Même papa, qui a pourtant tellement à faire dans son bureau et passe si peu de temps à la maison, trouve un moment pour prodiguer des conseils
Combien de mamans n'ont-elles pas
entendu cet appel bien souvent émouvant dans la bouche d'un enfant à
l'approche de ces vacances de fin d'année que tous s'évertuent
d'ailleurs à appeler les " vacances de Noël " :
" Regarde maman, les Martin, en face, ils en ont bien un. Et les Durand,
là-bas... Comme il est joli leur arbre de Noël ! Comme il est bien
éclairé ! Il illumine même ma chambre depuis l'autre côté
de la rue, quand le soir, j'éteins ma lumière ! Dis, maman, tu
m'en achèteras un à moi aussi ? ... ".
Et la maman peut-elle ne pas céder
à ce pauvre chéri, qui a si bien travaillé pendant ce premier
trimestre? Ne faut-il pas lui faire plaisir puisqu'il a rapporté un si
bon bulletin? Et puis, finalement pourquoi aurait-il un complexe d'infériorité
vis-à -vis du petit Martin ou du petit Durand ? Ne vont-ils pas ensemble
en classe, à la piscine, au patinage ? N'est-il pas souvent invité
chez eux ? Pourquoi faire rougir cet enfant quand il se trouvera en face de
son ami et qu'il ne pourra pas parler lui aussi de son arbre de Noël ?
Et, même plus, pourquoi aurait-il honte quand on lui demandera ce que
le Père Noël lui a apporté?
" C'est entendu, mon chéri,
tu auras ton arbre de Noël. Et tu verras, nous le décorerons joliment,
nous l'illuminerons avec des ampoules électriques multicolores. Tu verras,
mon chou, tu n'auras rien à envier au petit Durand ou au petit Martin.
"
Et maman va acheter l'arbre de Noël. Et c'est un sujet d'entretien quotidien,
un sujet d'occupation et de préoccupation. Même papa, qui a pourtant
tellement à faire dans son bureau et passe si peu de temps à la
maison, trouve un moment pour prodiguer des conseils pour la décoration
de l'arbre de Noël, et aussi pour s'entretenir secrètement avec
la maman de ce que le Père Noël apportera au petit Hervé
(alias David) .
LA PEUR DU PARASITISME
Ne pouvons-nous donc absolument pas garder notre propre identité ?
Ce qui précède n'est
pas une fiction, hélas ! Ce n'est pas le produit d'une imagination fertile.
L'auteur regrette d'ailleurs qu'il n'en soit pas ainsi. Sa tâche en serait
bien facilitée. Hélas, trois fois hélas, il y a de trop
nombreux parents qui raisonnent et agissent comme la maman et le papa du petit
Hervé (alias David).
La frayeur du complexe, la peur
du parasitisme, l'inquiétude maladive de celui qui a peur d'être
différent et reconnu comme tel, le désir de ce que leur progéniture
ne souffre pas plus tard de son état (hélas acquis dès
sa naissance), et tant d'autres facteurs les plus variés et les plus
bizarres tout en restant bien souvent inconscients, entraînent les parents
à céder à leurs enfants quand ils ne prennent pas eux-mêmes
l'initiative de célébrer Noël autour d'un arbre de Noël.
" Mais c'est une fête civile ! Allons donc. Pourquoi vous formalisez-vous
donc tant ? Beaucoup de libres penseurs ont un arbre de Noël ! A l'école
laïque, on enseigne des chants de Noël ! Il n'y a pas là de
quoi fouetter un chat ! "
Il y a là, n'est-ce-pas, des
arguments pour vous convaincre tous et vous faire acquérir sans tarder
un arbre de Noël ! Hélas oui, à l'école laïque
on parle de Noël, et c'est une entorse à la laïcité
que nous déplorons beaucoup et contre laquelle il faudrait bien que la
Ligue pour la Laïcité de l'Enseignement intervienne un jour. Mais
ce fait est loin d'être une preuve pour la laïcité de Noël.
II suffit d'ailleurs d'entendre les
chants que les enfants doivent apprendre à cette occasion pour en être
persuadé ; et il faudrait être de mauvaise foi pour en conclure
différemment.
Par ailleurs, il est vrai certes,
que des libres penseurs ont un arbre de Noël. Y a-t-il chez eux encore,
ne serait-ce que dans leur subconscient, un reste de religion chrétienne
?
Nous n'en savons rien. Mais pourquoi inférer des libres penseurs ? Nous
ne le sommes pas que je sache. Nous sommes juifs et nous nous affirmons comme
tels ! Que nous importe donc la manière d'agir des libres penseurs? Faut-il
absolument que nous imitions quelqu'un ? Ne pouvons-nous donc absolument pas
garder notre propre identité ?
NOËL EST UNE
FÊTE RELIGIEUSE
Dresser dans sa maison un arbre de Noël consiste, qu'on le veuille ou non, à fêter celui que le Judaïsme n'a jamais reconnu et ne reconnaîtra jamais
Noël est une fête religieuse
chrétienne. Une des fêtes religieuses les plus importantes même.
