  aménagé pour les invités !
  Les garçons aident Jérémie à transporter son sac
    dans leur « repaire de corsaires », et Jordanna suit Naomi et Maya
  dans leur « chambre-maison-de-poupées ».

  Les deux fillettes sont très contentes de faire découvrir à leur
  cousine chérie toutes les merveilles de leur « domaine » :
  - Ca, c’est ton lit ! Maman l’a mis sous la fenêtre pour
  ne pas que tu sois dérangée par le « Mazgane » !
  - Par le quoi ?
  - L’appareil à air froid ! Parce que dans notre pays, il fait
  très chaud en été !
  - Ah ! dit Jordanna.
  - Ici, ce sont les livres !
  - Les livres ? répond très intéressée la petite
  française. Tu sais déjà lire ?
  - Heu… un peu ! … Mais je dois apprendre l’année prochaine
  ! Quand je serai en Kita Aleph !
  - Au CP, tu veux dire ! Et bien moi aussi !
  - Ah oui ? C’est chouette ! On va pouvoir s’écrire !
  - Oui, c’est chouette ! Enfin … Le problème est que je vais
  apprendre le français, et toi l’hébreu !
  - Oh, t’en fais pas ! On trouvera bien un moyen de s’arranger
  !
  Puis elle se tourne et continue la visite guidée :
  - Là, ce sont les cubes, et voici les poupées, et leur cuisine
  !
  - Elle est à moi ! avertit Maya boucles d’or. C’est Miriam
  qui me l’a donnée pour mon anniversaire de quatre ans !
  - Ouah ! s’émerveille Jordanna. Elle est super !
  - Oui, tu as raison ! confirme la grande sœur. Miriam nous offre toujours
  de très beaux cadeaux.
  - C’est vrai ! Quand elle est venue en France cet hiver, elle m’a
  apporté un bébé qui parle et qui pleure !
  - Ah bon ?! répond Naomi un peu rêveuse…
  - Oh, mais tu n’as
    pas encore vu ce que j’ai reçu de sa part
  pour mes six ans ! C’est la plus belle chose du monde !
Elle se dirige alors vers
    la commode, de l’autre côté de
  la pièce. Jordanna et Maya la suivent :
  - Attention, c’est très, très, précieux ! affirme-t-elle
                                                avec le plus grand sérieux. … Je ne permets à personne
                                                d’y toucher, sauf à mon Papa à ma Maman et à Miriam
  ! Regarde, c’est une boule de VERITABLE cristal !
  A l’intérieur, plongée dans une eau très claire,
  apparaît une merveilleuse maison blanche !
  Et, pour impressionner davantage
                                                    sa cousine, Naomi prend la
                                                    boule dans
                                                    ses mains,
                                                    la secoue, entraînant ainsi une envolée de minuscules colombes
  :
  - C’est beau, n’est-ce pas ! dit-elle.
  - C’est magnifique ! souffle la fillette. Magnifique !
  - Tu as bien entendu reconnu
                                                          le Beth Hamikdach !
          s’assure la petite israélienne.
  - Le quoi ? répond Jordanna surprise.
  - Le Beth Hamikdach
                                                              ! Tu n’as pas remarqué que la maison que l’on
                                                              voit dans la boule, est le Beth Hamikdach ?
  - Euh … Hésite la jeune invitée. …Qu’est-ce
                                                                que c’est le Beth a… J’sais pas quoi ?
  Les sœurettes la fixent ahuries, très surprises de se rendre compte
  que leur cousine chérie ignore ce qu’est le Beth Hamikdach.
  Leur réaction la rend mal à l’aise.
  Naomi le comprend
                                                                    et se ressaisit
                                                                    très vite : 
  - Le Beth
                                                                      Hamikdach
                                                                      est la
          grande maison que
                                                                      Chelomo
          Hamélech (Salomon,
                                                                      le roi) a construit pour Hachème (D.ieu), Je crois qu’en français,
                                                                      on l’appelle le Tempelerr… Ou quelque chose comme ça ! essaie-t-elle
                                                                      d’expliquer.
