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Ethique juive - La pollutionLa pollution est-elle interdite d’après la loi juive ?

Q. La pollution est-elle interdite d’après la loi juive ? Le pollueur doit-il payer des dommages comme toute autre personne qui fait du tort à autrui ?

R. Parmi les tous premiers commandements donnés dans la Torah se trouvent ceux qui prévoient des payements pour des dommages. Dans le chapitre 20 de l’Exode, figurent la révélation sur le Mont Sinaï et les Dix Commandements et, au chapitre suivant, les détails pratiques des dommages pour voie de fait, des dommages causés par des animaux et ainsi de suite.

Toutefois, en général, les torts décrits dans la Torah sont directs et graves. Ils ne ressemblent pas vraiment aux dommages plus diffus et modérés causés par la pollution. Afin de pouvoir traiter ce type de problèmes, la Michna et le Talmud nous livrent un régime de dommages d’un tout autre type, connu sous le nom de nizké chekhénim ou « dommages entre voisins ». Alors que le premier type de dommages fait l’objet d’une discussion dans le traité Baba Kama (première porte), le second est débattu dans le traité Baba Batra (dernière porte). Ce traité présente une analyse très méthodique et profonde d’une réglementation de la pollution, comprenant la pollution de l’air, la pollution sonore, les problèmes de foule, etc.
Le modèle des relations humaines qui sous-tend ce régime est bien différent de celui qui est à la base des dommages classiques. La loi concernant les dommages ordinaires part de l’hypothèse d’une société atomistique, dans laquelle chaque personne jouit d’une propriété privée et de son occupation. Dans ce cas, le danger principal provient d’un certain type de dommages profonds effectués par une personne sur une autre.

Toutefois, les lois de voisins, comme le suggère leur nom, reposent sur un modèle de société bien plus évolué, dans lequel le souci principal des gens n’est pas de faire en sorte que leur prochain ne leur fasse pas de mal, mais plutôt que la communauté travaille de concert pour faire avancer les intérêts communs. En fait, la demande ne vise pas l’autonomie mais la coopération. Nous pouvons le constater en lisant le tout début de ces traités. En effet, la première phrase dans Baba Kamma est : « Il existe quatre types de dommages » tandis que le traité Baba Batra s’ouvre avec : « Des voisins qui veulent construire une séparation ». Il s’agit dans ce cas-là de voisins qui ont déjà des désirs communs et qui ont besoin de réglementer les manières de réaliser ces désirs. De même, à partir des noms de ces traités, nous avons l’impression que le début (première porte) de l’éthique des relations humaines consiste à éviter de faire du mal, mais que sa fin ou son objectif (dernière porte) est de favoriser l’action communautaire et la coopération.

Cette évolution, de l’isolement à la coopération, est une tendance générale dans la loi juive. La Bible nous raconte qu’à l’époque du Roi Salomon : « Et en Judée et en Israël, chaque homme était assis en sécurité sous sa vigne et sous son figuier depuis Dan [à l’extrême nord] jusqu’à Beer Sheva [à l’extrême sud] durant toute la vie de Salomon. » (Rois I, 5:5.) On considère souvent ce verset comme la description d’une existence parfaite et idyllique, mais comme je l’explique dans mon livre Meaning in Mitzvot (chapitre 94), il existe des preuves qui montrent que le Roi Salomon ne percevait pas les choses de cette manière. Certains des décrets que le Talmud attribue au Roi Salomon peuvent être interprétés comme des moyens de créer un plus grand degré de solidarité et un lien communautaire plus étroit au sein du peuple afin qu’il puisse réellement bénéficier de la sécurité matérielle qu’offrait le règne de Salomon.

Un corollaire à cette approche est que la limitation de la pollution ne se structure pas autour d’interdictions strictes, mais plutôt autour d’une démarche réglementaire dans laquelle la communauté établit des lignes de conduite qui définissent quels types de nuisances sont tolérés afin de ne pas perturber les activités économiques ou relatives à un mode de vie normal et quels types de nuisances présentent un réel danger et une gêne pour autrui. Par exemple, la grande autorité halakhique du XVIème siècle, le Rabbin Chlomo Cohen fut sollicitée pour statuer sur la pollution que causait l’industrie de teinture dans la ville. Il reconnut que la pollution que cette activité entraînait était une nuisance significative, mais il conclut en disant que cet inconvénient devait être mis en balance face au rôle extrêmement important que jouait cette industrie dans l’économie de la cité.

(1)
Ce genre de raisonnement est caractéristique des « lois de voisins » qui réglemente les activités en prenant en compte tout l’éventail des considérations relatives au bien-être de la communauté.

Dans certains cas, les sanctions pour la pollution peuvent impliquer des dommages financiers, comme dans un tort ordinaire et dans d’autres, l’exigence peut-être un arrêt complet de l’activité ou une réparation du dommage créé. La variété de réponses dérive du contexte communautaire et consensuel de ces lois.

Le contrôle de la pollution est une priorité ancienne et très importante dans la loi et la tradition juives. Nous pouvons voir que des réglementations détaillées pour apporter une solution au problème des nuisances étaient déjà en place il y a près de deux mille ans. Le contexte sur lequel reposent ces lois n’est pas une approche classique des torts de A qui nuit à B, mais plutôt une décision communautaire démocratique concernant l’évaluation de l’importance du dommage causé par la pollution au regard de la dépense investie pour le prévenir.

 

La rubrique d’Ethique Juive présente certains principes généraux de la loi juive. Pour des questions plus spécifiques et leurs applications directes, veuillez consulter un rabbin compétent.

 

Traduction et Adaptation de Ra’hel KATZ


Sources : (1) Responsa Maharchakh II:98.


 

 



A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Asher MEIR
Le rabbin Asher MEIR a reçu un diplôme de Ph.D. en Economie au Massachusetts Institute of Technology, ainsi que l'ordination rabbinique en Israël après avoir étudié pendant douze ans dans des yechivoth. Il dirige le Jewish Business Response Forum, au JCT Center for Business Ethics, et il enseigne les sciences économiques au Jerusalem College of Technology. Avant son installation en Israël, il a travaillé comme conseiller économique auprès de l'administration Reagan. Il a publié plusieurs articles sur des sujets relatifs au commerce et à l'économie modernes et sur la loi juive.
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