Nous n'avons pas à chercher si à l'origine, l'arbre de Noël
avait une signification païenne. Peu nous en importe l'origine. Il est
un fait, c'est qu'à l'heure actuelle, Noël est l'anniversaire de
la naissance de Jésus. Le mot même vient de " natalis ",
que la tradition juive a retenu dans l'expression " Nitelnacht "
(nuit de la naissance).
Dresser dans sa maison un arbre de
Noël parce que les chrétiens en ont un, consiste, qu'on le veuille
ou non, que l'on y ajoute ou non la crèche qui normalement en fait partie,
à fêter et à faire fêter par un enfant juif celui
que le Judaïsme n'a jamais reconnu et ne reconnaîtra jamais. C'est,
de plus, graver dans l'esprit malléable de l'enfant, qu'il est absolument
identique au petit Martin ou au petit Durand, quand effectivement ceci n'est
- ou tout au moins - ne devrait pas être le cas.
Que les chrétiens fêtent
Jésus la nuit de Noël, c'est leur droit, c'est même pour eux
un devoir, et nous respectons leurs convictions ! Mais de là à
les imiter, il y a là un pas à ne pas franchir. Car pourquoi ne
pas aller plus loin ? Déjà, il n'est que trop pénible d'entendre
les juifs employer à tort pour leurs enfants des termes tels que baptême,
communion, messe, etc. Si l'usage erroné d'un terme n'a pas lui seul
une importance très grande, tout en témoignant cependant d'un
certain état d'esprit, l'adoption d'une pratique religieuse chrétienne
peut entraîner des conséquences extrêmement fâcheuses
que des parents inconscients seront eux-mêmes appelés à
regretter.
TRANSMETTRE LA
BEAUTE DE NOS TRADITIONS
Quoi de plus merveilleux pour l'enfant que ce chandelier qui chaque jour illumine de plus en plus toute maison juive ?
" Faut-il donc, alors, que
notre enfant soit toujours brimé, toujours privé de tant de belles
choses que d'autres enfants de son âge possèdent et qui lui feraient
tellement plaisir ? "
Non, Madame, il n'est pas question du tout de le priver. Loin de là !
II n'est pas le moins du monde question de lui donner l'impression - d'ailleurs
fausse - que la religion juive ne demande que privation et macération.
II faut au contraire lui montrer et lui faire vivre nos propres pratiques religieuses,
lui en faire apprécier toute la beauté et tout le merveilleux.
Et je vous garantis, Madame, que votre enfant, ne demandera pas un arbre de
Noël…
Nos fêtes, notre manière
traditionnelle de les célébrer, n'ont-elles donc pas à
vos yeux un contenu émotionnel suffisant pour intéresser et même
passionner vos enfants ?
Ne croyez-vous donc pas que vous-mêmes
vous y retrouverez un contenu toujours nouveau, dans un contenant pourtant ancien,
qui vous fera retrouver et apprécier à vous aussi le sens et la
valeur de ces fêtes au fur et à mesure que vous serez appelés
à les faire aimer par vos enfants?
Pourquoi donc Noël, quand nous
avons 'Hanoucca ? Quoi de plus merveilleux pour l'enfant qui a, chez lui, l'occasion
de célébrer cette fête, que ce chandelier qui chaque jour
illumine de plus en plus toute maison juive ! Quoi de plus merveilleux pour
lui que l'histoire que ces lumières lui raconteront par votre bouche
! Quelle belle épopée pour garçons et pour filles ! Epopée
ancienne, renouvelée en 1948 en Israël, et répétée
cette année encore, précisément à l'approche de
la fête de 'Hanoucca ! Et que dire du contenu religieux de cette fête
qui lui montrera que la vérité n'est pas toujours chez ceux qui
sont les plus nombreux et que l'Eternel peut faire vaincre " ceux qui
sont nombreux par ceux qui ne le sont pas, ceux qui sont forts par ceux qui sont
faibles " ?
Pourquoi d'ailleurs n'aurait-il pas
sa propre Menorah ? Pourquoi dès son jeune âge, qu'il soit garçon
ou fille, votre enfant ne prendrait-il pas l'habitude d'ajouter lui-même
une lumière à une autre et de participer à cette grande
illumination que le Judaïsme voudrait un jour voir réalisée
pour le bonheur de tous les hommes? Et si l'arbre de Noël des Durand se
réflète dans la chambre de David (alias Hervé), n'est-il
pas permis, dans un pays libre comme celui où nous avons le privilège
de demeurer, de répondre par l'illumination de la Menorah, placée,
elle aussi, devant la fenêtre ?
Parents juifs, en agissant ainsi,
vous êtes assurés que votre enfant n'aura pas ce complexe que vous
semblez tant redouter. Bien au contraire ! Mais attention n'attendez pas qu'il
vous réclame un arbre de Noël pour lui offrir une Menorah ! Ce serait
trop tard. Prenez les devants. Préparez-lui ces huit jours de fête
avec soin, fêtez-les en famille avec lui et nous vous garantissons que
jamais vous ne l'entendrez dire - car il sera fier de son 'Hanoucca et de son
titre de Juif -" Maman je veux aussi un arbre de Noël ! "