Logo Lamed.frhttp://www.aish.comAccueil Lamed.fr
...
.

Paracha

.
...
...
.

Soutenez-nous

.
...
Paracha / Dvar Torah back  Retour

Les quatre expressions de délivrance

Quatre textes bibliques sont lus à l'approche de Pourim et jusqu'à Pessa'h (Pâque). Il s'agit des sections de Chekalim évoquant le demi-sicle, de Zakhor rappelant le souvenir d'Amalek, de Para évoquant la vache rousse et Ha'hodesh évoquant le mois de Nissan.

Le Talmud de Jérusalem, au traité Meguila (folio 3, loi 5) enseigne qu'on peut lire les trois premières sections séparément, c'est-à-dire en laissant un Chabbat entre elles sans qu'on lise un de ces textes. Mais, les deux derniers textes, ceux de Para et Ha'hodesh, doivent être suivis ; on doit les lire un Chabbat après l'autre. Le Talmud compare cette situation à celle des quatre coupes de vin qu'on doit boire à Pessa'h. On peut s'interrompre entre les trois premières coupes pour boire, mais non entre la troisième et la quatrième, où on ne doit rien boire entre ces deux coupes.

Mais quel est le rapport entre ces quatre textes et les quatre coupes de Pessa'h ?
 

Une gradation dans l'exil et la délivrance

Dans la section de Vaera, D.ieu assure à Moïse qu'Il va délivrer les Juifs d'Egypte. Pour cela, Il utilise quatre expressions :
" Je les sortirai des souffrances d'Egypte, Je les sauverai de la servitude, Je les délivrerai, et Je les prendrai pour peuple ".
Ces quatre expressions sont à l'origine des quatre coupes de vin de Pessa'h et des quatre textes lus jusqu'à Pessa'h. Mais quel est le sens de ces expressions ? Et pourquoi en fallait-il quatre ?

Le Maharal de Prague, Rabbin du 17ème siècle, explique que lorsque D.ieu annonce à Abraham l'exil de ses descendants, Il lui dit : " Sache que tes descendants seront étrangers dans un pays qui ne leur appartiendra pas, ils les asserviront et les feront souffrir… " (Genèse 15 :13).

Les Juifs connurent trois stades en exil : le statut d'étranger, puis la servitude, et enfin, la souffrance.

Ce texte montre que les Juifs connurent trois stades en exil. Tout d'abord, la situation d'être étranger. Les Juifs ne furent pas oppressés et ne souffrirent pas. Seulement, ils ne détenaient pas la même liberté qu'un citoyen. Puis, ce fut la servitude, à l'image d'un maître qui prend un esclave et le fait travailler pour lui. Et enfin, ce fut la souffrance, une souffrance dépassant celle de la condition d'un esclave. C'est à ce propos qu'il est dit : " Ils les feront souffrir ".

Lorsque D.ieu se résolut de délivrer les Juifs d'Egypte, Il devait régler ces trois problèmes. Mais, il commença logiquement par le plus grave et le plus urgent. Il dit tout d'abord : " Je les sortirai des souffrances d'Egypte ", se référant aux terribles afflictions qu'ils connurent dans ce pays et qui constituait le troisième stade de l'exil. Puis, " Je les sauverai de leur servitude ". Il fallait les délivrer de leur condition d'esclave, qui forgeait le deuxième stade, moins douloureux. Et enfin, " Je les délivrerai ". Il s'agit de la délivrance du pays d'Egypte, de la situation d'étrangers. Alors, les Juifs ne seront plus subordonnés à une autre nation, mais ils seront libres, livrés à eux même.

Mais cette situation, bien que meilleure, n'est pas suffisante. Certes les Juifs ne seront plus possession égyptienne. Mais il faut en plus qu'ils soient propriété divine, qu'ils appartiennent à D.ieu et soient Son peuple. C'est à ce propos que D.ieu termine Sa promesse par les termes : " Je les prendrai pour peuple ". Tel est le sens de ces quatre expressions de délivrance.

