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Récits du Gouch Katif  - 3Cette série en trois parties va présenter des portraits individuels de résidents du Gouch Katif, peignant la dimension humaine qui se profile derrière la politique.
Faire le difficile choix entre hypocrisie et héroïsme.
 

3 - L'histoire de Noga Cohen

Noga Cohen est une femme vive, qui sourit constamment et rit avec beaucoup de facilité. En dehors de l’ascenseur de leur maison à deux étages et de la large salle de bain accessible aux infirmes, une visite chez les Cohen ne laisserait jamais imaginer que les trois enfants de Noga furent handicapés à vie quand une bombe terroriste atterrit sur leur car scolaire en novembre 2000.Le pied d’Orith, dix ans, fut arraché, le petit Israël, sept ans, perdit sa jambe à partir du genou et Tehilla, huit ans, perdit ses deux jambes sous le genou.
La famille Cohen, qui compte aujourd’hui huit enfants, vit dans le Gouch Katif, dans l’implantation de Kfar Darom. « Il est fait mention de Kfar Darom dans le Talmud » énonce fièrement Noga. Son époux, le Rav Ofir Cohen a écrit un livre qui traite des liens historiques du Peuple Juif avec la région de Gaza. A l’exception de quelques brèves périodes, depuis la victoire des Maccabées sur les Grecs, en 145 avant l’ère vulgaire, les Juifs ont toujours vécu dans cette région.

Le Kfar Darom moderne, construit près du site de l’ancien village du Talmud, a été fondé en 1946 sous l’instigation du père fondateur d’Israël, David Ben Gourion. Pendant la Guerre d’Indépendance, en 1948, Kfar Darom fut envahi par l’armée égyptienne. Il fut rétabli en 1970, après la victoire de la Guerre des Six Jours.
Les grands-parents de Noga ont fait leur aliyah de Boukhara. La famille d’Ofir vit en Israël depuis huit générations. Nouveaux mariés, Noga et Offir s’engagèrent à s’installer sur la terre ; leur seule question était de savoir où. En 1990, ils vinrent passer un Chabbat dans le Gouch Katif.

« Nous avons vu des gens qui vivaient dans un autre monde, se rappelle Noga. Nous avons vu un tel amour, nous nous sommes sentis acceptés comme si nous appartenions à la même famille. Nous nous sentions planer dans des nuages. Une telle proximité, une telle chaleur ! M’en rappeler me donne encore des frissons. ». Ils emménagèrent un mois plus tard.

Les lendemains de l’attaque

La véritable question est de savoir s’il est juste d’imposer à nos enfants notre engagement politique.

Durant les deux années qui suivirent la catastrophe, les Cohen vécurent près de l’hôpital de Tel Aviv où les enfants se rendaient quotidiennement pour la rééducation et pour apprendre à utiliser leurs prothèses. Ce n’est que lorsque Orith, Tehilla et Israël demandèrent à revenir à la maison que les Cohen revinrent à Kfar Darom.
Lorsque ses enfants avaient été blessés, Noga n’avait pas ressenti qu’elle avait commis une faute de venir dans un endroit si dangereux. « Si nous avions pensé que c’était une erreur, nous ne serions pas revenus. La véritable question est de savoir s’il est juste d’imposer à nos enfants notre engagement politique. Ecoutez, je suis adulte et je peux décider combien je suis prête à payer pour ce en quoi je crois. Mais profondément, je décide également que mes enfants paieront le prix de mes croyances.

Cela est vrai d’un côté. Mais de l’autre, je les éduque dans la foi en le Sionisme. Et je ne peux les éduquer à croire en le Sionisme et ne pas habiter ici. Ils me demanderaient alors : « Maman, si tu crois qu’il faut s’installer sur la terre d’Israël, pourquoi alors n’y vivons-nous pas ? »

Et je leur répondrais « parce que j’ai peur ». Il rétorqueraient : « Oh ! Tu crois en quelque chose mais tu as peur de le faire ? Tu crois que quelqu’un d’autre va être tué à ta place ? » Si je ne crois pas dans mon idéologie, mes enfants pourraient m’accuser d’hypocrisie ou de lâcheté et ils auraient raison. »

Noga déverse ses paroles avec spontanéité et effusion.

« Oui mes enfants ont payé un prix exorbitant, continue-t-elle. Même si quelque chose m’était arrivé, et pas à eux, ils en auraient payé le prix. Il y a ici à Kfar Darom des enfants dont les mères ont été tuées. Quoiqu’il arrive, la famille toute entière en paie le prix. C’est une responsabilité énorme. Mais si je considère que ce que le pays gagne, ce que le Peuple Juif tout entier gagne par ma présence ici ? Je ne suis pas là pour moi-même. J’ai un devoir ici, dans ce monde. C’est ce que je crois.

J’ai un grand devoir et c’est difficile, pas difficile, très difficile. Si je recherche une vie facile, je peux le faire. Mais nous, le Peuple Juif, avons un grand problème avec nos ennemis, alors si personne ne prend la responsabilité de les affronter, nous serons détruits. Si j’abandonne aujourd’hui, le Peuple Juif sera défait. Comment puis-je donner ma maison à des terroristes qui vont l’utiliser contre Israël ? »

Tehilla, l’héroïne

La voisine la plus proche des Cohen, Hadassah et son bébé sont souvent vus chez eux, preuve vivante du principe du Gouch Gatif : « chacun aide l’autre ». Hadassah remarque : « Ils forment une famille tout à fait normale. Les enfants ne paraissent jamais déprimés. Je suis là, je rentre et je sors et je n’entends jamais pleurer, crier ou même exprimer de la tristesse ».