  - D.ieu
                                                                        a une
          maison ? S’étonne Jordanna. 
 A cet instant, les garçons tapent à la
  porte de la chambre :
    - Naomi, est-ce que tu pourrais montrer ta boule de cristal à Jérémie
    ? demandent-ils très poliment.
  - Oui, bien sûr ! Entre Jérémie ! fait-elle, fière
      d’être ainsi le centre d’intérêt du groupe.
      Venez tous vous asseoir ! J’étais justement en train d’en
      parler à Jordanna.
  Les trois s’installent sans tarder, l’un sur l’unique fauteuil
        de la pièce, et les deux autres sur les lits.
  Naomi remue une fois de plus le cristal, et les minuscules colombes blanches
          s’envolent à nouveau dans le ciel de la sphère transparente.
  Jérémie s’approche de plus près pour mieux les voir
          :

  - Oh, mais c’est le Beth Hamikdach ! s’exclame-t-il tout à coup.
  - Tu le connais ? interroge sa sœur surprise.
  - Evidemment ! Papa nous en a parlé à Hanoukka ! Le Temple que
                les Grecs ont sali, c’est cette maison ! Tu ne te souviens pas ?
  - Hanoukka ? … La chandelier dans le … ! ? Mais oui ! Je me rappelle à présent
                  ! s’écrie joyeusement Jordanna.
  Puis le garçon de en plus en plus fasciné par le globe translucide,
                    ose :
  - Naomi, me permets-tu de le prendre dans la main ?
  - Non ! Elle est trop précieuse ! se rebelle la petite fille. Seuls
                        mon Papa, ma Maman et Miriam ont le droit d’y toucher !
  - S’il te plaît, insiste Jérémie, je te promets de
                          faire très attention !
  - Voyons Naomi, sois gentille… ! gronde Hillel avec douceur. N’oublie
                            pas qu’il est notre invité !
 La cousine hésite une minute, puis, bien que fort inquiète, cède à la
                              pression de son frère :
  - Tiens ! dit-elle en la lui tendant.
  Le garçon la remercie
    chaudement, et prend l’objet avec toutes
                                  les précautions du monde.

  - T’as bien de la chance ! A nous, elle ne nous a jamais laissé y
                                    toucher ! lance Yaïr franchement jaloux.
  Naomi détourne la tête gênée.
  - Sais-tu que Miriam nous a assuré que c’était une boule
                                        très spéciale ! Il parait qu’elle renferme un grand secret
                                        !!! dit Hillel pour détourner la conversation vers un autre sujet.
  - Ah bon ! répond Jordanna très intéressée.
  - Oui ! Mais je ne la crois pas ! Parce
                                            qu’elle nous raconte souvent
                                            des histoires ! poursuit-il en riant.
  - Moi si ! soutient Naomi avec insistance.
                                              Elle « m’a promis » que
                                              ce n’était pas un mensonge !
Au même moment, alors qu’il joue à remuer la boule sans
  se lasser, Jérémie se penche vers le reposoir de l’objet
  précieux et déchiffre à haute voix le verset inscrit sur
  le socle : (Achivenou hachème.)…Ramène-nous D.ieu..., renouvelle
  nos jours anciens…
  Tout à coup sortant de la sphère dans une envolée d’ailes
    et de lumières, des centaines d’oiseaux emportent dans un tourbillon,
    tous les enfants se trouvant dans la pièce, et les font entrer dans
  le cristal.
  La bande de cousins atterrit avec fracas, sur le sol froid de l’esplanade
  du Temple.

Tout
      est blanc, ou presque, dans la boule: le parterre, les murs du bâtiment
          (oulam) haut comme dix-sept étages, et même le ciel !
  Abasourdis par leur virée, les enfants se relèvent l’un
          après l’autre. Maya commence à pleurer, et tandis que Jordanna
          essaie de la calmer, apparaît soudain, à l’entrée
  de la bâtisse, un très étrange objet.
  Naomi, pour l’avoir observé des heures durant dans le grand livre
  de son papa sur le Beth Hamikdach, la reconnaît tout de suite.