Les trois premières consistent en la libération de l'appartenance égyptienne selon ses trois stades. Mais la quatrième constitue le changement de propriété pour devenir le peuple de D.ieu. Seulement, le passage radical d'un état à un autre diamétralement opposé doit se faire de façon immédiate. Les Juifs ne peuvent pas rester un instant sans propriétaire. Soit ils sont les esclaves des égyptiens, soit ils sont les serviteurs de D.ieu.

La nature a horreur du vide ; par conséquent, le passage de la subordination aux égyptiens à l'appartenance à D.ieu doit être immédiate.

Cela se prouve scientifiquement. Les scientifiques posent que " la nature a horreur du vide ". La disparition d'un état se solde nécessairement et automatiquement par l'arrivée d'un autre état. De même, le passage de la subordination aux égyptiens à l'appartenance à D.ieu doit être immédiate. Ceci explique qu'il ne peut y avoir d'interruption entre la troisième expression de délivrance, qui clôture la relation à l'Egypte, et la quatrième formule qui introduit la relation à D.ieu.

Ceci implique également qu'entre la troisième coupe de vin et la quatrième, on ne doit pas s'interrompre en buvant un autre verre, et qu'entre la troisième section et la quatrième, aucun Chabbat de vide ne doit s'interposer.
 

Un exil spirituel

Mais, l'exil d'Egypte ne peut se résumer uniquement en un exil seulement physique. Il avait bien une incidence spirituelle également. D'ailleurs, Maïmonide, Rabbin et penseur Juif du 12ème siècle, dans son Guide des Egarés, affirme que Pharaon c'est véritablement le mauvais penchant. De fait, les trois stades de l'exil d'Egypte se retrouvent également d'un point de vue spirituel et la délivrance d'Egypte comportait également une délivrance d'ordre moral, un affranchissement du mal et de l'impureté.

Cette idée est développée par Rabbi Tsadok Cohen de Lublin dans son Peri Tsadik. Il affirme que les trois stades de l'exil d'Egypte constituent trois degrés dans le mal.

Il s'agit des trois éléments qui, selon les Maximes des Pères au chapitre 4, expulsent l'homme de ce monde, et qui sont : la jalousie, le désir et l'orgueil (la recherche des honneurs).

L'Egypte, représentant l'apogée de l'impureté, " la nudité de la terre " (Genèse 42 :12), reflète l'assujettissement à ces trois défauts qui caractérisent le mal. La jalousie, qui est " aussi dure que l'enfer " (Cantique des cantiques chap. 8), conduit l'homme à une souffrance invivable. Une personne vraiment jalouse ne sera jamais satisfaite de ce qu'elle a. Ce qu'elle veut, c'est ce que les autres ont. Cela étant irréalisable, sa vie sera donc un enfer. Tel est le troisième stade de l'exil spirituel d'Egypte : la souffrance insupportable.

Puis vient le désir. Le désir qui fait de l'homme un esclave. On dit bien que l'homme devient esclave de ses pulsions, de ses désirs, qui le contrôlent et l'aliènent. C'est le deuxième niveau de l'exil moral d'Egypte : l'esclavage.

Et enfin, c'est la recherche des honneurs ou l'orgueil. Une personne imbue de sa personne, qui ne cesse de se surélever par rapport aux autres et qui recherche sans répit d'être honorée, n'est pas appréciée par la société. Les gens essaient de l'éviter et il ne pourra trouver sa place. Il sera toujours dans une situation d'" étranger ". D'ailleurs, nos Maîtres n'ont-ils pas déjà dit que " les honneurs fuient celui qui les recherche ", qui devient donc un vrai étranger ? Cela est le pendant du premier niveau de l'exil spirituel d'Egypte : la condition d'étranger.

L'homme, s'il veut se libérer du mal et sortir d'" Egypte ", doit tenter d'améliorer ces trois traits de caractères. C'est seulement alors que l'on peut aspirer appartenir à D.ieu et Le servir, ce qui constitue la quatrième étape.

C'est d'après cet angle là que les quatre fameuses sections lues à l'approche de Pourim et jusqu'à Pessa'h ont été instituées par rapport aux quatre formules de délivrance.

