La Torah évoque, au début de la Paracha de Tsav, le sacrifice de Ola ou holocauste. A ce propos, le verset dit : « Ordonne à Aharon et à ses enfants en ces termes : ‘‘Voici la loi du Ola’’ ». Rachi explique que le terme ‘‘ordonne’’ a toujours un sens d’empressement. Et ici il fallait s’empresser car il y a un « ‘Hesron Kis », expression que l’on traduit par perte d’argent.

Pourquoi le terme ‘‘ordonne’’ appelle à l’empressement ? Le Talmud affirme que celui qui a reçu un ordre et l’exécute est plus élevé que celui qui agit sans avoir reçu d’ordre.

Cela semble étonnant. Celui qui agit de son plein gré semble être plus méritant !

En fait, celui qui agit en réponse à un ordre doit faire plus d’effort, car il doit surmonter le mauvais penchant qui essaie d’empêcher l’homme d’accomplir l’ordre reçu. Qui dit ordre, dit envie de transgresser l’ordre. C’est pourquoi l’ordre nécessite un empressement, car il faut s’empresser pour surmonter le mauvais penchant.

Ici, il fallait s’empresser compte tenu de l’ordre concernant le sacrifice de l’holocauste, car ce sacrifice est accompagné d’une perte d’argent. Et dans un tel cas, il faut encourager l’homme à agir malgré cette perte. Mais en quoi consiste cette perte d’argent inhérente à l’holocauste ?

L’explication la plus simple consiste à dire que comme l’holocauste est consumé entièrement sur l’autel, le prêtre qui l’offre n’en retire aucun profit. Pour lui, ce serait donc une perte d’argent et il risquerait d’être découragé de l’offrir. C’est pourquoi, la Torah a besoin de stimuler que les prêtres doivent s’empresser pour l’offrir.

Mais au delà de cette explication simple, d’autres plus profondes permettent de faire apparaître le sens de l’holocauste.

Le terme de ‘Hesron Kis, que l’on a traduit par perte d’argent peut signifier littéralement ‘‘manque de couvercle (‘Hesron Kisouy)’’. Chaque membre d’un homme détient une sorte de couvercle, qui protège ce membre pour ne pas l’utiliser à mauvais escient. Par exemple les lèvres ‘‘protègent’’ la bouche, pour qu’on puisse la fermer chaque fois que l’on ne veut pas dire du mal. De même, le lobe de l’oreille permet de fermer cet organe pour ne pas entendre des paroles de médisance. Quant aux yeux, ils sont protégés par les paupières.

Chaque membre qui peut entraîner la faute possède bien un Kis, une sorte de couvercle. Par contre, la pensée ne détient aucun ‘‘couvercle’’. Elle fonctionne à tout moment et ne s’arrête jamais. L’homme doit faire des efforts et doit faire particulièrement preuve de vigilance pour se protéger des mauvaises pensées.

Et comme l’holocauste venait précisément en expiation pour les mauvaises pensées, c’est en ce sens que ce sacrifice est accompagné d’un « ‘Hesron Kis » et la Torah avait besoin d’empresser l’homme de veiller particulièrement à sa pensée.

Quand on parle de la pensée, qui manque de « couvercle », il y a lieu de s’empresser. C’est pourquoi, l’holocauste était brûlé totalement. Car, le Zohar dit que les mauvaises pensées doivent être totalement ‘‘brûlées’’ par le feu de la Torah. Par là, il nous est donné un conseil pour se préserver des mauvaises pensées. Il s’agit de méditer à la Torah, car tant qu’un homme a des pensées pures, il ne peut pas en avoir de mauvaises.

Le Rebbe Isaac Méïr de Gour propose un autre développement. Il explique que toute chose élevée et sacrée nécessite d’être recouverte pour que son essence profonde soit protégée. Bien, plus, l’existence même de la sainteté dépend de ce ‘‘couvercle’’. La sainteté ne peut supporter d’être extériorisée, car dans le monde extérieur règnent des influences étrangères à la pureté.

Même la sainteté des sacrifices avait besoin d’être protégée. Le « couvercle » de la sainteté des sacrifices résidait dans le fait que les prêtres ou les propriétaires de l’animal sacrifié en mangeaient. Cette consommation, qui paraissait comme un acte simple et profane, recouvrait la profondeur du sacrifice et dissimulait sa grande sainteté.

Seule l’holocauste, qui était complètement brûlé sur l’autel et dont rien n’était consommé, manquait de couvercle qui protègerait sa sainteté. C’était cela le ‘Hesron Kis ou manque de couvercle qui se trouvait dans l’holocauste. C’est pourquoi, ce sacrifice nécessitait plus d’empressement que les autres sacrifices. La sainteté, lorsqu’elle est exposée à l’extérieur, doit être beaucoup plus protégée.

C’est dans le même ordre d’idées qu’un passage du rituel de Chabbath fait état de quatre types de fidèles.

Il y a des gens qui font entendre leur prière par leur bouche : « Par la bouche des gens droits Tu seras loué ». D’autres personnes se contentent de remuer leurs lèvres : « par les lèvres des Justes Tu seras béni ». Une autre catégorie de Juifs ne font pas paraître leur foi et se contentent de ne laisser remuer que leur langue : « Par la langue des pieux Tu seras sanctifié ». Les saints, par contre, cachent leur enthousiasme sacré dans les profonds replis de leur cœur : « C’est dans le for intérieur des saints que Tu seras loué ».

Lorsque tous les Juifs feront résider le Créateur à l’intérieur de leur cœur, au niveau individuel, on méritera que D.ieu réside parmi eux, à un niveau collectif, par la construction du troisième Temple, très bientôt, Amen.