« Notre famille n’a jamais eu d’aide psychologique, dit Noga. Nous n’en avons pas ressenti le besoin. Tehilla (qui a perdu ses deux jambes) dit toujours que ce que D.ieu veut, cela sera, où que vous soyez, à Kfar Darom ou à Tel Aviv. Elle nous aide à surmonter ces épreuves. En route pour l’hôpital, au moment où ses deux jambes furent arrachées, elle était consciente. Elle n’avait pas peur. Elle a récité des Tehilim pendant tout le trajet vers l’hôpital.

Ils souffrent beaucoup. Parfois ils ne peuvent se rendre dans certains lieux inaccessibles aux chaises roulantes. Ils haïssent les chaises roulantes. Ils haïssent les prothèses. Mais ils sont heureux. Ne me demandez pas comment.

Mes enfants pensent qu’ils paient un prix moins élevé que d’autres qui ont perdu une mère, un père ou leur propre vie. Ils sont vivants ! Ils peuvent jouer, ils peuvent sourire, ils peuvent étudier, ils peuvent tout faire. Bien sûr, pas de la même façon. Ils souffrent beaucoup. Parfois ils ne peuvent se rendre dans certains lieux inaccessibles aux chaises roulantes. Ils haïssent les chaises roulantes. Ils haïssent les prothèses. Mais ils sont heureux. Ne me demandez pas comment.

Tehilla me demande : « Pourquoi les gens me traitent-ils d’héroïne ? Untel est un héro, une telle est une héroïne, mais moi je ne suis pas une héroïne !» Alors je lui explique : « parce que tu pourrais rester au lit tous les jours et dire : « je ne veux pas aller à l’école aujourd’hui » ou « je ne veux pas faire le contrôle aujourd’hui parce que j’ai mal aux jambes » mais tu ne le fais pas ! » Et Tehilla répond : « ce sont des bêtises ! »

Les Cohen n’ont entamé aucun préparatif pour le désengagement.

« Quatre-vingt-dix pour cent d’entre nous pensent qu’il n’aura pas lieu. Nous croyons que quelque chose va se passer et ouvrir les yeux qui sont pour l’instant fermés. Mes enfants et moi-même avons demandé à Ariel Sharon qui a construit cet endroit et qui a posé, il y a dix ans, la première pierre de la synagogue d’en face : « Ainsi tu nous as envoyés ici donner nos jambes pour RIEN ? Si tu savais que tu allais renoncer à cet endroit, tu n’avais pas le droit de nous envoyer ici !» Et il a répondu : « je sais que vous êtes des héros.» C’est tout ».

Comment Noga elle-même répond-elle à cette question ? Quand le désengagement va avoir lieu, ressentira-t-elle que les membres de ses enfants auront été perdus pour rien ?

Noga prend une profonde inspiration et répond avec force :

« Non. Et c’est ce que je leur dis. Nous avons fait ce que nous devions faire. Nous faisons ce que nous pensons être bien »

Elle s’interrompt et se corrige : « ce que nous savons être bien. La plupart des Israéliens pensent que nous sommes des héros et que nous faisons ce qui est bien mais qu’eux n’ont pas la force d’assumer leurs croyances. Vous, dis-je à mes enfants, vous avez la force et la foi pour vous battre pour cet endroit, quelqu’en soit le prix à payer. Je fais le travail pour ceux qui habitent à Achkelon (ville au nord de la bande de Gaza). C’est calme à Achkelon parce que nous sommes là. Et ils le savent. Et ce qui fait vraiment mal, c’est qu’ils devraient m’aimer et me remercier tous les jours d’être là »

Les mots de Noga jaillissent de son cœur comme un geyser et puis ils retombent alors qu’elle repense à ce qu’elle vient de dire et se corrige à nouveau :

« Non, je ne les blâme pas s’ils ne m’aiment pas. Ce qui me fait mal, c’est qu’ils pensent à tort que si nous quittons Gaza, il y aura la paix. »

Noga marque une pause, se remémorant un semblant de paix avant l’Intifada.

« Il y a des années, avant notre attaque terroriste, quand la barrière courait tout au long du périmètre de l’implantation, mes enfants avaient l’habitude de s’y tenir et de jeter des bonbons aux enfants palestiniens de l’autre côté. Si un bonbon cognait le grillage et retombait de notre côté, mes enfants le ramassaient et le renvoyaient ».

La bouche de Noga se tord en un sourire amer. « Maintenant la barrière a été déplacée, je ne sais où et mes enfants ne s’y tiennent plus ».


Sur la porte des Cohen est accolé le panneau caractéristique des foyers du Gouch Katif qui proclame :

« ENSEMBLE, NOUS L’EMPORTERONS. »

Avec toutes les épreuves qu’ils ont déjà traversées, il est difficile d’imaginer les Cohen ne pas l’emporter !

 

Traduction et Adaptation de Cathy Coën

 



A PROPOS DE L'AUTEUR
Sarah Yoheved RIGLER
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