  C’est la menora en or qui avance sur le sol de la grande place !
  - Bonjour ! dit-elle Jovialement. A qui ai-je l’honneur ? Oh, ne me dites
              rien ! Laissez moi deviner ! Vous êtes les Cohanim (prêtres) revenus
  prendre leur service, n’est ce pas ? Mon D.ieu, quel bonheur !
  -	Pas du tout ! fit Hillel, seul à pouvoir réagir.
  - Pas du tout ? Il est vrai que vous ne portez pas leurs vêtements !
                  Dommage ! Et bien, si vous n’êtes pas des Cohanim, vous allez devoir
                  rester sur le parvis (azara), car le kodech (salle où l’on place
                  la menora, la table des pains, et l’autel des encens) est interdit au
  commun des mortels. 
Et Je ne parle pas du Kodech
    HaKodachim( salle de l’arche
  sainte, saint des saints) !
  Les enfants la regardent de plus en plus ahuris.
  -	Mais qui êtes-vous donc !? poursuit-elle. Des « pèlerins» (olé laréguel)
  peut-être !
  Naomi, la bouche toujours ouverte, fait un léger non de la tête.
  -	Non ? De toute façon, nous sommes si seuls, et depuis si longtemps
                            qu’un peu de visite ne nous fera aucun mal ! Sachez donc, que qui que
  vous soyez, vous êtes les très bienvenus !
  Puis, du fond de la place, plus en clopinant qu’en marchant, arrivent
  la table du pain, et l’autel des encens.
  -	Voici mes amis qui nous rejoignent ! Léhipane ! Mizqueto ! Ici ! Venez
  accueillir nos hôtes !
  - Bonjour ! Souhaitèrent les deux compagnons ! Bienvenue au Beth Hamikdach
                                  ! Un Beth Hamikdach malheureusement vide, et complètement isolé !
  :
  Pas de feu ! Pas d’animaux ! Pas de Cohanim (prêtres) ! Et pas
                                    de Léviim (gardiens des Portes et musiciens) qui chantent ! Cela est
  bien triste !
  -	Le Beth Hamikdach ? s’exclame Yaïr reprenant enfin ses esprits.
                                      Ce n’est pas possible ! Il a été détruit depuis
  plus de deux milles ans !
  -	Où sommes-nous alors ? s’écrie Jordanna, tenant la main
  de Maya muette de terreur.
  -	Je … Je crois que nous sommes dans la boule ! souffle sans trop d’assurance
  Jérémie.
  - La boule ? Quelle boule ? demandent
                                            en chœur nos trois compères
  !
  - Ma boule de cristal ! affirme Naomi émerveillée par cette idée.
  - Boule de cristal ? Allons, allons
                                                ! Il n’y a pas de boule de cristal
                                                ! Vous êtes ici dans le Beth Hamikdach. Et nous, nous sommes les « objets
                                                serviteurs » que Betsalel a fabriqué sur l’ordre du Roi
  de l’Univers !
  - Et a quoi servez-vous ? interroge
  Jérémie très intéressé.
  - Nous servons à recueillir les forces que Hachème envoie sur
                                                    la terre et à les distribuer à qui de droit ! Moi par exemple,
                                                    je suis la ménora, Le grand responsable en chef de la lumière
  du monde !
  - Et moi, Léhipan, je suis la table des pains (léhem a panim),
                                                      commandant général de la puissance du matériel ! Et je
                                                      suis bien triste, car étant donné que je suis réservé aux
                                                      prêtres, je n’ai pas le droit de vous faire goûter de mon
  pain ! Il est pourtant le meilleur du monde !
  Mais je vais vous confier
                                                        un secret ! rajoute-t-il
                                                        en chuchotant,
                                                        mon
                                                        pain ce n’est pas du pain, c’est de la matsa (pain azymes), car tout
                                                        est « Cacher pour Pessah (pâque juive) » dans la grande maison
    de Hachème (Dieu) ! Le saviez-vous… ?
  -…  
Tout à coup un tourbillon d’oiseaux apparaît dans le ciel…