Tout d'abord, la première section, celle du demi sicle, est réservée au perfectionnement de la jalousie. Nos Maîtres enseignent dans le Midrash Berechit Rabba (84, 18) que puisque les tribus ont vendu Joseph pour 20 sicles, leurs descendants devront chacun donner un demi sicle comme réparation. Or, nous savons bien que c'est la jalousie qui entraîna la vente de Joseph. Ainsi, par la Mitsva (commandement) du demi sicle, où " le riche ne donnera pas plus, le pauvre ne donnera pas moins ", ce qui instaure une égalité entre tous, on vise à éradiquer la jalousie, qui naît de la différence entre les personnes. C'est par cela que l'on peut réparer la faute de la vente de Joseph.

Puis, par la deuxième section, celle qui commémore ce qu'ont fait les Amaleçites au peuple Juif, on tend à se préserver de l'assujettissement à ses désirs. Le texte dit bien : " Souviens-toi de ce que t'a fait Amalek… Il t'a rencontré accidentellement (en hébreu : KARkha) " (Deutéronome 28 :18). Le Midrash du Rabbin Tanhouma (section Ki Tetsé, chapitre 9) fait remarquer que le terme KARkha a la même racine hébraïque que " KERi ", signifiant " perte séminale ", qui est une sorte d'" accident ". C'est que Amalek a souillé les Juifs par l'impureté de la perte séminale. Cela représente bien le désir par excellence. C'est l'impureté provoquée par le désir. En lisant la section du souvenir d'Amalek, on essaie de réparer ce point.

Ensuite, on lit la section de la vache rousse, dont les cendres purifient de l'impureté de la mort. Or, la mort est une conséquence du péché originel. Le serpent persuada Eve de manger du fruit interdit, car " le jour où tu en mangeras, tu deviendras égal à D.ieu " (Genèse 3 :5). Ainsi, le serpent conduisit Eve à l'orgueil la menant à la faute dont la conséquence fut la mort. Purifier de la mort signifie donc purifier de l'orgueil. C'est ainsi qu'en amenant la vache rousse, il faut justement penser à être très humble et s'écarter de toute forme d'orgueil. C'est pourquoi, on asperge la personne impure avec les " cendres " de la vache rousse, symbole de l'humilité, rappelant Abraham qui avait affirmé : " Je suis terre et cendre " (Genèse 18 : 27). On parvient ainsi à la réparation de l'orgueil, cause de l'impureté de la mort dans le monde.

En résumé, le mal que représente l'Egypte a trois visages : la jalousie, le désir et l'orgueil. C'est cela le sens des trois stades de l'exil. Et la délivrance s'opère à partir de la lecture des trois fameuses sections.

Une fois que l'on est délivré de l'Egypte spirituelle, après avoir lu ces trois sections, on doit alors atteindre la quatrième étape : " Je vous prendrai pour peuple ". On procède alors à la lecture du quatrième texte, celui du Mois de Nissan dans lequel on lit : " Tirez et prenez un agneau ", pour le sacrifice pascal. Il s'agit là d'apporter un sacrifice à D.ieu et de Le servir, devenant ainsi son peuple. Ceci ne peut se faire qu'après avoir " tiré ", c'est-à-dire après s'être " retiré " de l'idolâtrie et du mal.

Après s'être écarté du mal, ce qui a pu être réalisé par les trois premières étapes de délivrance, il faut immédiatement " prendre un agneau " et l'offrir à D.ieu pour Le servir et lui appartenir.

Le vide laissé par l'élimination du mal et de ses trois aspects doit, immédiatement et sans aucune interruption, être comblé par un contenu relevant de la sainteté. Il ne faut donc pas s'interrompre entre la troisième section et la quatrième qui symbolise l'éloignement du joug égyptien à l'appartenance à D.ieu.



A PROPOS DE L'AUTEUR
Michaël Mouyal
Michaël Mouyal est élève au Séminaire Israélite de France
  Liens vers les articles du même auteur (26 articles)


Emettre un commentaire
 Nom
 Prénom
 Email *
 Masquer mon email ?
Oui  Non
 Sujet
 Description (700 caractères max) *
 * Champs obligatoires
...
.

Outils

MODIFIER LA TAILLE DU TEXTE
.
...
...
.

Et aussi...

.
...