La Paracha de cette semaine est riche en contenu. La Torah nous relate la terrible faute du veau d'or et ses conséquences. Moïse implore ensuite l'Eternel pour qu'Il leur pardonne la faute. Il est resté pour cela quarante jours au ciel. D.ieu accepte de leur redonner des Tables, gravées par Moïse. Au bout de quarante jours où, ni il mangea, ni il but, Moïse redescend avec les deuxièmes Tables. Alors, son visage dégageait de la splendeur. Les Hébreux eurent peur de l'approcher. La Torah nous révèle alors : « Mais Moïse ne savait pas que son visage rayonnait » (Exode 34 :29).
Apparemment, cette précision semble inutile. Pourquoi préciser que Moïse ne savait pas que son visage rayonnait ? De plus, pourquoi fallait-il qu'il ne le sache pas ? Que ce serait-il passé s’il l’avait su ? Enfin, pourquoi son visage dégageait-il cette splendeur ? Quel est l’origine de cet éclat et surtout quelle était son utilité ?
Nos Sages nous enseignent que la connaissance de D.ieu est imperceptible par l'homme. Ainsi, il est enseigné que « aucune pensée ne peut Te saisir » (Introduction des Tikounim, Peti’hat Eliahou). Un homme ne peut pas connaître la façon par laquelle D.ieu sait. Maïmonide pose ce principe comme justification de la possibilité du libre arbitre qui est paradoxale. D'un côté, il est évident que D.ieu sait tout. Et il est bien sûr qu’il sait également qui doit être juste et qui sera impie. Mais alors, où se situe le libre arbitre ?
A cette question, Maïmonide explique que la connaissance de D.ieu est totalement imperceptible par celle de l'homme, de sorte que bien que D.ieu sache la destinée de chacun, malgré tout, cette connaissance n'influe en rien l'action de l'homme, qui reste libre. C'est que la connaissance de D.ieu transcende totalement celle de l'homme.
D’autant plus que nos Sages, et notamment le Ari Zal, enseignent que Moïse notre Maître correspondait à la Connaissance Supérieure, comme il est dit (Deut. 34 :10) : « Il a connu l'Eternel face à face ». C'est d'ailleurs pourquoi sa génération portait le nom de "génération de la connaissance".
On peut alors s'interroger. Si Moïse relevait du niveau de la Connaissance Supérieure, si l'on peut ainsi s'exprimer, alors comment pouvait-il enseigner la Torah au peuple Juif ? Mais n'est-ce pas que la Connaissance Supérieure est imperceptible par l'homme ?
C'est précisément pour cela qu'il fallait que son visage dégage de la splendeur. Cette splendeur se dévoilait à l'extérieur. Par l'intermédiaire de celle-ci, l'enseignement de Moché pouvait s'extérioriser et être compris par tout le peuple.
Mais, si Moïse savait que son visage rayonnait, alors cette splendeur serait incluse, par-là même, dans sa connaissance, cette connaissance-là même qui relève de la Connaissance Supérieure, que l'homme ne peut saisir. La conséquence aurait alors été que cette splendeur ne pourrait plus jouer sa fonction de permettre aux Juifs de saisir son enseignement, car une fois incluse dans la Conscience Supérieure, elle ne peut donc plus être saisie par l'homme. C’est pourquoi Moïse ne devait pas savoir que son visage resplendissait.
Pourquoi Moïse détenait cette Connaissance Supérieure ? Lorsque la Torah qualifie Moïse, elle le décrit comme étant « l'homme le plus humble de tous les hommes » (Nombres 12 :3). Et on peut dire que c’est cette profonde humilité qui l'a conduit à cette Connaissance. L’humilité consiste à avoir une conscience juste de la réalité des choses.
Un Midrash demande d'où Moïse a mérité cet éclat de splendeur. Il répond que lorsque Moïse a écrit la Thora, il est resté un peu d'encre dans la plume. Lorsqu'il a essuyé cette encre sur sa tête, c'est ainsi que s'est formée cette splendeur.
Ce Midrash paraît très étonnant. En quoi le fait qu'il restait de l'encre sur la plume serait-il un mérite ? Mais aussi pourquoi restait-il de l'encre sur la plume, alors que la quantité d’encre était bien calculée ? Et surtout, pourquoi grâce à cette encre il mérita justement cette splendeur ?
Lorsque D.ieu dicta à Moïse le verset : « L'homme Moïse est le plus humble (Anav) de tous les hommes… », dans sa grande modestie, il refusa d'écrire. Mais sur l'ordre de D.ieu, il fut contraint d'écrire. Mais, il écrivit ce terme sans la lettre Youd (troisième lettre du mot Anav). Il voulait ainsi réduire son éloge le plus possible. Ceci explique pourquoi il restait sur sa plume la quantité d'encre pour écrire la lettre Youd qu'il supprima, par modestie.
Et comme le fait qu'il restait de l'encre sur sa plume exprime sa profonde humilité, ceci lui donna donc le mérite que se dégage la splendeur de son visage. Car c’est bien sa modestie qui était à l'origine de sa Connaissance qui implique la nécessité du dégagement de la splendeur sur son visage.
Cela vient nous apprendre l'importance de l'humilité, qui est la seule qualité qui décrit Moïse. Celui qui se rabaisse, D.ieu l'élève et la Torah ne peut s'acquérir que par celui qui est humble.
Cette effacement récurrente de Moïse se retrouve dans notre Paracha, lorsqu'il affirma à D.ieu : « Pardonne leur (la faute du veau d'or), sinon, efface-moi du livre que Tu as écrit ». Par l'humilité, on peut arriver à des hauteurs insoupçonnées.